Africa-Press – Cameroun. En 1985, l’American Cancer Society et l’entreprise pharmaceutique Imperial Chemical Industries créent l’Octobre Rose, une campagne mondiale de sensibilisation au cancer du sein. Depuis, le ruban rose, emblème de ce programme, rappelle chaque année l’importance du dépistage précoce et le besoin de fonds pour la recherche.
Cancer le plus fréquent et le plus meurtrier chez les femmes
Cancer le plus fréquent et le plus meurtrier chez les femmes, les campagnes de dépistage du cancer du sein ciblent principalement les femmes de plus de 50 ans et les personnes à risque (antécédents familiaux, mutation de certains gènes tels que BRCA1/2 et PALB2). Ainsi l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) recommande vivement des mammographies tous les deux ans pour les femmes à partir de 50 ans, voire à partir de 40 ans si celles-ci sont à risque. Pour les moins de 50 ans qui ne sont pas à risque, des examens cliniques fréquents sont tout de même conseillés.
Pourtant, la caractérisation des populations à risque est aujourd’hui questionnée, et ce en raison de l’augmentation significative des cas chez les jeunes femmes.
Un manque de données chez les jeunes femmes
Cette hausse des cas chez les jeunes femmes est observée depuis plusieurs années par les gynécologues, les radiologues et les médecins généralistes, aux quatre coins du globe. Cependant, peu de données permettent une analyse précise de la prévalence de ces cancers en fonction des tranches d’âges des patientes, du mode de vie et des caractéristiques pathologiques des tumeurs.
Le docteur Stamatia Destounis, radiologue spécialisée en imagerie mammaire et directrice associée à la clinique d’Elizabeth Wende Breast Care à Rochester (EWBC) (Etats-Unis), s’est donc penchée sur les données recueillies auprès de sept centres de soins ambulatoires de l’État de New York. En collaboration avec sa collègue Andrea Arieno, responsable de la recherche à l’EWBC, elle a recensé l’ensemble des cancers du sein diagnostiqués entre 2014 et 2024 dans ces centres médicaux, avec les comptes rendus d’imagerie clinique associés.
« Nous avons recueilli des informations précises sur la manière dont le cancer a été détecté — par mammographie ou diagnostic clinique — son type ainsi que d’autres caractéristiques tumorales » explique le Dr Stamatia Destounis à Sciences et Avenir. « Nous avons exclu les cas qui n’étaient pas des cancers du sein primitifs et nous avons regroupé les patientes par sous-groupes d’âge, par méthode de détection et par biologie tumorale. Cela nous a permis d’identifier comment le cancer du sein se manifeste dans cette population de patientes, sa fréquence d’apparition et les types de tumeurs rencontrées » poursuit le docteur.
« 20 à 24 % des diagnostics concernent des femmes âgées de 18 à 49 ans »
Les résultats de cette étude ont été présentés lors du congrès annuel de la Radiological Society of North America. L’analyse de ces 11 années de données recense 1 799 cas de cancers du sein chez des femmes de 18 à 49 ans, représentant entre 20 et 24 % de la totalité des cas diagnostiqués dans ces établissements.
Parmi ces cancers détectés chez les moins de 50 ans, 41 % ont été repérés grâce à une mammographie de routine, tandis que 59 % ont été repérés lors d’examens diagnostiques réalisés à la demande de patientes ayant détecté elles-mêmes des symptômes tels que des rougeurs ou des grosseurs au niveau mammaire.
« Le nombre n’est donc pas le reflet exact de l’incidence du cancer du sein, mais il montre que les femmes de moins de 50 ans ne doivent pas être considérées d’emblée comme présentant un faible risque » remarque le Dr Destounis. « En effet, parmi ces diagnostics de jeunes femmes, 79% ne présentaient pas d’antécédents familiaux de cancer du sein et 24% étaient des femmes de moins de 40 ans ».
Des cancers particulièrement invasifs
Puis, en examinant plus précisément les caractéristiques tumorales de ces diagnostics, le Dr Destounis et son équipe se sont aperçues que plus de 80% des cancers détectés chez les moins de 50 ans étaient des cancers invasifs, c’est-à-dire pouvant se propager au-delà du sein, et 8,6 % étaient des cancers triple négatifs, une forme plus difficile à traiter car elle ne répond pas aux hormonothérapies classiques. En divisant en sous-groupes les 18-40 ans et les 40-50 ans, ils ont pu montrer que les tumeurs des 18-40 ans étaient de grade plus élevé (se propageant plus vite) que les 40-50 ans (86% contre 74%) et étaient plus résistantes (13% contre 8% de triple négatifs).
« Ce constat est frappant car il démontre que les femmes plus jeunes sont sujettes à une part stable et importante des cas de cancer du sein, mais également que leurs tumeurs sont souvent biologiquement agressives », analyse la radiologue. « Cette combinaison incidence constante-agressivité biologique élevée remet directement en question les seuils de dépistage basés sur l’âge et plaide en faveur d’un dépistage plus précoce et adapté aux facteurs de risque ».
Comment expliquer cette tendance?
« Bien sûr, ces chiffres élevés s’expliquent par une augmentation des diagnostics et une meilleure sensibilisation auprès du public. L’augmentation de l’incidence chez les femmes jeunes, quant à elle, s’explique probablement par un mélange de facteurs: hormones, génétique, régime alimentaire, consommation d’alcool, etc. », liste le Dr Destounis.
Une recommandation pour finir: « Discutez-en avec votre famille, renseignez-vous sur vos antécédents familiaux, vous ignorez peut-être certains de vos facteurs de risque. Examinez-vous et consultez un professionnel de la santé en cas de doute ! », conclut le docteur.





