Le Lanaa Sentinelle Invisible de Nos Assiettes

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Le Lanaa Sentinelle Invisible de Nos Assiettes
Le Lanaa Sentinelle Invisible de Nos Assiettes

Africa-Press – Djibouti. À Djibouti, derrière chaque plat dégusté en toute confiance se cache une sentinelle invisible: le Laboratoire National d’Analyses Alimentaires (LANAA). Discret mais essentiel, il veille sur la qualité des aliments importés comme locaux, traquant bactéries, résidus et fraudes. À travers ses analyses pointues, ses inspections et ses formations, ce rempart scientifique protège la santé publique, garantit la confiance des consommateurs et prépare l’avenir alimentaire du pays.

Peu de citoyens connaissent son nom, et pourtant, son empreinte est partout, jusque dans la plus humble de nos bouchées. Le Laboratoire National d’Analyses Alimentaires de Djibouti (LANAA) ne se pavane pas sous les projecteurs ; il œuvre dans l’ombre, tel un gardien discret mais intraitable, pour que chaque repas demeure un acte de confiance et non de hasard.

L’histoire de LANAA s’inscrit dans une démarche volontariste des autorités djiboutiennes de se doter d’outils modernes de contrôle sanitaire. Né de la loi n° 48/AN/09/6ème L, cet établissement public répond à une nécessité devenue criante avec l’intensification des échanges commerciaux et la diversification des sources d’approvisionnement alimentaire. Sa création a marqué un tournant dans l’approche djiboutienne de la sécurité alimentaire, passant d’une logique réactive à une stratégie proactive de prévention des risques.

Derrière les gestes les plus anodins saisir un yaourt dans la blancheur aseptisée d’un supermarché, marchander un poisson frais sur l’étal animé d’un marché, commander un plat de volaille dans un restaurant – se cache une vigilance constante. Invisible, certes, mais essentielle. Au sommet de cette chaîne de contrôle, en ultime rempart contre le péril sanitaire, se dresse le LANAA, vigie scientifique au service de la santé publique.

L’évolution du laboratoire reflète celle du pays lui-même. D’une structure modeste à ses débuts, le LANAA s’est progressivement transformé en un centre d’excellence technique, capable de rivaliser avec les meilleurs laboratoires de la région. Cette montée en puissance s’est accompagnée d’une professionnalisation croissante de ses équipes et d’une modernisation constante de ses équipements.

Un arsenal scientifique au service de la Santé Publique

Il veille à la salubrité des aliments, qu’ils soient importés ou produits localement. Ses armes? Des analyses microbiologiques et physico-chimiques menées avec une régularité et une rigueur exemplaire. Derrière la façade sobre de son bâtiment, c’est tout un univers de précision et de discipline qui se déploie: atmosphère contrôlée, odeur neutre, silence feutré, ponctué par le ronronnement des centrifugeuses et le souffle régulier des hottes aspirantes.

Dans le département de microbiologie, véritable cœur battant du laboratoire, les techniciens traquent les bactéries pathogènes, ces agents invisibles qui, laissés libres, peuvent provoquer de graves intoxications alimentaires. Les analyses portent sur la recherche de Salmonella, d’Escherichia coli, de Listeria monocytogenes, de Staphylococcus aureus et bien d’autres micro-organismes potentiellement dangereux. Chaque échantillon suit un protocole rigoureux: préparation stérile, ensemencement sur milieux de culture spécifiques, incubation dans des conditions contrôlées, identification biochimique et sérologique.

Plus loin, dans la zone physico-chimique, les analyses permettent de vérifier la conformité des produits aux normes en vigueur, d’identifier d’éventuelles variations de composition et de détecter certaines substances indésirables. Les paramètres analysés incluent le pH, l’acidité, la teneur en matières grasses, en protéines, en sucres, ainsi que la recherche d’additifs alimentaires et de contaminants chimiques. Les techniques employées font appel à la chromatographie, à la spectrophotométrie et à d’autres méthodes analytiques de pointe.

Là, des scientifiques – chimistes, microbiologistes, inspecteurs – mènent une guerre sans uniforme contre les menaces invisibles. Chaque échantillon qui franchit leur paillasse porte un enjeu: la santé d’une famille, la réputation d’un producteur, la crédibilité d’un pays. Cette responsabilité, loin de les écraser, les galvanise et nourrit leur exigence de perfection.

Si certaines analyses spécialisées comme la recherche de résidus de pesticides, d’antibiotiques, de métaux lourds ou de mycotoxines ne sont pas encore réalisées de manière systématique, le LANAA prépare activement leur mise en place afin de renforcer son dispositif de contrôle. Cette montée en gamme technique s’inscrit dans une logique d’anticipation des besoins futurs et d’harmonisation avec les standards internationaux les plus exigeants.

