Suspension Unilatérale des Effets Juridiques Électoraux

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Suspension Unilatérale des Effets Juridiques Électoraux
Suspension Unilatérale des Effets Juridiques Électoraux

Africa-Press – CentrAfricaine. Dans les grandes démocraties à travers le monde, la notion d’élection politiquement sensible, techniquement complexe occupe une place importante et demeure le baromètre indispensable pour évaluer à sa juste valeur le caractère démocratique d’un régime politique donné.

L’élection par définition basique est un mode de désignation des gouvernants, des autorités pour représenter ou occuper une fonction au nom de leurs électeurs pour assurer la conduite des affaires publiques.

Cet état de fait est confirmé par l’article 21 alinéa 3 de la Déclaration universelle des droits de l’homme qui dispose que:”la volonté du peuple est le fondement de l’autorité des pouvoirs publics; cette volonté doit s’exprimer par des élections honnêtes qui doivent avoir lieu périodiquement, au suffrage universel égal et au vote secret ou suivant une procédure équivalente assurant la liberté de vote”.

La République centrafricaine en tant que nation reconnue au conseil de sécurité de l’ONU s’est inscrite véritablement dans cette logique depuis la conférence de la Baule qui a lancé un processus de démocratisation de l’Afrique sous peine de privation de soutiens ou d’aides.

Depuis 1993, la foire électorale est devenue cyclique, parfois émaillée de tensions politiques, de troubles et malheureusement de pertes en vies humaines.

Outre les élections municipales qui paraissent hypothétiques en terme d’effectivité, les élections nationales c’est-à-dire les législatives et présidentielles sont planifiées selon les délais constitutionnels en fin d’année 2025.

Au delà de ce chronogramme électoral, l’assemblée nationale est ainsi convoquée en première session ordinaire à presque un semestre du scrutin pour statuer sur un projet de loi initié par le gouvernement.

Il s’agit d’un projet de loi portant dérogation à certaines dispositions de la loi N*24.007 du 02 juillet 2024 portant code électoral exclusivement en ce qui concerne l’article 18.

En d’autres termes, les effets juridiques de l’article 18 du code électoral seront suspendus temporairement ou mis en veilleuse dans toutes ses dispositions pour les échéances électorales à venir.

En conséquence de ce qui précède, au lieu que le fichier électoral soit tamisé, purifié, actualisé et publié une année avant le scrutin, ce dernier demeurera flexible, extensible où on peut ajouter ou retirer des électeurs à volonté jusqu’au jour fatidique.

L’exposé des motifs du projet de loi soumis à l’examen de l’assemblée nationale met en relief le retard accusé dans l’organisation des opérations de révision du fichier électoral par l’organe chargé de gestion des opérations électorales.

L’exposé des motifs pointe également l’absence de financement des partenaires qui rend impossible l’organisation des élections dans le délai constitutionnel évitant ainsi une impasse politique, un vide institutionnel avec des conséquences politiques néfastes.

En guise d’éléments de réponse à la problématique qui fait l’objet de notre analyse, il est évident en principe que l’amendement ou la suspension de certaines dispositions du code électoral soit envisageable à quelques mois du scrutin mais cela doit être bien encadré.

Il apparaît important de rappeler que le respect du principe de sécurité juridique et de la stabilité électorale veut que le cadre juridique du processus électoral ne soit pas amendé ou suspendu à l’approche du scrutin à l’exception de quelques ajustements techniques mineurs ou des ajustements organisationnels c’est-à-dire qui n’ont pas d’impacts considérables sur l’issue du scrutin…ce qui n’est pas le cas en l’espèce.

En l’absence des cas de force majeure tels une catastrophe naturelle, une épidémie ou une crise sanitaire, une telle réforme doit se faire avec un large consensus politique de toutes les forces vives de la nation.

Si la suspension ou l’amendement des dispositions du code electoral modifie significativement les normes electorales, il y’a un risque elevé de crise de confiance, de crise post-electorale, un problème de légitimité démocratique, un problème de conformité avec la loi fondamentale, cela impactera également la confiance du peuple dans le processus électoral.

D’ailleurs, il faut souligner que tout tripatouillage de la loi électorale à quelques mois du scrutin donne l’impression de fraude, de manipulation surtout qu’il est notoire que les élections se gagnent sur la base du fichier électoral.

Cette manœuvre discréditoire du processus électoral rompt l’égalité des candidats devant la loi source de tensions politiques et sociales, de contestation juridique telle un recours contentieux en annulation du scrutin devant la Cour constitutionnelle pour irrégularités du processus diligenté par un ou plusieurs citoyens, un parti politique ou une Organisation Non Gouvernementale.

Fort de ce qui précède, le citoyen lambda s’interroge:

– Qu’est-ce qui justifie ce retard d’enrolement des électeurs alors que le président de l’ANE avait évoqué ce problème depuis 2019?

– Ce retard relève t-il d’un sabotage volontaire pour servir d’alibi?

– Si ce n’est pas le cas, pourquoi ce désir brutal de suspendre l’article 18 du code électoral qui bouleverse le jeu démocratique?

– À défaut d’une large concertation sur un sujet aussi sensible, peut-on parler d’un passage en force ou d’un projet d’hold-up électoral déguisé?

– Était-il nécessaire de bâcler les élections nationales avec des conséquences incommensurables juste pour être en adéquation avec le délai constitutionnel?

– A défaut de faire la manche aux partenaires, le pouvoir de Bangui ne peut-il pas organiser les élections avec des fonds propres confirmant ainsi la notion de souveraineté devenue un credo liturgique?

En tout état de cause, l’absence de transparence fragilise les institutions républicaines et impacte considérablement l’indépendance du processus électoral.

Nous rappelons in fine qu’il faut se méfier d’un peuple apeuré qui ne parle pas…car un problème ne peut résoudre un autre problème et qu’un problème peut aussi en cacher un autre.

L’expérience de l’Afrique sub-saharienne montre que le troisième mandat tue plus qu’un coup d’état militaire.

En déduction de ce qui précède, demandez à un citoyen lambda de faire le choix entre un troisième mandat et un coup d’état militaire…son choix sera simple et sans réflexion.

On ne répétera jamais assez ce credo devenu liturgique et nous exhorterons le nouveau souverain pontife qui prônait la paix dans sa première homélie papale de rappeler à ce pasteur devenu despote le caractère sacré du serment, de la parole donnée et le respect des textes établis.

Les chants des sirènes ne vous placeront jamais au dessus de la République.

Renoncer en échange d’une stabilité politique au projet mortifere de troisième mandat Monsieur le président et choisissez un dauphin avant qu’il ne soit trop tard et cela avec honneur au lieu d’abdiquer honteusement sous la pression populaire.

Au delà de tout, nous tenons à signaler qu’on ne récolte que ce qu’on a semé et qu’au final, les mêmes causes produisent toujours et toujours les mêmes effets…

Malheur à ceux où celles qui s’attendent paradoxalement à un résultat différent. Les fables du célèbre fabuliste français Jean de La Fontaine teintées d’allegories éducatives auront prévenu les autistes avant que le monde ne s’effondre tel que défini par le célèbre romancier nigerian Chinua Achébé.

Mais attention, ne le dites à personne…

Si on vous demande, ne dites surtout pas que c’est moi depuis Limassa.

Source: corbeaunews

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