
Africa-Press – Guinée. En Guinée, les prisons grouillent de mineurs en conflit avec la loi. Ces gamins, pour un tout ou un rien, sont placés sous mandat de dépôt et écroués aux côtés de ‘’bandits de grand chemin’’. C’est le cas à la maison centrale de Conakry où de nombreux mineurs sont actuellement détenus. Certains ont déjà passé des mois dans cette maison carcérale sans jugement. Cette situation indigne parfois certains défenseurs des droits de l’homme, mais aussi des avocats qui plaident la cause de ces enfants.
Me Thierno Souleymane Barry a dénoncé un « dysfonctionnement du système judiciaire » en Guinée. Cet avocat au barreau de Guinée fustige notamment le cadre institutionnel et l’absence d’un budget conséquent pour organiser les procès des mineurs à Conakry.
« Le système de justice pour les enfants mineurs en Guinée est un système incomplet ou faible. En dépit du fait que nous sommes l’un des tout premier pays ayant ratifié la convention relative aux droits de l’enfant, d’avoir vu un code qui reconnaît la spécificité de la justice pour mineur, la mise en œuvre de ce code-là, du point de vue institutionnel, n’a pas suivi. Prenez par exemple le cas du siège du tribunal pour enfants de Conakry qui couvre 5 communes. Ce tribunal s’est balancé d’un coin à un autre. Il était dans l’annexe du tribunal de première instance de Kaloum avant d’aller s’installer, il y a quelques semaines, à l’ancien ministère de la citoyenneté et de l’unité nationale. Lorsque des magistrats dédiés à la protection des droits de l’enfant n’ont même pas un cadre de travail, voyez bien la difficulté. D’autant plus que la tenue des procès était tributaire de la disponibilité de l’unique salle du tribunal de première instance de Kaloum où d’une salle gracieusement donnée à la cour d’appel. Alors qu’en matière de justice pour mineurs, la célérité, la rapidité est de mise. C’est pour cela qu’il y a la justice ordinaire et la justice spécifique pour l’enfant compte tenu du fait que c’est un être en développement. Donc, l’un des premiers problèmes est d’abord au niveau Institutionnel… Le juge pour enfant, c’est un juge spécifique. Recueillir les témoignages d’un enfant, ce n’est pas comme si vous avez un adulte devant vous qui peut répéter plusieurs fois. Donc, si la parole de l’enfant n’est pas recueillie à temps, l’enfant peut oublier d’un moment à l’autre. Donc, cette question de formation est nécessaire et cela au niveau de tous les acteurs. Il en est de même pour les officiers de la police judiciaire (OPJ) et les avocats qui sont chargés de recueillir les témoignages des enfants où de les assister », a expliqué Me Thierno Souleymane Barry.
Par ailleurs, cet avocat a aussi déploré le fait que des mineurs en conflit avec la loi se retrouvent dans la même prison que des adultes. Car, il estime qu’aux côtés de ces adultes, il y a de fortes chances que les enfants apprennent « le banditisme » avant leur sortie de prison. Et, sous cet angle, il assure que la prison n’aura servi qu’à produire le mal en lieu et place d’une rééducation pour une meilleure réinsertion sociale.
« En Guinée, de façon courante, dès lors que l’enfant fait face au système judiciaire, c’est l’incarcération qui existe. Alors que vous avez par exemple l’ensemble des règles des nations unies sur l’administration de la justice pour mineur… Le but est de faire en sorte que l’enfant ne purge pas une peine, quel que soit le stade. Et, s’il doit le faire, des milieux ouverts doivent être aménagés à cet effet. Avec le système carcéral que nous avons, le principe sacro-saint que nous avons, c’est la séparation des enfants et des adultes. Et, ce principe n’est pas respecté à la lettre. A la maison centrale de Conakry, il y a ce qu’on appelle la cale mineurs pour les garçons. Mais, ce n’est pas le cas pour les jeunes filles. Et, même le fait de les mettre ensemble dans la même maison centrale, c’est comme si vous mettiez une école à leur disposition… On célèbre chaque année le mois de juin avec des budgets colossaux. Ce n’est pas mauvais de faire la promotion des droits de l’enfant, mais l’essentiel c’est d’orienter les moyens-là vers du concret », a indiqué Me Thierno Souleymane Barry.
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