alors que Touadéra sollicite l’Union européenne, Mokpem tire à boulets rouges sur Bruxelles

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alors que Touadéra sollicite l’Union européenne, Mokpem tire à boulets rouges sur Bruxelles
alors que Touadéra sollicite l’Union européenne, Mokpem tire à boulets rouges sur Bruxelles

Africa-Press – CentrAfricaine. La diplomatie centrafricaine affiche ses paradoxes avec une intensité inhabituelle. Deux mois après avoir sollicité l’appui financier de Bruxelles, le chef de l’État se trouve confronté aux déclarations incendiaires de son porte-parole contre l’Union européenne.

Albert Yaloke Mokpem a multiplié les attaques lors de sa conférence de presse la semaine dernière, dénonçant un “racisme judiciaire” européen et pointant les “deux poids, deux mesures” de Bruxelles. Ces sorties publiques sabotent directement les démarches présidentielles auprès des institutions européennes.

En juin dernier, Faustin-Archange Touadéra s’était rendu en Belgique pour plaider plusieurs dossiers stratégiques. Le financement du processus électoral, le programme de désarmement-démobilisation-réinsertion, des combattants rebelles de 3R et de l’UPC, ainsi qu’un projet de pont reliant Bangui à la République démocratique du Congo figuraient parmi les priorités présentées aux dirigeants européens.

Mais les décaissements tardent. Les conditions posées par l’Union européenne butent sur la présence russe. Bruxelles exige notamment que le processus de désarmement soit confié exclusivement à la MINUSCA, excluant de fait les mercenaires russes du groupe Wagner. Une ligne rouge que Bangui refuse de franchir.

Sur le terrain, les mercenaires russes intensifient leurs opérations. Ils devancent les casques bleus, procèdent aux désarmement des rebelles et limitent les mouvements des casques bleus de la Minusca. Cette montée en puissance complique les négociations avec les partenaires européens, qui conditionnent leur aide à un retrait progressif de ces forces dans des décisions politico-militaires.

“Il y a des Centrafricains qui sont en prison en Europe parce qu’ils ont commis des délits. Mais quand un Blanc commet un délit ici, il ne doivent pas passer devant la justice”, lance Mokpem. “La justice n’existe que chez les Blancs ? Parce que nous, nous sommes des Noirs, c’est arbitraire ?”

Le porte-parole vise particulièrement l’affaire Figueira : “Il y a des preuves contre lui. Il doit répondre devant la justice. On ne peut pas bloquer tout un appareil judiciaire juste pour ce dossier. C’est un crime”. Oui, un crime fabriqué de toutes pièces par les mercenaires russes. C’est pathétique pour un soi-disant porte-parole de la présidence d’un pays normal.

Cette rhétorique s’inscrit dans une stratégie politique plus large. Les analystes centrafricains y décèlent une “pédagogie pathétique “ appliquée aux partenaires internationaux. Le pouvoir alterne critiques virulentes et demandes de financement, espérant forcer la main de ses bailleurs.

“Ils traitent les Européens comme des enfants à discipliner avec la chicotte, tout en tendant la main pour recevoir leur argent”, observe un expert politique centrafricain. Cette méthode vise à créer une pression psychologique sur les donateurs, les poussant à céder par crainte d’une escalade verbale.

Pourtant, l’équation financière devient intenable. Les partenaires russes facturent leur présence jusqu’à 10 milliards de FCFA mensuels, tandis que les financements européens restent gelés, en tout cas pour le moment. Le Trésor public centrafricain peine à honorer les salaires militaires et les coûts électoraux sans appui extérieur.

Plusieurs officiels admettent en privé l’impasse budgétaire. Les recettes internes ne couvrent plus les dépenses courantes, encore moins les programmes d’envergure. Cette situation fragilise la position de négociation avec l’Union européenne, qui observe les difficultés financières du régime.

Loin d’assouplir sa position, la présidence maintient sa double stratégie. Touadéra cultive sa dépendance financière à l’égard de l’Occident tout en affichant son alignement politique sur Moscou. Un exercice d’équilibrisme qui expose publiquement les contradictions du pouvoir centrafricain.

Cette approche interroge sur sa viabilité à long terme. Comment solliciter l’aide européenne tout en attaquant frontalement les valeurs et les méthodes de l’Union européenne ? Comment maintenir des relations diplomatiques constructives avec Bruxelles tout en alimentant une rhétorique antioccidentale ?

Les prochains mois détermineront si cette stratégie du “bâton et de la carotte” inversée portera ses fruits ou isolera davantage Bangui de ses partenaires traditionnels. Pour l’heure, l’Union européenne maintient ses conditions, laissant le régime centrafricain face à ses propres contradictions.

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