Africa-Press – Congo Kinshasa. Les Églises catholique et protestante estiment qu’un dialogue national inclusif ne saurait se tenir sans la participation de Joseph Kabila, ancien président de la République. « De notre point de vue, on ne trouvera pas une paix durable sans un dialogue inclusif », a tranché Monseigneur Donatien Nshole sur RFI, interrogé sur l’éventualité que le sénateur à vie soit absent de la future concertation nationale, en raison de sa condamnation à mort pour collusion avec la rébellion de l’AFC/M23.
La position exprimée par le secrétaire général de la Conférence épiscopale nationale du Congo (CENCO) laisse entendre qu’un tel scénario se déroulerait sans un acteur jugé incontournable. Selon lui, cela compromettrait la recherche d’une solution durable à la guerre dans l’est du pays.
C’est au nom de cette inclusivité que le révérend Éric Senga, au cours de la même interview, a affirmé que les Églises n’approuvent pas la condamnation à mort de Joseph Kabila. À ses yeux, cette décision fait partie des éléments qui compliquent le processus de réconciliation. « Nous, en tant qu’Eglise, dans notre approche de ce dialogue ou de ce Pacte social, nous souhaitons encore davantage consolider l’unité nationale. Et tout ce qui va dans l’essence de crisper davantage la situation ou de mettre en difficulté le processus de réconciliation nationale ne peut pas être soutenu par les Églises, d’autant plus qu’elles promeuvent l’unité nationale », a précisé le secrétaire général de l’Église du Christ au Congo (ECC), répondant à la question concernant le jugement prononcé contre l’ex-chef de l’État.
S’agissant des accusations de trahison visant la CENCO et l’ECC après leur visite à Goma en février pour rencontrer Corneille Nangaa, coordonnateur de la rébellion AFC/M23, Mgr Nshole les balaie d’un revers de main. Il estime que ces critiques ne sauraient expliquer l’hésitation actuelle de Félix Tshisekedi à convoquer le dialogue. A en croire l’homme de Dieu, le fait que le gouvernement ait fini par discuter avec le même groupe armé (avec qui ils ont déjà signé deux accords préliminaires) démontre que les religieux ne s’étaient pas trompés. « Si c’était ça la raison, maintenant, les choses ont évolué. Je crois qu’il a compris parce que finalement, c’est le gouvernement qui discute avec lui. Nous sommes allés justement dire à Corneille Nangar, écoutez, la solution n’est pas dans les armes, mais c’est dans les dialogues », a-t-il éclairé.
L’heure n’est plus aux condamnations
Par ailleurs, Donatien Nshole n’encourage pas les propos du chef de l’État tenus en octobre, à Bruxelles, lorsqu’il avait dénoncé une prétendue « manipulation » autour de l’appel au dialogue. Le membre de l’épiscopat congolais considère que l’heure n’est plus aux reproches mais à la recherche des solutions.
« Bon, je n’ai pas très bien compris ce qu’il voulait dire parce que je considère aussi le fait que le gouvernement était en même temps en train de dialoguer avec ceux-là qui condamnent. Ce n’est plus le moment de condamner, c’est le moment de mettre les gens ensemble pour trouver une solution », juge-t-il.
Et pourquoi les religieux n’abandonnent-ils pas, malgré des efforts que le chef de l’État continue d’ignorer? Éric Senga explique qu’il était nécessaire de vider tous les prétextes. « Pour nous, c’était important de vider tous ces prétextes. Si le président de la République pense qu’il dispose des préalables pour lui, à avoir un dialogue convenable, il faut les considérer comme tels. Notre boulot, justement, c’est à ce niveau, de voir comment concilier les préalables des uns et des autres », raconte-t-il. D’après le pasteur, l’objectif est de dégager un cadre beaucoup plus consensuel avant l’organisation du dialogue.
La thèse de ces deux confessions religieuses est renforcée par la démarche du patriarche Joseph Olenghankoy qui craint que la paix ne se limite qu’à l’aspect « militaire », qui ne concernerait que les armées. Et pourtant, at-il rappelé dans sa dernière communication, une telle question n’est pas de nature à répondre aux réalités de la crise multiforme dont fait face la RDC. D’après le président du CNSA, « la vraie paix devra également concerner les aspects politiques et de gouvernance sur l’ensemble du pays ».
Fort de son expérience politique, le leader des FONUS a laissé entendre que ces questions « non militaires » devraient faire l’objet d’une concertation nationale qui impliquerait toutes les composantes (majorité, opposition et société civile). En clair, a-t-il conclu, Doha (là où l’exécutif congolais négocie avec le groupe armé AFC/M23) n’est pas approprié pour des sujets qui touchent à la vie politico-institutionnelle.





