Procès Lumbala: Audiences sur violences et pillages

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Procès Lumbala: Audiences sur violences et pillages
Procès Lumbala: Audiences sur violences et pillages

Africa-Press – Congo Kinshasa. La troisième semaine du procès de Roger Lumbala, ouverte à Paris, a été consacrée aux premiers témoignages individuels des parties civiles. Durant cinq jours, du 24 au 28 novembre, le tribunal a entendu une série de récits qui décrivent l’emprise du RCD-N sur plusieurs localités de la Tshopo et de l’Ituri entre 2002 et 2003, ainsi que les violences massives attribuées aux troupes alliées à Lumbala. L’ancien chef rebelle et sa défense ne se sont pas présentés aux audiences de la semaine.

La neuvième journée s’est ouverte sur l’audition d’un ancien agent de renseignement du RCD-N. Il a décrit l’origine du RCD-N et souligné « l’influence exercée par l’Ouganda dans la transmission des ordres ». Selon lui, Roger Lumbala participait aux échanges stratégiques avec d’autres responsables militaires, dont Jean-Pierre Bemba et les généraux Amuli puis Ndima. Le témoin a également expliqué que « le pillage constituait un mode de rémunération des troupes stationnées à Isiro ».

La parole a ensuite été donnée à C.M., ex-chef de secteur, qui a retracé l’installation progressive du RCD-N dans sa localité, appuyée par les UPDF. Il a décrit « la prise de contrôle de l’exploitation de diamants », les exécutions sommaires attribuées à un général ougandais, les disparitions liées aux conflits autour du commerce minier, et les tortures qu’il dit avoir subies dans une fosse appelée Mabusu. Il a affirmé avoir été menacé avant son témoignage par des membres fondateurs du RCD-N.

Un autre témoin, D.U., entendu le même jour, vit aujourd’hui sous protection. Il a raconté les sévices subis alors qu’il était adolescent, évoquant « une blessure par balle après avoir été forcé de guider des militaires » vers une mine de diamants. Il a assuré avoir vu « plusieurs exécutions publiques en présence de Lumbala ».

Le dixième jour, l’ancien pasteur D.N. a décrit « le système de taxation arbitraire mis en place par Lumbala et imposé par la force ». Il a affirmé que son frère avait été tué et qu’il avait lui-même été détenu et torturé. Il a aussi alerté la Cour sur les menaces auxquelles il reste exposé en raison de son témoignage.

Le témoin B.A. a ensuite raconté avoir été passé à tabac et dépouillé de diamants pour avoir tenté de contourner le comptoir contrôlé par les troupes de Lumbala. Selon lui, ce dernier « contrôlait totalement la ville avec l’appui de soldats ougandais et de combattants fournis par Jean-Pierre Bemba ».

Le représentant de PAP-RDC, D.D., a présenté l’action de son organisation, rappelant ses trois piliers, juridique, psychologique et médical, et fait part de ses craintes face à la médiatisation importante du procès.

Le Président de la Cour a ensuite lu plusieurs déclarations établissant la prise d’Isiro par le RCD-N en 2002, l’instauration d’un système de taxation, ainsi que des exécutions publiques, « mutilations » et « persécutions visant les Nande ». Les documents décrivaient également l’arrivée de renforts du MLC.

La onzième journée a été marquée par les témoignages relatifs à l’opération « Effacer le tableau ». P.Y., chef traditionnel Bambuti, a décrit des attaques contre sa communauté et rapporté que sa sœur enceinte avait été « violée collectivement » avant de succomber à ses blessures. Il a dénoncé les pillages et la destruction d’objets traditionnels.

Un autre témoin, A.M., a expliqué avoir été contraint de travailler pour les troupes de Lumbala à Epulu, assurant qu’il avait été « battu jusqu’à perdre connaissance ». Une partie civile entendue à huis clos a évoqué les violences sexuelles subies et exprimé l’espoir que son récit « empêche la répétition de crimes similaires ».

La partie civile W.M. a rapporté les pillages d’Epulu fin 2002, la réquisition de jeunes porteurs et la saisie de ses biens. Elle a affirmé avoir reçu des menaces et a « réfuté fermement les accusations de subornation » visant les ONG qui l’accompagnent.

La douzième journée a porté sur les attaques d’Epulu. M.O. a relaté l’enlèvement de femmes, le transport forcé de munitions, les coups de fouet, ainsi que le meurtre de son frère lors de la seconde attaque. Il a décrit deux visites de Roger Lumbala, l’une « pour livrer des munitions par hélicoptère », l’autre pour tenir un meeting public.

V.R., entendue ensuite, a dit avoir fui à plusieurs reprises les troupes engagées dans l’opération et a raconté l’assassinat de son père, le pasteur R. Elle a affirmé avoir reçu des menaces après son déplacement en France.

Le témoin K.K., de Butiaba, a décrit l’arrivée de « près de 2 000 soldats » dans son village. Il a expliqué que les biens pillés avaient été évacués « à trois reprises par hélicoptère ».

Lumbala, dans ses déclarations lues en fin d’audience, a nié tout rôle direct dans les exactions, affirmant que « le contrôle des troupes relevait de Jean-Pierre Bemba » et qu’il n’était pas présent lors des opérations.

La dernière journée s’est tenue en l’absence de l’accusé. Trois parties civiles ont été entendues à huis clos au sujet des violences sexuelles commises à Epulu. Elles ont détaillé les conséquences « physiques, psychologiques et socio-économiques » qui perdurent encore aujourd’hui.

La Cour a ensuite procédé à la lecture de plusieurs articles de presse et extraits radiophoniques contemporains des faits, montrant que le RCD-N était systématiquement présenté comme un groupe armé dans les médias de l’époque.

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