Par Jeune Afrique
Africa-Press – Mali. Piliers du Nord, hommes du Centre, juges islamiques… Dans la guerre qu’il mène au Sahel, le patron du JNIM s’est assuré la loyauté d’hommes de l’ombre.
C’est une série de noms, souvent sans visage, dont le CV se décline en nombre de morts et en zones d’influence. Ils sont d’origine diverses et ont fait leurs armes au sein de factions rebelles ou jihadistes variées. Tous, aujourd’hui, ont prêté allégeance au Groupe de soutien à l’islam et aux musulmans (le JNIM, selon l’acronyme arabe le plus souvent utilisé).
À la tête de cette filiale sahélienne de la nébuleuse jihadiste Al-Qaïda : Iyad Ag Ghali. Le Touareg malien a pris les armes à plusieurs reprises pour réclamer l’indépendance de l’Azawad (le nom donné par les sécessionnistes au nord du Mali) et combattre au Liban, en Libye, ou encore au Tchad.
L’armée française l’a longtemps considéré comme l’ennemi public numéro un au Sahel. Une décennie d’intervention militaire de l’Hexagone au Mali n’aura pas suffi à le neutraliser. Le patron du JNIM est un combattant aguerri et un fin stratège qui a su, au fil des ans, tisser un réseau d’influence et d’allégeances.
Celui qui répond, hiérarchiquement, à Abou Obeida Youssef al-Annabi, le chef d’Al-Qaïda au Maghreb islamique (AQMI), s’est adjoint la loyauté de milliers de combattants. Nombre d’entre eux sont décédés, mais Iyad ag Ghali peut encore compter sur l’appui de lieutenants armés, de théoriciens et de juges islamiques pour servir la propagation du groupe et de ses idées.
S’il ne fallait donner qu’un nom dans la garde rapprochée d’Iyad ag Ghali, ce serait sans doute celui de Sedane Ag Hita. « Bras droit », « adjoint », « numéro deux » : le jihadiste malien est décrit comme un rouage indispensable de la stratégie du JNIM.
Passé par les rangs de l’armée malienne, Sedane Ag Hita est incontournable au sein du groupe. Iyad ag Ghali en a notamment fait son émissaire dans la gestion des otages, qui constituent l’une des principales sources de revenu de la nébuleuse. Il est également le commanditaire présumé de l’enlèvement et de l’assassinat des journalistes de RFI Ghislaine Dupont et Claude Verlon, en 2013, à Kidal.
Abderrahmane Talha, dit Talha al-Libi ou encore Abu Talha al-Libi, Maurito-Malien, est également un acteur central de la gestion des otages du JNIM. Ce « wali » (gouverneur) de la région de Tombouctou, dont l’influence s’étend jusqu’à Taoudénit, dans l’extrême nord-ouest du Mali, fut le chef de la Katiba (unité combattante) al-Furqan, absorbée depuis par le groupe d’Iyad Ag Ghali. Lors de l’occupation des villes du nord du Mali, en 2012, al-Libi s’est notamment illustré au sein de la police islamique de Tombouctou.
Très influent dans le nord du Mali, Abdallaye Ag Albaka, l’ex-maire de la ville de Tessalit, a longtemps été décrit comme étant un très proche collaborateur d’Iyad ag Ghali. Son nom est associé à l’attaque d’un camp de la Minusma par les hommes du JNIM à Aguelhok, au Mali, en avril 2021.
Abdorrahmane Zaza, que l’on connaît mieux sous le nom de Abdorrahmane Al-Targui, est un pilier du JNIM dans la région de Kidal. On le dit impliqué dans l’attaque sanglante menée en juillet 2016 contre le camp de l’armée malienne à Nampala. Son nom est parfois confondu avec celui d’un homonyme, Abdelkrim al-Targui, ex-cadre d’Aqmi tué par l’armée française en 2015.
Dans la région de Ménaka, le JNIM s’appuie sur Faknan Ag Taki et ses hommes. Selon des documents des Nations unies, ce dernier a succédé à Malick Ag Wanasnate après la mort de celui-ci. Toujours à proximité des « trois frontières », comme on surnomme la région située entre le Mali, le Niger et le Burkina Faso, Iyad Ag Ghali s’appuie, dans la région de Gao, sur Himmama Ould Lekhweir, aussi appelé Hamza al-Tabankorti. Passé par les rangs du groupe jihadiste al-Mourabitoune, il serait un expert en explosif.
Tout à sa volonté d’expansion à travers le Sahel et vers les pays côtiers d’Afrique de l’Ouest, le JNIM a peu à peu gagné le centre du Mali, qui constitue aujourd’hui l’un des fronts les plus meurtriers du jihadisme dans la région. Localement, Iyad Ag Ghali peut compter sur la loyauté d’une autre célèbre figure du jihad malien : Amadou Koufa.
L’insaisissable prédicateur peul a été annoncé mort à plusieurs reprises et ressuscité autant de fois. Reconnaissable à sa barbiche rousse, le leader de la Katiba Macina, créée en 2015, est l’une des voix les plus connues du jihad malien.
Salem Ould Breihmatt (de son vrai patronyme Mohamed Salem Ould Mbarek) dit Abu Hamza Al-Chinguetti, ou Al-Shinqiti de son nom de combattant, est un jihadiste mauritanien. Lui et ses soldats sont très actifs dans la zone malienne du Gourma Serma, et mènent des opérations le long de la frontière avec le Burkina Faso. Pas uniquement limité au Centre, il prospère dans la zone qui relie les villes de Gossi, dans le Nord, à Mopti au Centre. On le dit très engagé dans le conflit qui oppose le JNIM à ses rivaux de l’État islamique au grand Sahara (EIGS). Une lutte pour laquelle il serait amené à coopérer avec Jafar Dicko.
Après la mort de son frère, Boureima Malam Dicko en 2017, Jafar Dicko a pris la tête du groupe jihadiste Ansarul Islam, très actif au Burkina Faso. Âgé d’une cinquantaine d’années, celui que l’on surnomme Yéro est originaire de la province du Soum. Il a également la réputation d’être sanguinaire.
Si la lutte armée est un pilier de l’expansion du JNIM au Sahel, le groupe d’Iyad Ag Ghali se présente également en pourvoyeur de services sociaux, notamment dans les zones où l’État est lacunaire, voire absent. Le JNIM compte ainsi des « cadis », des juges islamiques qui s’appuient sur la charia pour rendre justice. Dans la zone de Kidal, on peut notamment citer Zineidine Ag Biga. Mais le plus connu d’entre eux est incontestablement Houka Houka Ag Alhousseini, plus connu sous le nom de Houka Houka.
Celui qui fut à la tête du tribunal islamique de Tombouctou en 2012 sous l’occupation jihadiste est un personnage très controversé. Dans la région de Tombouctou, il est derrière certains accords passés entre le JNIM et les autorités locales, fixant les règles pour la réouverture des écoles, par exemple. Un temps placé sous sanctions onusiennes, il a été décoré en novembre 2022 par les autorités maliennes, ce qui n’a pas manqué de faire réagir les associations de défense des droits de l’homme.
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