Africa-Press – Gabon. La polygamie du président Oligui Nguema fait jazzer depuis l’apparition officielle de sa seconde épouse, Anouchka Avome, en décembre 2023. Celle qui était jusqu’alors la ‘’femme de l’ombre’’ est désormais sur le devant de la scène, gagnant en influence et suscitant la controverse dans l’opinion publique. Alors qu’Oligui Nguema a fait établir une loi autorisant les hauts gradés militaires à épouser plusieurs femmes, l’opinion dénonce une réforme taillée sur mesure pour régler sa situation personnelle. [Avec l’aimable autorisation de ‘’La Cigale enchantée’’, journal où cet article est paru le 22 février]
Tandis qu’Oligui Nguema assume publiquement son statut de polygame, Anouchka gagne en influence, participant aux tournées présidentielles et pesant sur des nominations. La rivalité entre les deux épouses crispe l’opinion, divisé entre défenseurs de la monogamie et chantres de la polygamie.
La scène résume à elle seule le tournant qu’a pris la présidence du Général de Brigade Brice Clotaire Oligui Nguema, quatre mois après sa prise de pouvoir. Ce jeudi 21 décembre 2023, au Gymnase du Prytanée militaire, le Président de la Transition fait son apparition comme le parrain d’une fondation consacrée à l’aide aux orphelins. L’événement en soi est une très bonne chose pour l’ancien Commandant en chef de la Garde républicaine qui tente de polir son image maculée par l’épithète de « militaire putschiste », sauf que l’événement est vite éclipsé par la beauté et la prestance de la dame qui marche à ses côtés.
L’opinion, qui avait, jusqu’ici, soupçonné le numéro 1 gabonais de partager deux foyers, découvre le visage d’Anouchka Avome, mariée à la coutume avec le Général-Président. La seconde épouse d’Oligui Nguema sort de l’ombre pour lancer officiellement les activités de la fondation Dorcas dont elle est la présidente. Aux côtés d’un époux qui n’est nullement gêné du scandale que cette sortie risque de provoquer, Anouchka Avome procède à la distribution des cadeaux de Noël aux enfants de plusieurs orphelinats de Libreville autour d’un arbre de Noël.
Même si, au sommet de l’Etat, les officiels se gardent de parler d’une rivalité ouverte entre la première dame et la présidente de la fondation Dorcas, tout le monde a vite compris que l’organisation, par Zita Oligui Nguema, d’un événement similaire, dans le premier arrondissement de la commune de Libreville, était une réponse à cette bravade.
Comme il fallait s’y attendre, cette guerre latente a suscité, dans l’opinion, une vive polémique entre défenseurs de la monogamie et chantres de la polygamie. La gent féminine, pour l’essentiel, va fustiger le fait que « la femme de l’ombre » sorte de l’anonymat que lui confère le statut de seconde épouse. D’autres y voient un acte de provocation qui tranche avec le caractère réservé et pondéré de Zita Oligui Nguema.
La vie privée du Chef de l’Etat fait désormais l’objet de vives polémiques. Oligui Nguema donne, quant à lui, l’impression d’assumer pleinement son statut de polygame. La preuve, le 25 janvier dernier, l’Exécutif adopte, en Conseil des ministres, une loi qui autorise désormais les officiers supérieurs et les généraux des Forces de défense et de sécurité à épouser officiellement plusieurs femmes s’ils le souhaitent. C’est une loi taillée sur mesure, critiquent, ouvertement, les contempteurs du Chef de l’Etat. Lesquels l’accusent de se servir de sa position à la tête du pays pour régler sa situation matrimoniale personnelle. En dépit de la nouvelle levée de boucliers, Oligui Nguema ne recule pas.
Les rumeurs prêtent même à Anouchka Avome d’être à l’origine de certaines nominations dans l’appareil de l’Etat. La semaine dernière, à la tête d’une horde de ses collaborateurs et de sa sécurité, la seconde épouse a apporté son soutien aux orphelins, tout en déclamant devant les caméras un message de solidarité devenu viral sur les réseaux sociaux: « Ils (les enfants orphelins – ndlr) ont le droit de rêver et de réaliser leurs rêves aussi. Ils ne sont pas différents des autres enfants. Ils ont juste une histoire différente et un destin différent. (…) le destin qu’on a au début de la vie ne doit pas être celui qu’on doit avoir à la fin de sa vie ».
Une première dame trop sur la réserve et mal entourée ?
Face à une co-épouse qui n’hésite plus à s’affirmer sans craindre d’être ouvertement critiquée, Zita Oligui Nguema donne l’impression de s’en accommoder, à la limite, de capituler face à l’adversité. Si elle tient bien son rôle de femme au foyer aux côtés de son époux, sur le terrain social, la première dame est très peu visible. Son influence dans le giron politique, même au sein de la province de la Ngounié, dont elle est native, est tout aussi insignifiante. Alors que sa co-épouse a fait feu de tout bois dans l’organisation de la tournée présidentielle dans le Woleu-Ntem, Zita Oligui Nguema a du mal à faire décoller les préparatifs de la tournée de son époux dans la quatrième province du pays.
En pays Nzébi, on lui reproche justement sa timidité et son manque d’ouverture. Elle n’est pas non plus aidée par des collaborateurs qui, visiblement, manquent d’expérience et surtout d’esprit de rassemblement. « La politique ne se fait pas seul. Elle ne se fait pas en étant renfermé », se désole un cadre politique de la Ngounié Sud. Nombre de ses parents n’hésite pas à fustiger l’attitude d’une première dame qui accorde plus d’importances aux hommes et femmes des églises qu’aux membres de sa famille. La guerre entre les deux groupes fait rage. Les prédicateurs « de la bonne parole » sont accusés de tenter d’embrigader la première dame et de l’écarter des siens.
Orca Boudiandza Mouele
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