Africa-Press – Gabon. Seize ans de silence, seize ans d’illusions. La concession géante de l’ACDG dans la Nyanga -731.000 hectares), jadis présentée comme une arche de modernité et de durabilité, apparaît aujourd’hui comme un mirage. Face à ce naufrage, Nicaise Moulombi, acteur bien connu de la société civile gabonaise, appelle l’État à rompre le bail emphytéotique et à réinvestir ces terres dans des projets véritablement nationaux.
Il y a des projets qui se rêvent en épopées et qui finissent en ruines invisibles. La Grande Mayumba devait être le joyau d’une économie verte, un carrefour entre conservation, agro-industrie et écotourisme de prestige. Elle n’est devenue qu’un désert de promesses, un théâtre sans décor où les populations locales n’ont vu s’élever ni usines, ni emplois, ni avenir. L’ombre immense de cette concession, couvrant à elle seule 3% du pays, pèse aujourd’hui comme une dette morale envers la nation.
Une utopie confisquée
ACDG promettait monts et merveilles: sanctuariser des centaines de milliers d’hectares, générer 200 millions de tonnes de crédits carbone, attirer des milliards d’investissements par les obligations vertes. Les prospectus brillaient comme des vitraux, reflétant l’avenir d’un Gabon pionnier de la neutralité carbone. Mais derrière l’éclat, rien. Pas de port, pas de tourisme, pas d’industrie locale. La Grande Mayumba s’est figée en utopie confisquée, pareille à un navire luxueux jamais mis à flot.
Attribuer 731 000 hectares à un seul opérateur privé étranger, c’était livrer une part du pays en gage. Un bail emphytéotique qui, faute de clauses contraignantes, a transformé l’État en spectateur de sa propre dépossession.
Président de Croissance Saine Environnement et du ROSCEVAC, mais aussi membre du Conseil d’Orientation de l’IFDD, le Gabonais Nicaise Moulombi dénonce une «spoliation par inertie», où les communautés locales ont été reléguées au rang d’ombres sur leur propre terre. Les promesses d’emplois se sont éteintes comme des chandelles au vent, et l’or vert s’est dissipé dans la transparence douteuse des financements jamais honorés.
Le temps de la reconquête
Rompre ce bail ne serait pas une simple mesure administrative: ce serait un acte de souveraineté, une reprise en main de l’avenir. Dans un Gabon qui revendique sa neutralité carbone et son leadership climatique, les terres de Mayumba ne sauraient rester prisonnières d’un projet fantôme. Elles doivent renaître dans la foresterie communautaire, l’écotourisme de proximité, l’agro-industrie enracinée. Là où l’étranger a échoué, le peuple doit écrire sa propre partition.
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