Cameroun : face à Paul Biya, Maurice Kamto tente un come-back

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Cameroun : face à Paul Biya, Maurice Kamto tente un come-back
Cameroun : face à Paul Biya, Maurice Kamto tente un come-back

Africa-Press – Cameroun. Si ce retour dans le jeu électoral était prévisible, l’annonce de la participation du Mouvement pour la renaissance du Cameroun (MRC) aux prochains scrutins n’a pas manqué de faire son effet. « Décision réfléchie » pour les uns, « comble de l’incohérence » pour les autres, le bout de phrase prononcé par Maurice Kamto tandis qu’il procédait à l’installation du bureau local du MRC dans la région Littoral 2, le 8 octobre dernier, a été abondamment commenté.

« Taillé sur mesure pour Biya »

Ce come-back traduit d’abord un repositionnement tactique du MRC qui, ces quatre dernières années, s’est employé à fustiger l’iniquité d’un système politique qu’il estime être « taillé sur mesure pour le président Biya » et qui, selon lui, ne laisse que très peu de place à l’expression d’opinions contraires. Cet avis tranché, Kamto l’avait défendu devant le Conseil constitutionnel lors de l’examen du contentieux électoral portant sur les résultats de la présidentielle de 2018. Les nombreuses manifestations anti-Biya qui avaient suivi avaient été violemment réprimées par les forces de l’ordre.

Peut-on aller à des élections alors que l’on conteste les résultats du scrutin précèdent et que le code électoral n’a pas été réformé ? En 2020, Maurice Kamto n’avait pas encore fini de déployer sa campagne de protestation baptisée « Non au hold up électoral » qu’il lui avait fallu répondre à cette épineuse question. L’opposant en avait conscience : participer aux élections législatives et municipales organisées cette année-là alors même qu’il revendiquait la victoire à la présidentielle revenait à valider la reconduction de Paul Biya à la magistrature suprême. Le boycott, quant à lui, le privait d’une assise à l’Assemblée nationale, laquelle conditionne aujourd’hui sa participation à la prochaine présidentielle, la loi électorale exigeant que tout candidat soit investi par un parti comptant au moins un élu local.

Incompréhension et colère

En plein dilemme, Maurice Kamto s’était finalement résigné à la deuxième option, celle du boycott, provoquant la furie de quelques alliés et de cadres déçus de devoir remiser leurs ambitions personnelles. Depuis, certains ont rendu leur tablier. Le plus bruyant d’entre eux, Célestin Djamen, blessé par balle lors de la répression des manifestations pacifiques de janvier 2019, a lancé son propre parti.

Le MRC a également dû faire face au courroux de certains caciques du pouvoir, qui espéraient profiter de l’occasion pour prendre leur revanche sur l’homme qui venait de faire trembler le régime – jamais, depuis 1992, coup de semonce n’avait été aussi sérieux. Depuis 2020, les porte-voix du Rassemblement démocratique du peuple camerounais (RDPC) ne cessent de reprocher au MRC son « suicide politique ». Une « sollicitude » inhabituelle qui, pour Maurice Kamto, est la preuve qu’un « piège politique » leur avait été tendu, à lui et à ses partisans, par le parti au pouvoir. « C’est parce que nous avons évité ce piège-là que le régime, furieux, est devenu franchement féroce contre le MRC, a-t-il répété devant ses partisans à Bafoussam, le 20 août dernier. Depuis plus de deux ans, ce parti n’a pas digéré la pilule de notre boycott, dont l’approbation populaire a montré l’étendue de l’illégitimité de ses élus. »

Coup de pression

Alors que ses détracteurs l’accusent de « lutter pour ses propres ambitions », Maurice Kamto oppose un « sacrifice » consenti pour « impulser le changement dans le pays ». De fait, le boycott n’a pas entamé la popularité du MRC, ni celle de son leader qui continue de mobiliser lors de ses différentes tournées. Mais Kamto le sait, le choix de ne pas prendre part aux scrutins locaux a laissé des traces. Alors, sans cesse, il s’explique et justifie. À Nkongsamba comme à Bafoussam, l’opposant a répété qu’il s’agissait d’une « tactique circonstancielle ». « Chaque épreuve que nous avons subie nous a fortifiés, et nous en avons tiré les leçons », a-t-il insisté.

En annonçant leur participation à la prochaine présidentielle et « à toutes les autres élections », le MRC et Maurice Kamto mettent ainsi un coup de pression sur le RDPC. Paul Biya se représentera-t-il ? Difficile de s’avancer, compte tenu de l’âge du capitaine (le président aura 92 ans en 2025). Mais le régime se passerait volontiers de cet encombrant opposant qui, en 2018, avait paru sortir la classe politique de sa léthargie.

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