Africa-Press – Djibouti. « Bientôt, nous dirons adieu à la marque Twitter et, progressivement, à tous les oiseaux », a annoncé Elon Musk, le 23 juillet, sur ce même réseau social. Après avoir racheté Twitter en octobre 2022 pour 44 milliards de dollars, le multimilliardaire ne cachait pas ses ambitions de couper les ailes de l’oiseau bleu créé il y a 17 ans pour le transformer radicalement.
Connu sous le nom de « Projet X », ce plan n’est donc pas une surprise puisque le fondateur de Tesla l’évoque depuis plusieurs mois. Il avait d’ailleurs déjà remplacé le nom de la structure propriétaire de Twitter, Twitter Inc, par X Corp, en avril dernier. Aujourd’hui, l’URL « x.com » renvoie déjà à la page d’accueil de Twitter.
Voici les trois choses à savoir sur les contours de cette métamorphose.
Si, à court terme, X ne devrait remplacer que le nom et l’identité visuelle du Twitter que nous connaissons aujourd’hui, c’est un gros chantier qui se profile au long cours pour le réseau social. Elon Musk veut en effet transformer l’oiseau bleu en une application tout-en-un, avec une multitude de services centralisés en une interface.
Il ne s’en cachait déjà pas le 5 octobre 2022, en tweetant : « L’achat de Twitter est un accélérateur pour la création de X, l’application de tout. » L’idée ? Créer une « superapplication » sur le modèle chinois de WeChat qui permettrait de concentrer un service de messagerie instantané, un système de paiement, et beaucoup d’autres services qui n’ont pas encore été détaillés, pour devenir un incontournable dans le quotidien de ses utilisateurs.
Si l’on sait encore peu de choses sur le périmètre précis des services et des modalités d’utilisation pour les internautes – notamment sur son prix et son modèle financier –, Elon Musk avait dessiné les grandes lignes de son projet en juin 2022, lors de son premier échange avec les salariés de Twitter. « Pourquoi il n’y a pas plus de gens qui utilisent Twitter ? Et pourquoi les gens se détournent de Twitter ? Si nous pouvons satisfaire ces raisons, alors ils utiliseront davantage Twitter, et ils obtiendront plus de choses du service, arguait-il alors. Et, vous savez, si je pense à WeChat en Chine, qui est en fait une super, superapplication, il n’y a pas de WeChat en dehors de la Chine. Je pense qu’il y a une réelle opportunité de créer cela. En Chine, vous vivez essentiellement sur WeChat, parce que c’est très utile dans votre vie quotidienne. Si nous pouvions réaliser cela, ou même nous en approcher avec Twitter, ce serait un immense succès. »
Simple application de messagerie instantanée au départ, l’application chinoise développée par Tencent est devenue un système embarquant un système de paiement, de vidéoconférence, de jeux vidéo, de partage de photos et de vidéos entre amis et même de commande de nourriture. Un modèle que le patron de SpaceX aux ambitions débordantes veut dupliquer.
Sans donner beaucoup plus de détails, Linda Yaccarino, la nouvelle directrice de Twitter, a publié un message décrivant X comme « le futur État de l’interactivité illimitée – centré sur l’audio, la vidéo, la messagerie, les paiements/banques – et créant un marché mondial pour les idées, les biens, les services et les opportunités »… Tout cela dopé par l’intelligence artificielle.
Si la mention à la lettre X vous rappelle quelque chose au sujet du fondateur de Tesla, c’est normal. Il en saupoudre un petit peu tous ses projets. En 1999, il lançait déjà sa start-up X, une banque en ligne. L’entreprise a finalement été intégrée à PayPal, mastodonte cocréé par le multimilliardaire, mais Elon Musk a repris le nom de domaine « x.com »… en 2017, selon Numerama. Il remerciait à l’époque sur Twitter PayPal pour ce rachat de nom en précisant : « Rien n’est prévu pour l’instant, mais il a une grande valeur sentimentale pour moi. »
Not sure what subtle clues gave it way, but I like the letter X pic.twitter.com/nwB2tEfLr8
Et le X est vraiment partout dans la vie de l’homme d’affaires. En commençant par le nom d’un de ses fils, X Æ A-12, X pour les intimes. Son entreprise spécialisée dans l’aérospatiale, fondée en 2002, s’appelle SpaceX. Chez Tesla, constructeur automobile de véhicules électriques qu’il a fondé, la voiture la plus luxueuse est le Model X.
Pour le nouveau Twitter, le gros des discussions tourne aujourd’hui autour du logo et de la nouvelle identité visuelle du réseau social. Elon Musk voulait un X « Art déco » et noir. Ce dernier a déjà remplacé l’oiseau bleu en haut à gauche de la page.
La révolution est en marche, et Linda Yaccarino, la PDG de l’entreprise, a de son côté publié ce lundi matin une photo du nouveau logo projeté sur le siège de Twitter, à San Francisco.
Ce changement radical intervient en pleine période de turbulences pour Twitter. Depuis son rachat par Elon Musk, l’entreprise américaine a perdu plus de la moitié de ses revenus publicitaires, a admis le serial entrepreneur. En moins d’un an, ce dernier a aussi engagé plusieurs vagues de licenciements. Résultat : moins de 2 000 personnes travaillent aujourd’hui pour le réseau social, contre quelque 7 500 salariés avant le rachat.
Autre ombre au tableau : l’arrivée d’autres acteurs de taille desquels il va falloir se distinguer. « Il y a de nombreux concurrents que Twitter devra combattre », expliquait Sinan Aral, professeur de gestion au Massachusetts Institute of Technology (MIT), à ABCNews.
Parmi eux, Threads, le plus sérieux d’entre eux. Cette application a été lancée par Meta, la maison mère de Facebook, pour proposer un service concurrent à Twitter. Connectée à Instagram, l’application permet de poster, comme sur Twitter, des textes courts (500 caractères au maximum), y intégrer des photos, des vidéos et des liens externes. Ils peuvent aussi faire l’équivalent d’un « retweet », c’est-à-dire republier les contenus d’autres internautes. Sur leur fil, les utilisateurs voient les actualités de celles et ceux qu’ils suivent, mais aussi des contenus recommandés pour eux par des algorithmes.
Le succès a été immédiat. Si l’application n’est pas autorisée en Europe à cause d’une non-conformité à la réglementation autour de la protection des données, elle est déjà plébiscitée par la chanteuse Shakira ou encore la star de la NBA Seth Curry, et a franchi la barre des 100 millions d’utilisateurs quatre jours seulement après son lancement, le 6 juillet.
Une victoire à relativiser puisque l’entreprise de marketing Similarweb vient de révéler que le nombre d’utilisateurs actifs a été divisé par deux, passant de 49 à 23 millions entre le 7 et le 14 juillet, et que leur engagement a chuté de 21 à 6 minutes par jour aux États-Unis.
Alors est-ce que Threads deviendra l’asile d’une partie des 368 millions d’utilisateurs actifs mensuels de Twitter, furieux de se voir privés du réseau social d’origine ? Ou est-ce le moment pour X de se distinguer pour de bon de ce nouveau concurrent ? C’est en tout cas une nouvelle illustration du rapport de force qui sévit entre Elon Musk et Mark Zuckerberg, qui affirment, en riant, être prêts à enfiler les gants et s’affronter dans une cage pour savoir qui sera le plus grand géant de la tech.
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