Panorama Du Secteur Bois Gabonais Par Tropical Timber Market Report

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Panorama Du Secteur Bois Gabonais Par Tropical Timber Market Report
Panorama Du Secteur Bois Gabonais Par Tropical Timber Market Report

Africa-Press – Gabon. Alors que les pluies anormales paralysent les opérations forestières en pleine saison sèche, le Gabon tente de redonner souffle à sa filière bois. Entre goulots logistiques, pressions réglementaires et ambitions industrielles naissantes, le pays oscille entre blocages structurels et promesses de transformation. Un récent rapport de l’Organisation internationale des bois tropicaux (ITTO), dresse un état des lieux sans complaisance d’un secteur en quête de mutation.

Entre sursauts de modernisation et réalités climatiques contraires, le secteur forestier gabonais avance sur une ligne de crête. Les dernières observations publiées dans le Tropical Timber Market Report (ITTO, n°13, 1er–15 juillet 2025) révèlent un paysage contrasté, où contraintes anciennes et efforts récents s’entrelacent dans une transition encore fragile. Le Tropical Timber Market Report est une publication bimensuelle en anglais de l’Organisation internationale des bois tropicaux (ITTO).

Pluies persistantes, routes dégradées et goulots logistiques

Alors que la saison sèche devrait offrir un répit propice à l’exploitation forestière, le Gabon connaît, selon l’ITTO, des précipitations inhabituelles qui désorganisent les opérations. Les essences principales exploitées – Okoumé, Azobé, Okan et divers bois rouges – peinent à sortir des forêts. Le transport par route reste lent, notamment dans les régions de Lastourville, Lopé et Makokou, où les pistes latéritiques sont en réparation. Résultat: le trajet jusqu’au port d’Owendo peut durer jusqu’à trois jours.

Pour pallier ces blocages, le gouvernement a contracté un prêt de 140 milliards de FCFA auprès de la Banque africaine de développement (BAD), destiné à réhabiliter routes, ponts et améliorer la connectivité ferroviaire. Cependant, malgré l’augmentation du nombre de wagons, les lignes sud du réseau ferré manquent encore de capacité, limitant les gains d’efficacité.

Bonne nouvelle toutefois: les coupures d’électricité qui pénalisaient les scieries et les ports en début d’année ont nettement diminué. Suite à une mise en demeure gouvernementale, la SEEG a renforcé ses moyens. Hormis deux brefs incidents début juillet, Libreville bénéficie d’un approvisionnement électrique stable, ce qui profite directement aux unités de transformation et aux opérations portuaires.

Le port d’Owendo, principal débouché des bois gabonais, fonctionne désormais sans retards majeurs, selon les transporteurs. L’offre de conteneurs est jugée suffisante, même si les navires Roll-on/Roll-off (RoRo) continuent de subir des délais modérés liés à la congestion.

Traçabilité, fiscalité renforcée et ambition industrielle affirmée

Du côté des marchés, les exportateurs restent sous pression. Les restrictions imposées par la CITES [Convention sur le commerce international des espèces de faune et de flore sauvages menacées d’extinction, aussi appelée Convention de Washington] sur des essences précieuses comme le Padouk, le Khaya ou Le Doussié freinent les volumes sortants. À cela s’ajoutent les délais administratifs dans l’Union européenne qui allongent considérablement les temps d’obtention des autorisations nécessaires. Les acteurs déplorent un système lent, kafkaïen, peu adapté aux réalités du terrain.

Dans un contexte de gouvernance renforcée, l’Administration des Forêts a lancé une campagne de recouvrement fiscal pour les taxes foncières non réglées après la date butoir du 25 mars. Les opérateurs en défaut s’exposent à de lourdes pénalités.

Par ailleurs, le gouvernement prévoit de rendre obligatoire la surveillance aérienne par satellite de toutes les concessions forestières. Cette tâche serait confiée à un prestataire technologique basé à Nkok, la zone économique spéciale dédiée à la transformation industrielle du bois. Cette mesure s’inscrit dans une logique de traçabilité accrue et d’alignement sur les standards internationaux de durabilité.

Au-delà de la conjoncture difficile, un projet stratégique émerge. Comme l’avait déjà rapporté GabonReview, l’État a conclu un partenariat public-privé (PPP) pour créer une unité industrielle de transformation du bois. Celle-ci couvrira les trois niveaux de valorisation: primaire, secondaire et tertiaire.

Dans le cadre de ce partenariat, le gouvernement s’engage à garantir un approvisionnement régulier en grumes et à attribuer une concession de 50 000 hectares. L’objectif? Réduire la dépendance aux exportations de bois brut, consolider la chaîne de valeur locale, et créer des retombées économiques internes. Ce modèle pourrait marquer un tournant structurel pour une filière historiquement extravertie.

Enfin, la Société Nationale des Bois du Gabon (SNBG), sous gestion conjointe sino-gabonaise, reste solvable. Elle a bénéficié d’une injection de capital récente qui lui permet de poursuivre ses activités, dans un contexte pourtant difficile pour les entreprises publiques.

Le secteur forestier gabonais est à la croisée des chemins. Entre infrastructures fragiles, pressions environnementales mondiales et volonté politique de relance, l’année 2025 pourrait marquer soit une stagnation prolongée, soit l’amorce d’un repositionnement stratégique fondé sur la transformation locale. Mais la réussite de cette mue dépendra de la cohérence des politiques publiques, de la fluidité logistique… et d’une météo, décidément, bien capricieuse.

Analyse basée sur le Tropical Timber Market Report – Vol. 29, n°13, ITTO, 1–15 juillet 2025

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