Félix Tshisekedi Se Prépare Pour 2028

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Félix Tshisekedi Se Prépare Pour 2028
Félix Tshisekedi Se Prépare Pour 2028

Africa-Press – Congo Kinshasa. Division de l’opposition, caporalisation de la majorité, dialogue national… Le président congolais tente de garder la main afin d’anticiper tous les scénarios de la prochaine présidentielle fixée en 2028.

À trois longues années des élections générales de 2028, le sujet est loin d’être la première des préoccupations des Congolais. Crise sécuritaire et humanitaire à l’Est, record du nombre de déplacés, accès défaillant à l’eau à l’électricité, à la santé… Les Congolais, qui vivent à 73% en dessous du seuil de pauvreté, se soucient davantage des difficultés du quotidien que du prochain rendez-vous électoral. Pourtant, depuis plusieurs mois, les grandes manoeuvres ont déjà commencé dans le camp présidentiel. Objectif: parer à tous les scénarios possibles dans un contexte sécuritaire des plus incertains. La guerre dans les Kivus contre l’AFC/M23, soutenue par le Rwanda, a rebattu les cartes depuis la prise de contrôle des deux principales villes de l’Est congolais par la rébellion. Si des négociations de paix sont en cours à Washington et Doha, il n’est pas certain que ces territoires administrés par les rebelles permettent la tenue d’élections. En 2023, certaines régions du Nord-Kivu n’avaient pas pu participer au scrutin. Pour 2028, le principal scénario, conforme à la Constitution congolaise, prévoit des élections sans Félix Tshisekedi, mais beaucoup soupçonne l’actuel président de vouloir se maintenir au pouvoir au-delà de son dernier mandat.

Glissement ou révision constitutionnelle?

La guerre à l’Est pourrait effectivement être une occasion pour Félix Tshisekedi de faire glisser le calendrier électoral, comme son prédécesseur Joseph Kabila en 2016, et de s’offrir plusieurs mois supplémentaires dans le fauteuil présidentiel. Dans l’opposition, on soupçonne également Félix Tshisekedi de vouloir réviser la Constitution pour pouvoir briguer un troisième mandat. Ces deux scénarios du maintien coûte que coûte au pouvoir du président congolais nécessite un minimum d’anticipation. Pour le premier, il faut pouvoir s’assurer d’avoir une opposition et une société civile « malléable » et « coopérative » dans un possible dialogue national qui validerait le glissement. Pour le second scénario, Félix Tshisekedi doit pouvoir compter sur la mansuétude des deux chambres pour accepter une modification la Constitution, ce qui implique un contrôle total de sa majorité.

Exclure la galaxie Kabila d’un possible dialogue

Pour garder la situation sous contrôle et s’assurer son maintien à la présidence, Félix Tshisekedi a décidé de frapper fort. Premier objectif, placer hors-jeu la galaxie kabiliste, en cas de dialogue national. Après la condamnation à la peine de mort de l’ancien président, l’ensemble des partis politiques qui ont assisté à la création de sa plateforme politique à Nairobi ont été suspendus et sont en attente de dissolution. Parmi ces formations politiques, il y a le PPRD de Joseph Kabila, mais aussi le LGD de l’expremier ministre Matata Ponyo, la Piste pour l’Emergence de Seth Kikuni, l’UDA de Claudel André Lubaya, le MPCR de Jean-Claude Vuemba, l’ATD de José Makili ou le MLP de Franck Diongo. Au total, 12 partis politiques d’opposition, dont la majorité des leaders sont en exil, sont désormais suspendus et donc marginalisés de fait par Kinshasa de toute négociation politique ultérieure.

L’obstacle Kamerhe levé

Il y a ensuite le projet de révision de la Constitution pour autoriser un troisième mandat à Félix Tshisekedi, mis entre parenthèses avec le retour du M23, mais opportunément relancé par Adolphe Muzito en octobre dernier dans une interview à Jeune Afrique. Le principal obstacle au projet se trouvait au perchoir de l’Assemblée nationale.

Vital Kamerhe, pourtant allié politique de Félix Tshisekedi, n’a jamais caché ses ambitions présidentielles, et sa présence à la présidence de la chambre basse risquait de bloquer tout projet de modification de la loi fondamentale. En septembre, une motion de défiance a été déposée contre Vital Kamerhe, qui s’est vu contraint de démissionner avant le vote pour s’éviter une seconde humiliation après sa mise en détention dans le cadre du procès des « 100 jours » en 2021. Un proche de Kamerhe, Aimé Boji, a reçu le feu vert présidentiel pour succéder au patron de l’UNC, avec l’assentiment de l’Union sacrée, la plateforme majoritaire. L’Assemblée est désormais en ordre de marche pour une possible bataille constitutionnelle.

Fayulu et Katumbi chouchoutés

Choisir ses interlocuteurs en cas de dialogue national et caporaliser sa majorité au Parlement peuvent permettre à Félix Tshisekedi de s’assurer une rallonge dans le fauteuil présidentiel. Pour rendre un possible dialogue national crédible, et éviter des négociations à sens unique composées uniquement de membres de sa majorité et d’une société civile acquise à sa cause, Félix Tshisekedi devra s’attacher les bonnes grâces d’opposants de premier plan. On pense bien sûr à Martin Fayulu, qui s’était montré disponible en juin dernier à la « main tendue » de Félix Tshisekedi, avant de fixer ses conditions strictes d’un dialogue sous l’égide des Églises catholique et protestante. Conditions qui sont encore loin d’être la tasse de thé du chef de l’Etat.

Enfin, il y a Moïse Katumbi, qui a su garder ses distances avec Joseph Kabila et qui pourrait entrer prochainement dans la danse. Le poste de rapporteur adjoint a été attribué à Clotilde Mutita, d’Ensemble pour la République, le parti de l’ancien gouverneur du Katanga. De quoi mettre un peu d’huile dans les rouages.

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