M23 en RDC : le discret lobbying de Macron en faveur du déploiement kényan

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M23 en RDC : le discret lobbying de Macron en faveur du déploiement kényan
M23 en RDC : le discret lobbying de Macron en faveur du déploiement kényan

Africa-Press – Congo Kinshasa. Après avoir tergiversé sur son implication au sein du processus de Nairobi, impulsé par son prédécesseur Uhuru Kenyatta, William Ruto a obtenu le 10 novembre l’approbation par le parlement kényan du déploiement de 903 soldats au sein de la force régionale de l’East African Community (EACRF). À ce stade, quelque 200 militaires kényans ont déjà pris leurs quartiers à Goma, où est situé le siège de l’EACRF. En visite à Kinshasa les 20 et 21 novembre, le président kényan a réitéré, à l’issue de son entretien avec Félix Tshisekedi, son engagement à poursuivre ce déploiement. Même si des doutes demeurent concernant le financement des opérations.

Selon les statuts de la force, les pays sont censés financer eux-mêmes l’intervention de leurs contingents. Le budget actuellement prévu par le ministère kényan de la Défense est évalué autour de 37 millions d’euros pour les six premiers mois, et pourrait dépasser les 50 millions sur un an si l’opération venait à être prolongée. Ce montant fait grincer des dents au Kenya, déjà engagé depuis plusieurs années au sein de l’Amisom, la mission de maintien de la paix de l’Union africaine en Somalie. Selon plusieurs sources diplomatiques européennes, la France s’active en coulisses pour organiser un soutien financier au déploiement kényan au sein de la force régionale.

Sur la table au G7, puis à Bruxelles

Depuis l’investiture de William Ruto, Emmanuel Macron a échangé à deux reprises par téléphone avec son nouvel homologue, une première fois début octobre et une deuxième fois le 1er novembre. C’est à l’occasion de ce dernier appel que le président français, qui souhaite encourager l’implication kényane au sein du processus de Nairobi, s’est engagé à essayer de mobiliser un soutien financier européen. Si William Ruto lui a répondu qu’un tel appui n’était pas nécessaire à court terme pour la première partie de l’intervention, il a manifesté son intérêt dans le cas où l’opération se prolongeait. Le mandat de la force régionale est de six mois renouvelables.

Le sujet a de nouveau été abordé lors de la réunion des ministres des Affaires étrangères du G7, qui s’est tenue les 3 et 4 novembre à Münster, en Allemagne. Catherine Colonna, cheffe de la diplomatie française, a évoqué cette question avec son homologue kényan, Alfred Mutua et Josep Borrell, haut représentant de l’Union européenne pour les Affaires étrangères. Dans la foulée, le dossier a également été mis sur la table à Bruxelles : l’Union européenne (UE) devra in fine trancher sur la faisabilité d’un tel projet car le mécanisme envisagé est celui de la Facilité européenne de paix (FEP).

Mis en place en mars 2021, ce dernier permet de financer divers aspects du soutien militaire à un pays tiers, y compris des armes létales. Il faudra toutefois convaincre les autres pays membres de l’UE, sachant que l’écrasante majorité des fonds du FEP sont aujourd’hui destinés à l’Ukraine, et que d’autres projets sont également discutés. Aucune demande formelle n’a, pour le moment, été déposée par la partie kényane. Le montant de cette éventuelle enveloppe n’a donc pas encore été établi. Du côté de l’Elysée, on assure que les États-Unis ont eux aussi fait part de leur disponibilité pour contribuer au financement de ce déploiement.

Alors que les troupes kényanes sont censées intervenir dans les zones actuellement occupées par le M23 – que Kinshasa estime soutenu par le Rwanda -, un flou subsiste sur la stratégie qui sera adoptée par cette force régionale face aux rebelles. Le 21 novembre, lors d’une conférence de presse, William Ruto a affirmé que la mission de l’EACRF était « d’assurer la paix dans l’est de la RDC et d’imposer la paix à ceux qui veulent à tout prix créer de l’instabilité et de l’insécurité ». Le 16 juin, lors de sa première allocution, le général kényan Jeff Nyagah, commandant de cette force régionale, avait pourtant affirmé que la priorité était pour l’instant donnée au processus politique, c’est-à-dire aux médiations de Luanda et de Nairobi.

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