Coupe d’Afrique: à l’ouest séparatiste du Cameroun, “ambiance de fête, contexte de guerre” – photos

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Africa-Press – Congo Kinshasa. Déchiré depuis 2017 par un violent conflit, la région du sud-ouest anglophone accueille également les matchs de la Coupe d’Afrique des Nations de football (CAN). Alors que les séparatistes ont promis de perturber la compétition, le dispositif sécuritaire y est à son maximum et la ville de Limbé, qui abrite les rencontres, sur le pied de guerre.

Tout au long des 70 km de la route sinueuse qui sépare Douala et Limbé, petite ville balnéaire du sud-ouest séparatiste du Cameroun, le dispositif sécuritaire est impressionnant ce 20 janvier. Armes au poing, visage cagoulé, des centaines de soldats du bataillon d’intervention rapide (BIR), force d’élite camerounaise, répartis en petits groupes, sont visibles dans les palmerais qui parsèment le bord de cet axe routier aux multiples barrages. De nombreux convois militaires, équipés d’armes sophistiquées, défilent à toute vitesse.

Au fur et à mesure que l’on se rapproche de la ville de Limbé, où se jouent principalement les matchs du groupe F de la Coupe d’Afrique des Nations (édition de 2021 reportée), le dispositif est renforcé. Outre quelques affiches annonçant les couleurs de la compétition, ce qui retient d’emblée l’attention du visiteur, ce sont ces militaires qui montent la garde tous les 100 mètres environ, et qui donnent à cette localité, jadis paisible, un décor digne d’un film de guerre hollywoodien: “Chaque jour de match, c’est ainsi depuis le début de la compétition. Nous nous habituons à leur présence”, lance au micro de Sputnik l’employé d’une station-service à l’entrée de Limbé.

En effet, Limbé est située dans le sud-ouest, l’une des deux régions anglophones du Cameroun (avec le nord-ouest) plongées depuis 2017 dans un violent conflit qui oppose l’armée régulière aux groupes séparatistes. Une guerre qui a déjà fait plus de 6.000 morts et contraint des centaines de milliers de personnes à quitter leur domicile.

“La CAN ne m’intéresse pas vraiment”

Si la ville n’a pas jusqu’ici fait l’objet d’attaques d’envergure depuis le début de ce conflit,-contrairement à Buea, chef-lieu de la région,- les groupes armés avaient annoncé leur intention de perturber le déroulement de la compétition. Pour taire les inquiétudes, Yaoundé a entrepris le déploiement de soldats supplémentaires dans les régions anglophones. Ce 20 janvier, jour de matchs (Sierra Leone- Guinée Equatoriale (0-1) et Gambie-Tunisie (1-0)), le dispositif a été renforcé et les populations vaquent à leurs occupations au milieu de ce cordon sécuritaire. Plus loin du centre-ville, au lieu-dit Down beach, au bord de la mer, de nombreux pêcheurs comme Jerry T, vérifient et réparent leur équipement, s’apprêtant à rejoindre la mer.

Sur les terrasses de commerce aménagées au bord de l’eau, Alex D, ressortissant de la partie francophone du pays, et qui vit dans la localité depuis 20 ans, arbore fièrement un maillot des Lions indomptables. Ce fan de foot, détenteur d’un débit de boisson dans le coin, vit la CAN à sa manière.

“Je ne peux pas risquer ma vie pour le foot”

Cependant, certains comme John P, consommateur installé dans l’un des bars du coin, craignent pour leur vie. Le quinquagénaire prend très au sérieux les menaces séparatistes: “je ne peux pas risquer ma vie pour le foot”.

Le 12 janvier, trois jours après le début de la compétition, des tirs entre militaires et des hommes armés ont fait des blessés, selon des sources locales, dans la ville de Buea où se trouve un terrain d’entraînement des équipes. Un incident qui n’a cependant pas perturbé le déroulement de la compétition dans la région, laquelle a fait l’objet de nombreuses attaques à la bombe depuis la fin d’année 2021.

Ce jeudi, jour de rencontres de la troisième et dernière journée des matchs de poule, c’est sous bonne escorte que les cortèges des équipes nationales traversent l’axe qui mène au stade. À deux heures de la première confrontation Sierra Léone- Guinée Equatoriale, des dizaines de supporters locaux et étrangers font progressivement leur arrivée au stade omnisport de Limbé. Une arène, elle aussi hyper sécurisée où des centaines de membres des forces de maintien de l’ordre ont érigé des barrières de contrôle tout le long de la voie d’accès. Ici il faut montrer patte blanche, entre dispositif sanitaire et sécuritaire avant de franchir les portes. Des supporters comme Meizaya, artiste amateur, rencontré aux abords du stade, veulent malgré tout savourer la compétition, loin de la psychose du conflit qui dure depuis bientôt cinq ans.

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