Africa-Press – CentrAfricaine. Des professeurs d’université aux simples employés de l’État, tous subissent le même sort: refus de soins à l’étranger et silence administratif. Pendant ce temps, les proches du régime Touadéra s’offrent des évacuations sanitaires de luxe. Le Dr Hilaire Tchechoupard, mort au Cameroun le 30 juillet dernier, incarne cette politique cynique qui sacrifie les serviteurs de l’État.
Pour comprendre cette tragédie, il faut d’abord examiner l’état volontairement dégradé du système de santé national. Le gouvernement Touadéra entretient délibérément la déliquescence du système de santé centrafricain. Dans les hôpitaux publics, même les pathologies les plus évidentes sont niées. Des patients diabétiques ou hypertendus voient leurs diagnostics refusés malgré les résultats des machines. Les médecins, sous pression, déclarent que “il n’y a pas de tension, il n’y a pas de diabète” face à des malades aux séquelles visibles.
Cette politique du déni médical pousse les Centrafricains vers une seule solution: partir se soigner ailleurs. Mais cette porte de sortie reste fermée pour la majorité.
Devant cette situation désespérante, le pouvoir a organisé un système de tri social particulièrement pervers. Le régime a instauré un apartheid médical. D’un côté, les proches du pouvoir obtiennent leurs autorisations d’évacuation en quelques heures. De l’autre, les fonctionnaires ordinaires voient leurs demandes enterrées dans le silence bureaucratique.
Le Dr Hilaire Tchechoupard a vécu cette discrimination jusqu’à la mort. Ce sociologue, titulaire d’un doctorat canadien et enseignant-chercheur à l’Université de Bangui depuis 2004, avait demandé une simple autorisation pour se soigner au Cameroun. Ses démarches administratives ont duré des mois sans obtenir la moindre réponse.
Cette absence de réponse n’est pas un dysfonctionnement mais une stratégie délibérée du régime. “Tu fais la démarche un an, deux ans, tu es fatigué, tu es obligé de laisser, soit tu meurs”, explique un proche du défunt. Cette stratégie d’épuisement administratif fonctionne parfaitement. Les malades abandonnent leurs démarches ou meurent en attendant.
Le cas Tchechoupard montre parfaitement la méthode: aucun refus officiel qui pourrait être contesté, juste un silence qui tue. Pendant que ce professeur attendait une réponse qui ne viendrait jamais, son état se dégradait inexorablement.
Devant cette défaillance organisée de l’État, la population développe ses propres mécanismes de survie. Devant l’abandon de l’État, les collègues de l’Université de Bangui et la famille ont organisé une collecte pour financer le voyage médical du Dr Tchechoupard. Cette solidarité spontanée démontre l’échec total des institutions publiques.
Même le rapatriement du corps a nécessité une nouvelle mobilisation financière. L’État qui avait refusé de soigner le professeur vivant a également négligé sa dépouille. La famille a dû organiser et payer le transport terrestre de Douala à Bangui, un trajet de plus de 1 000 kilomètres.
La mort du professeur n’a pas empêché les autorités de venir récupérer politiquement sa disparition. Le 22 août 2025, lors des obsèques, le président de l’Assemblée nationale et d’autres dignitaires se sont déplacés pour honorer celui qu’ils avaient condamné. Cette récupération politique post-mortem choque les proches du défunt.
Ces responsables, qui n’avaient pas daigné répondre aux demandes de soins du Dr Tchechoupard, sont venus faire leurs salamalecs devant sa tombe. Une mise en scène obscène qui ne trompe personne sur leur responsabilité dans cette mort évitable.
Au-delà de ce cas dramatique, c’est tout un système mortifère qui se révèle. Le Dr Hilaire Tchechoupard n’est pas une victime d’exception de ce système. Des centaines de fonctionnaires centrafricains subissent le même sort chaque année. Leur crime: ne pas appartenir au cercle restreint du pouvoir.
Cette politique sanitaire discriminatoire du régime Touadéra transforme la maladie en sentence de mort pour les serviteurs ordinaires de l’État. Pendant que les dirigeants s’offrent des séjours médicaux dans les meilleures cliniques européennes, ils condamnent consciemment leurs compatriotes à mourir faute de soins. La disparition du Dr Tchechoupard restera comme le symbole de cette barbarie institutionnalisée qui déshumanise l’administration centrafricaine.
Source: Corbeau News Centrafrique
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