Africa-Press – Cameroun. Dans une enquête révélant des conditions de travail alarmantes, Jeune Afrique met en lumière les pratiques dénoncées par quatre ONG au sein des Plantations du Haut-Penja. Des accusations graves qui remettent en question le modèle social des grandes plantations africaines.
C’est un tableau accablant que dresse Jeune Afrique à partir de la mise en demeure adressée à la Compagnie fruitière. Le magazine panafricain révèle en détail les accusations portées par Transparency International, Transparency International Cameroun, ActionAid France et Intérêt à agir contre le géant français de la banane. Au cœur des griefs: des conditions de travail qui mettraient en danger la vie des employés, en particulier au Cameroun.
Selon les informations exclusives obtenues par Jeune Afrique, les quatre ONG accusent l’entreprise de pratiques qui heurtent les standards internationaux du travail. Le magazine liste ces accusations une par une: des journées de travail dépassant les 12 heures, des salaires insuffisants, des licenciements abusifs, l’utilisation de pesticides dangereux, parfois interdits en Europe, et l’absence d’équipements de protection pour les travailleurs exposés à ces produits chimiques.
L’une des révélations les plus préoccupantes de Jeune Afrique concerne l’utilisation de pesticides dangereux dans les plantations camerounaises. Le magazine indique que certains de ces produits sont parfois interdits en Europe, une pratique qui soulève la question du double standard appliqué par les multinationales européennes selon leur lieu d’activité. Cette différence de traitement entre les travailleurs européens et africains constitue l’un des points les plus sensibles de la mise en demeure.
Jeune Afrique révèle également que cette exposition aux produits chimiques s’effectue dans des conditions de sécurité insuffisantes. L’absence d’équipements de protection adéquats pour les employés manipulant ces substances dangereuses transforme les plantations en zones à risque sanitaire. Ces pratiques, si elles sont avérées, pourraient exposer la Compagnie fruitière à de lourdes condamnations au titre de la responsabilité civile, le magazine rappelant que la loi française permet désormais de poursuivre les entreprises pour les dommages causés à leurs employés à l’étranger.
Jeune Afrique aborde également la question épineuse des rémunérations. Les ONG accusent la Compagnie fruitière de verser des salaires insuffisants à ses 6 000 à 7 000 employés camerounais, révèle le magazine. Cette accusation soulève un débat plus large sur le modèle économique des grandes plantations d’exportation en Afrique. Comment concilier la compétitivité internationale, nécessaire pour exporter 153 258 tonnes de bananes par an comme l’a fait PHP en 2024 selon les chiffres dévoilés par Jeune Afrique, avec des salaires décents pour les travailleurs?
Le magazine note que cette problématique s’inscrit dans un contexte plus large de pression sur les coûts dans le secteur agricole mondial. Les plantations africaines doivent rivaliser avec celles d’Amérique latine et d’Asie, souvent dans une course vers le bas en matière de coûts salariaux. Mais la loi française sur le devoir de vigilance, explique Jeune Afrique, vise précisément à briser cette logique en obligeant les entreprises françaises à garantir des standards minimums, quel que soit le pays où elles opèrent.
Les révélations de Jeune Afrique concernant la durée du travail sont également préoccupantes. Le magazine indique que les ONG accusent l’entreprise d’imposer à ses employés des journées dépassant les 12 heures. Une telle durée de travail, si elle est avérée, viole non seulement les conventions internationales du travail mais aussi probablement le Code du travail camerounais.
Ces longues journées, dans un contexte de manipulation de produits chimiques dangereux et sous le climat tropical de l’Ouest camerounais, posent des questions évidentes de santé et de sécurité au travail. Jeune Afrique souligne que la Compagnie fruitière assure avoir mis en place une politique interne pour répondre à ces problèmes. Mais selon le magazine, Transparency International et ses partenaires estiment que cette politique ne répond pas aux exigences de la loi française, qui impose aux entreprises de plus de 10 000 salariés de publier un plan de vigilance détaillé.
L’affaire révélée par Jeune Afrique dépasse largement le cas de la Compagnie fruitière. Elle interroge l’ensemble du modèle de l’agriculture d’exportation en Afrique, dominée par de grandes plantations souvent contrôlées par des capitaux étrangers. Le magazine rappelle que PHP est l’un des plus importants employeurs privés du Cameroun, ce qui confère à cette affaire une dimension économique et sociale majeure pour le pays.
Si les accusations détaillées par Jeune Afrique sont confirmées et conduisent à des condamnations, cela pourrait forcer une refonte complète du modèle social des grandes plantations africaines. Les trois mois dont dispose l’entreprise pour répondre à la mise en demeure, précise le magazine, seront déterminants non seulement pour son avenir juridique mais aussi pour l’évolution des pratiques de tout un secteur en Afrique.