Bien avant d’obtenir sa certification ISO/CEI 17025:2017, gage mondial de compétence et de fiabilité, le LANAA s’était déjà mesuré aux meilleurs: essais inter-laboratoires internationaux, plus de 380 institutions partenaires, et des résultats souvent exemplaires, parfois même victorieux.

La norme ISO/CEI 17025:2017 représente bien plus qu’un simple certificat accroché au mur. Elle constitue la reconnaissance internationale de la compétence technique du laboratoire et de la validité de ses résultats. Cette norme, qui spécifie les exigences générales concernant la compétence des laboratoires d’étalonnages et d’essais, couvre tous les aspects du fonctionnement d’un laboratoire: système de management, ressources humaines, installations et conditions ambiantes, méthodes d’essai et d’étalonnage, équipements, traçabilité métrologique, échantillonnage, et assurance de la validité des résultats.

Pour le LANAA, l’obtention de cette certification a nécessité un travail de fond considérable. Il a fallu documenter l’ensemble des procédures, mettre en place un système de management de la qualité rigoureux, former le personnel aux bonnes pratiques de laboratoire, calibrer et vérifier régulièrement les équipements, et démontrer la traçabilité métrologique de toutes les mesures. Cette démarche qualité s’inscrit dans une logique d’amélioration continue, où chaque non-conformité devient une opportunité d’optimisation.

L’accréditation ISO/CEI 17025 place le LANAA dans le cercle restreint des laboratoires africains reconnus au niveau international. Cette reconnaissance facilite la reconnaissance mutuelle des résultats d’analyses avec d’autres pays, simplifie les procédures d’exportation pour les produits djiboutiens et renforce la crédibilité du pays sur la scène internationale. Elle s’inscrit également dans le cadre du Réseau africain de sécurité sanitaire des aliments (AFoSaN), initiative de l’AIEA et de la FAO visant à renforcer les capacités des laboratoires africains.

« Notre travail, c’est de vérifier que les productions respectent les seuils maximums de résidus autorisés. Ce n’est pas seulement une question d’aujourd’hui, mais de santé publique sur le long terme », confie Hassan Kamil Ali, directeur général du LANAA. Cette vision à long terme guide l’ensemble des activités du laboratoire et oriente ses investissements en équipements et en formation.

Un réseau de partenaires au service de l’Excellence

Cette excellence s’appuie aussi sur un solide réseau de partenaires nationaux et internationaux. L’Agence Djiboutienne de Normalisation joue un rôle crucial dans l’élaboration des normes nationales, harmonisées avec les standards internationaux. L’Institut National de Santé Publique de Djibouti (INSPD) collabore étroitement avec le LANAA pour les campagnes de surveillance épidémiologique et l’investigation des toxi-infections alimentaires collectives. Cette synergie institutionnelle permet une approche globale et coordonnée de la sécurité alimentaire, depuis le contrôle aux frontières jusqu’à la surveillance du marché intérieur.

D’autres partenaires clés jouent également un rôle déterminant dans cette chaîne de sécurité. La Douane, avec ses agents barrières du service d’opérations affectés aux différents points d’entrée des marchandises, constitue le premier maillon de contrôle. Ces agents, formés aux techniques de prélèvement et sensibilisés aux risques sanitaires, orientent vers le LANAA les cargaisons suspectes ou soumises à contrôle systématique. La Gendarmerie nationale accompagne le personnel de la brigade mobile lors des inspections, de la détection des non-conformités et de la répression des fraudes alimentaires. Cette collaboration entre autorités sanitaires et forces de l’ordre garantit l’efficacité des contrôles et la dissuasion nécessaire pour maintenir un niveau élevé de conformité chez les opérateurs économiques.

La Garde-côtes djiboutienne se mobilise pour certaines opérations spécifiques, notamment le contrôle des produits de la pêche débarqués dans les ports secondaires ou la surveillance des circuits informels d’approvisionnement. Cette coopération inter-institutionnelle illustre la dimension transversale de la sécurité alimentaire et la nécessité d’une approche coordonnée.

Une mission de terrain: La Brigade Mobile en action

LANAA, par son contrôle des importations, délivre à chaque cargaison un passeport pour la confiance. Sans cette institution, la vitalité économique pourrait vaciller, minée par le doute. Chaque année, LANAA effectue plusieurs milliers d’analyses: huiles, laits, farines, riz, légumes, volailles… Rien n’échappe à son œil analytique.

Une brigade mobile parcourt le pays, inspectant boulangeries, restaurants, hôtels, entrepôts, boutiques et usines d’eau, de Tadjourah à Dikhil. Ces inspections inopinées constituent un volet essentiel de la stratégie de contrôle du LANAA. Elles permettent de vérifier sur le terrain l’application des bonnes pratiques d’hygiène, le respect des températures de conservation, la traçabilité des produits et la conformité des installations. Les inspecteurs de la brigade mobile, véritables détectives de la sécurité alimentaire, scrutent chaque détail: propreté des surfaces de travail, état des équipements de réfrigération, respect de la chaîne du froid, conditions de stockage, dates de péremption, étiquetage des produits. Leur œil exercé décèle rapidement les anomalies qui pourraient compromettre la sécurité des consommateurs.

