Africa-Press – Guinee Bissau. Un groupe de 36 organisations de la société civile issues de huit pays d’Afrique de l’Ouest – Guinée-Bissau, Sénégal, Gambie, Ghana, Guinée-Conakry, Côte d’Ivoire, Cap-Vert et Togo – dénoncent la gouvernance autoritaire et répressive en Guinée-Bissau depuis l’arrivée au pouvoir d’Umaro Sissoco Embaló le 27 février 2020. Selon elles, le pays est dirigé « d’une main de fer », avec un recours systématique aux forces de défense et de sécurité pour commettre de graves violations des droits humains, notamment des arrestations arbitraires, des enlèvements et des agressions visant des journalistes, des opposants, des activistes et des voix dissidentes.
Dans une lettre ouverte publiée le 27 février 2025, ces organisations interpellent la communauté internationale sur la détérioration du climat politique et des droits humains en Guinée-Bissau. Elles rappellent notamment l’attaque et la destruction de la Radio Capital FM le 7 février 2022, qui a fait sept journalistes blessés, une attaque perpétrée par des militaires liés à la garde présidentielle. Elles dénoncent également la création d’escadrons clandestins de kidnappings et de violences, qui auraient enlevé et torturé brutalement plus de dix personnes.
Elles évoquent également le « coup d’État institutionnel » de décembre 2023, avec la dissolution anticonstitutionnelle du Parlement seulement quatre mois après l’installation des députés. Elles accusent aussi Umaro Sissoco Embaló de refuser d’organiser les élections législatives plus d’un an après cette dissolution.
Elles dénoncent en outre l’assaut armé contre le Parlement le 22 septembre 2024, ayant conduit à l’éviction du président élu de l’Assemblée nationale et à son remplacement illégal par la deuxième vice-présidente, en violation de la Constitution.
Selon elles, la répression des manifestations s’est intensifiée, notamment l’interdiction totale des rassemblements et des réunions publiques depuis le 15 janvier 2024. Elles signalent aussi l’arrestation arbitraire de 93 membres du mouvement Front Populaire lors d’une manifestation pacifique le 18 mai 2024, suivie de tortures brutales au ministère de l’Intérieur. Aucune enquête ni poursuite n’a été engagée contre les auteurs de ces actes.
Les organisations alertent sur la transformation de la Guinée-Bissau en « sanctuaire du crime organisé », notamment le trafic de drogue, qui constitue une menace majeure pour la stabilité régionale.
Elles regrettent l’inaction de la CEDEAO et de la communauté internationale, qui n’ont pris aucune mesure efficace pour contraindre Umaro Sissoco Embaló à respecter ses obligations. Elles rappellent que lors de la 66e session de la Conférence des chefs d’État de la CEDEAO, tenue à Abuja le 15 décembre 2024, il avait été décidé d’envoyer une mission de haut niveau en Guinée-Bissau pour faciliter un consensus politique sur le calendrier électoral. Mais cette décision n’a jamais été appliquée.
Face à cette situation, elles appellent à une intervention énergique et immédiate de la communauté internationale pour éviter la consolidation d’un régime autoritaire en Guinée-Bissau, qui pourrait déstabiliser toute la sous-région.
Elles exhortent la communauté internationale à adopter des sanctions contre le régime en place et à exiger le départ d’Umaro Sissoco Embaló à la fin de son mandat le 27 février 2025, en l’absence d’élections avant cette date. Elles réclament aussi le rétablissement de l’ordre constitutionnel, avec l’organisation d’élections libres et inclusives, le retour du président élu du Parlement, et l’élection des membres de la Commission nationale des élections.
Par ailleurs, elles demandent aux autorités bissau-guinéennes de cesser immédiatement les arrestations arbitraires, les intimidations et les menaces contre les citoyens, les journalistes, les opposants politiques et les activistes des droits humains. Elles réclament l’ouverture d’enquêtes judiciaires transparentes pour identifier et punir les responsables des enlèvements, actes de torture et agressions.
Enfin, elles appellent à l’envoi d’une mission conjointe de dialogue incluant la CEDEAO, l’Union africaine, l’Union européenne, la CPLP et l’ONU, afin d’établir un calendrier électoral consensuel en conformité avec la Constitution du pays.
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