Africa-Press – Cameroun. Investir au Cameroun) – Dans un décret signé le 25 avril 2025, le président de la République, Paul Biya, a nommé Johnny Razack, 52 ans, à la présidence du conseil d’administration de la Société nationale d’investissement (SNI). Cette institution constitue le bras séculier de l’État camerounais pour la prise de participations et la création d’entreprises. Il succède ainsi à Geoffroy Désiré Mbock, écarté après cinq années passées à ce poste.
Pour le remplacer, Paul Biya a choisi un fonctionnaire pur jus, au parcours académique solide et au carnet d’adresse réputé étoffé. Administrateur civil principal expérimenté, Johnny Razack est diplômé de l’ENA de Paris. Avec son compatriote Jean Lucien Ewangue, ancien de la PRC aujourd’hui à l’Unesco, Johnny Razack est un frais émoulu de la promotion Léopold Senghor 2002-2004 dont l’une des têtes couronnées est l’actuel président français Emmanuel Macron. Il est par ailleurs diplômé de l’Enam de Yaoundé, issu de la promotion « Bonne gouvernance » (1998-2000), la même que celle de l’actuel ministre de la Santé publique, Malachie Manaouda.
Au moment de sa nomination, il occupe le poste de secrétaire général du ministère du Travail et de la Sécurité sociale, une fonction qu’il exerce depuis le 22 décembre 2015. Ce haut fonctionnaire a également dirigé le courrier gouvernemental à la Primature et officie comme greffier des syndicats depuis une dizaine d’années. C’est cependant au Minpladat (ancien nom du ministère de l’Économie) qu’il a débuté sa carrière en 2005, en tant que chef de service du personnel par intérim à la direction des affaires générales.
Militant engagé du RDPC, ce natif du département de la Bénoué (région du Nord) est également chargé de mission au Comité central. « Sa nomination à la SNI confirme la volonté du chef de l’État de confier les leviers stratégiques de l’économie nationale à des profils de confiance », un de ses camarades politiques.
Cette décision intervient peu après la nomination des onze administrateurs de la SNI, parmi lesquels figurent Gwendoline Abunaw, directrice générale d’Ecobank Cameroun, et Célestin Tawamba, président du Groupement des entreprises du Cameroun (Gecam). Tous deux siègent à ce conseil d’administration en tant que représentants respectifs de l’Association professionnelle des établissements de crédit du Cameroun (Apeccam) et de la Gecam, principale organisation patronale du pays.
Restructuration
Ce renouvellement du conseil d’administration s’inscrit dans le cadre de la restructuration de la SNI, décrétée le 10 juillet 2024 par Paul Biya. Cette réforme, qui transforme la SNI en une société à capital public, place désormais l’institution au cœur de la conception et de la mise en œuvre de la stratégie de développement économique et industriel du Cameroun.
Selon certains analystes, la « SNI new look », dont le capital est porté à 200 milliards de FCFA à libérer sur quatre ans, pourrait se muer en un véritable holding d’investissement. Avec cette évolution, il est prévu l’ouverture du capital de ses filiales à d’autres actionnaires (publics ou privés), dans l’objectif de piloter stratégiquement ses participations et de faire émerger des champions nationaux.
Il est important de souligner que le décret du 10 juillet 2024 élargit considérablement les missions de la SNI. Désormais, l’institution agit à la fois comme investisseur institutionnel de l’État et comme cabinet d’études-conseils. Avec l’État comme unique actionnaire, elle est chargée de mobiliser et d’orienter les financements pour favoriser les investissements productifs dans divers secteurs, notamment industriel, agricole, minier, financier, commercial et des services.
Parmi ses nouvelles attributions, la SNI délivre désormais les visas préalables de viabilité économique et financière pour toutes les interventions de l’État dans les projets industriels portés par le secteur privé. Ses missions s’étendent également aux entreprises publiques, pour lesquelles elle réalise des analyses comptables et financières, mène des études diagnostiques et évalue leur performance. Elle supervise en outre l’élaboration et l’exécution des contrats de performance entre l’État et ces entreprises.
Enfin, la SNI est désormais compétente en matière de capital-risque et de capital-développement, ainsi que pour les activités d’intermédiation en bourse et de gestion d’actifs.
Autant dire que le challenge est de taille pour Johnny Razack. Le quinquagénaire coche certes toutes les cases au double plan politique et administratif, mais un détail pourrait faire obstacle à la conduite efficace de la SNI, désormais un géant aux enjeux colossaux: son manque d’expérience dans la gestion des entreprises, qu’elles soient publiques ou privées. Dans les milieux d’affaires, certains pointent justement cet handicap, alors que d’autres saluent son parcours académique, administratif et son réseau.
Baudouin Enama
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