Lors de ces inspections, des échantillons sont prélevés selon des protocoles stricts pour être analysés au laboratoire. Ces prélèvements, réalisés de manière aléatoire ou ciblée selon les risques identifiés, permettent de détecter d’éventuelles contaminations microbiologiques ou chimiques. Les résultats de ces analyses alimentent une base de données qui permet de suivre l’évolution de la qualité sanitaire des aliments sur le territoire national.

Le laboratoire ne se contente pas d’examiner: il prévient, forme, sensibilise. Ses formations, fondées sur la méthode des 5 M (Milieu, Méthode, Matière, Matériel, Main d’œuvre), inculquent aux professionnels la maîtrise des températures, la traçabilité et la rigueur sanitaire. Cette approche pédagogique, inspirée des meilleures pratiques internationales, permet une appropriation durable des bonnes pratiques par les opérateurs économiques. Les sessions de formation organisées par le LANAA couvrent un large spectre de thématiques: principes de l’HACCP (Hazard Analysis Critical Control Points), bonnes pratiques d’hygiène, gestion de la chaîne du froid, nettoyage et désinfection, lutte contre les nuisibles, traçabilité des produits. Ces formations s’adressent aussi bien aux responsables d’établissements qu’aux employés de terrain, dans une logique de sensibilisation à tous les niveaux.

L’impact de ces formations se mesure concrètement sur le terrain. Les établissements formés affichent généralement de meilleurs résultats lors des inspections ultérieures, témoignant de l’efficacité de cette approche préventive. Cette stratégie de formation s’inscrit dans une logique de partenariat avec les professionnels, privilégiant l’accompagnement à la sanction.

Un impact économique et social considérable

L’action du LANAA dépasse largement le cadre sanitaire pour s’inscrire dans une logique de développement économique et social. En garantissant la qualité des produits alimentaires, le laboratoire contribue directement à la protection de la santé publique, évitant les coûts humains et économiques liés aux toxi-infections alimentaires collectives.

Pour les entreprises djiboutiennes, la certification de conformité délivrée par le LANAA constitue un véritable passeport commercial. Elle facilite l’accès aux marchés d’exportation, notamment vers les pays appliquant des standards sanitaires stricts. Cette reconnaissance internationale ouvre de nouvelles perspectives commerciales et contribue à la diversification de l’économie djiboutienne.

Le secteur de la restauration et de l’hôtellerie, pilier de l’économie touristique djiboutienne, bénéficie directement de cette garantie de qualité. Les établissements peuvent afficher leur conformité aux normes sanitaires, rassurant une clientèle internationale de plus en plus exigeante en matière de sécurité alimentaire. Cette confiance se traduit par une amélioration de l’image de destination de Djibouti. Pour les consommateurs djiboutiens, l’action de LANAA se traduit par une réduction significative des risques sanitaires liés à l’alimentation. Cette protection, bien qu’invisible au quotidien, contribue à l’amélioration de la qualité de vie et à la réduction des dépenses de santé liées aux maladies d’origine alimentaire.

L’impact social du LANAA se mesure également à travers ses actions de sensibilisation auprès du grand public. Les campagnes d’information sur les bonnes pratiques alimentaires, la lecture des étiquettes, la conservation des aliments contribuent à élever le niveau de conscience sanitaire de la population.

Vers un pôle d’excellence régional

L’ambition affichée? Faire du LANAA un pôle d’excellence régional, capable d’anticiper les défis de la mondialisation, de contrer les fraudes alimentaires et de répondre aux menaces émergentes. Cette vision s’appuie sur plusieurs axes stratégiques: diversification des analyses, renforcement des partenariats internationaux, développement de la recherche appliquée et extension des services aux pays voisins. La diversification des analyses vise à couvrir l’ensemble des contaminants susceptibles d’affecter la sécurité alimentaire: résidus de pesticides, métaux lourds, mycotoxines, additifs alimentaires, organismes génétiquement modifiés, allergènes. Cette montée en gamme technique permettra au LANAA de répondre aux exigences croissantes des marchés d’exportation et de renforcer la protection des consommateurs djiboutiens.

Le renforcement des partenariats internationaux s’articule autour de la participation active aux réseaux scientifiques régionaux et internationaux. Le LANAA ambitionne de devenir un laboratoire de référence pour la région de la Corne de l’Afrique, offrant ses services d’analyse et d’expertise aux pays voisins. Cette coopération Sud-Sud contribuerait au renforcement des capacités régionales en matière de sécurité alimentaire.

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