Alger relance le dialogue avec les rebelles maliens et provoque la colère de Bamako

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Alger relance le dialogue avec les rebelles maliens et provoque la colère de Bamako
Alger relance le dialogue avec les rebelles maliens et provoque la colère de Bamako

Manon Laplace

Africa-Press – Mali. La réception de plusieurs figures de la rébellion indépendantiste par les autorités algériennes a provoqué une crise diplomatique entre les deux voisins, qui ont chacun rappelé leurs ambassadeurs respectifs.

Depuis que l’accord d’Alger a été rompu par la reprise de la guerre entre l’armée malienne et la rébellion indépendantiste du Nord en août dernier, l’Algérie, cheffe de file de la médiation internationale dans le processus de paix malien, est restée discrète.

Mi-décembre, Alger est sorti de son silence pour la première fois depuis la défaite des rebelles à dominante touarègue dans leur fief de Kidal, le 14 novembre, et a fait un nouveau pas en faveur du dialogue. Dans un communiqué publié le 13 décembre, les autorités algériennes ont réitéré leur « ferme conviction que [l’accord d’Alger] demeure le cadre idoine pour la résolution de la crise au Mali », appelant « toutes les parties maliennes à renouveler leur engagement dans cette œuvre collective de paix et de réconciliation ».

Dans cette perspective, elles ont reçu, à Alger, plusieurs représentants des mouvements armés du Nord signataires de l’accord de paix. Des consultations ont ainsi été menées avec le patron du Mouvement pour le salut de l’Azawad (MSA), Moussa Ag Acharatoumane. En septembre, le mouvement historiquement « loyaliste », s’était dissocié du Cadre stratégique permanent (CSP), principale coalition rebelle du septentrion malien dont il faisait partie, se disant opposé à la reprise du conflit avec Bamako.

Consultations

Ses anciens partenaires, les chefs des mouvements qui composent le CSP, ont eux aussi été reçus en haut lieu à Alger. Alghabass Ag Intalla, secrétaire général du Haut conseil pour l’unité de l’Azawad (HCUA) et actuel président du CSP, Fahad Ag Almahmoud et Hanoun Ould Ali, représentants de la Plateforme mais aussi le porte-parole du CSP, Mohamed Elmaouloud Ramadane, se sont entretenus avec le Premier ministre algérien, Nadir Larbaoui. Le patron du Mouvement national de libération de l’Azawad (MNLA), Bilal Ag Acherif, autre figure majeure de la rébellion, n’a quant à lui pas fait le déplacement.

À en croire un participant à la rencontre, les échanges n’ont pas porté sur une éventuelle relance de l’accord d’Alger. Officiellement, le texte n’a été dénoncé par aucun des belligérants bien que chaque camp accuse l’autre de l’avoir fait voler en éclats. « Nous avons été invités afin de donner notre point de vue sur la situation actuelle. Il n’y a pas eu de recommandations particulières, simplement un état des lieux », résume Mohamed Elmaouloud Ramadane.

Pour le porte-voix de la rébellion indépendantiste, une reprise du dialogue « ne peut-être envisagée tant que Bamako et ses alliés du groupe Wagner mènent leur politique de la terre brûlée et massacrent des civils ».

Ire de Bamako

L’Algérie, frontalière du Nord du Mali, est devenue la terre d’accueil de nombreux réfugiés ayant fui la reprise des combats. En 2015, trois ans après la dernière insurrection indépendantiste, elle s’était imposée à la tête de la médiation internationale lors de la signature de l’accord de paix.

Mais les récentes consultations lancées par Alger ont provoqué l’ire des autorités de transition à Bamako. Ce mercredi 20 décembre, le chef de la diplomatie malienne, Abdoulaye Diop, a convoqué l’ambassadeur d’Alger à Bamako. Dans un communiqué, le ministère des Affaires étrangères s’insurge « suite aux récents actes inamicaux posés par les autorités algériennes, sous le couvert du processus de paix au Mali ».

Bamako pointe « les rencontres récurrentes, aux niveaux les plus élevés en Algérie, et sans la moindre information ou implication des autorités maliennes, d’une part avec des personnes connues pour leur hostilité au gouvernement malien, et d’autre part avec certains mouvements signataires de l’accord pour la paix et la réconciliation au Mali, issu du processus d’Alger, ayant choisi le camp des terroristes ».

Dans la foulée de ce communiqué virulent, les autorités algériennes ont rappelé ce vendredi 22 décembre leur ambassadeur au Mali, poussant leurs homologues maliennes à faire de même avec le leur en Algérie.

L’imam Dicko reçu par Tebboune

Dans le conflit qui les oppose aux groupes armés du Nord, les autorités maliennes accusent les mouvements du CSP d’actes de terrorisme. Fin novembre, après la reprise symbolique de la ville de Kidal, elles avaient ouvert une enquête judiciaire pour « terrorisme » visant les chefs des mouvements, Bilal Ag Acherif, Alghabass Ag Intalla, Ibrahim Ould Handa, Fahad Ag Almahmoud, Hanoune Ould Ali et Mohamed Ag Najim mais aussi Iyad Ag Ghaly, chef jihadiste à la tête de la branche locale d’Al-Qaïda.

Une autre visite aux autorités algériennes pourrait bien avoir contrarié Bamako. Celle, le 19 décembre, du prédicateur Mahmoud Dicko, reçu cette fois par Abdelmadjid Tebboune en personne. L’imam, dont l’influence transcende la sphère religieuse, est une figure centrale de la vie politique malienne. Bien que relativement discret sous la transition, Mahmoud Dicko ne s’est pas privé de critiquer vertement, et à plusieurs reprises, la junte d’Assimi Goïta.

source: jeuneafrique

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