Transition ou Reconduction : Scrutin sous Doute

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Transition ou Reconduction : Scrutin sous Doute
Transition ou Reconduction : Scrutin sous Doute

Africa-Press – Gabon. Le 12 avril 2025, les Gabonais ont été appelés aux urnes pour une élection présidentielle censée tourner la page du régime Bongo. Mais derrière l’apparente nouveauté du processus, les méthodes de campagne et la figure du président de la Transition, Brice Clotaire Oligui Nguema, interrogent sur la sincérité de cette opération électorale et la crédibilité d’un véritable changement.

Le 12 avril 2025 restera une date symbolique pour de nombreux Gabonais, notamment ceux nés après 1967 et n’ayant jamais connu une élection hors de l’ombre du clan Bongo. Une page censée se tourner avec la présidence de transition conduite par Brice Clotaire Oligui Nguema. Mais à y regarder de plus près, cette consultation électorale porte les stigmates d’un passé politique encore pesant.

« Il n’y a aucun suspens », tranche le journaliste Vincent Hugeux, spécialiste de l’Afrique, sur le plateau du Journal Afrique de France 24. Une formule lapidaire qui résume bien l’ambiance générale ayant entouré cette élection, où le président de la Transition apparaissait comme le grandissime favori.

Des codes anciens dans un décor modernisé

Malgré les apparences de modernité, l’implication et intégration des réseaux sociaux et la communication soignée, la campagne électorale d’Oligui Nguema s’est déroulée selon des méthodes bien connues des Gabonais: concerts gratuits, mégas-meetings, usage massif des moyens de l’État, face à des candidats relégués à des causeries locales et à du porte-à-porte. « On a retrouvé, avec les atours de la modernité, une technique de campagne électorale qui rappelle de manière troublante Bongo père », note Vincent Hugeux.

Sur le fond, la campagne n’a pas échappé aux calculs communautaires. « Il faut ménager telle communauté, telle région », rappelle Hugeux, évoquant une stratégie de quadrillage reposant sur des agents d’influence, anciens dignitaires du PDG, figures de l’opposition ou transfuges. Une stratégie de reconquête qui s’est appuyée sur une logique d’appareil, bien éloignée de la rupture attendue par une partie de l’électorat.

Un homme fort… et paradoxal

Personnage central de ce scrutin, Brice Clotaire Oligui Nguema jouit d’une popularité certaine. « Le nier serait inepte », concède Vincent Hugeux. Car il incarne, aux yeux de nombreux Gabonais, la fin d’un régime essoufflé, rongé par les inégalités. « Un des produits intérieurs bruts par tête les plus élevés du continent, et pourtant un tiers de la population sous le seuil de pauvreté, un Gabonais sur dix en situation d’insuffisance alimentaire, un réseau routier consternant, des coupures d’eau et une électricité aléatoire », énumère le journaliste Français.

Mais cette image de sauveur se heurte, selon lui, à une réalité moins flatteuse: Oligui Nguema fut aide camp du président Bongo et commandant de la Garde républicaine. « Il apparaît comme celui qui a mis un terme à cette ère. Ce qui est, d’une certaine manière, assez cocasse », commente Hugeux avec ironie.

La question demeure: cette élection marque-t-elle un tournant démocratique ou n’est-elle qu’un habillage destiné à légitimer une reconduction maquillée ? Derrière la promesse de refondation, les pratiques, les réseaux et les logiques de pouvoir semblent toujours à l’œuvre. Le 12 avril 2025 devait signer la renaissance démocratique du Gabon. Mais pour beaucoup d’observateurs, le pays a peut-être simplement changé de façade, sans véritablement changer de cap.

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