Moment Magnétique du Muon: Anomalie en Voie de Disparition

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Moment Magnétique du Muon: Anomalie en Voie de Disparition
Moment Magnétique du Muon: Anomalie en Voie de Disparition

Africa-Press – Mali. C’est étrange mais en physique, il arrive que la concordance entre théorie et expérience débouche sur une vague déception plutôt qu’un éclatant triomphe. C’est ce qui semble se produire avec le fameux moment magnétique du muon, longtemps suspecté de défier les prédictions du modèle standard de la physique des particules. Un nouveau calcul théorique, couplé à de nouveaux résultats expérimentaux, tous publiés ces deux dernières semaines, douche l’un des plus grands espoirs de découverte en physique fondamentale, tout en confortant une fois de plus le modèle standard.

Le comportement étrange du muon

L’affaire remonte à plus de vingt ans. En 2001, des physiciens du Brookhaven National Laboratory, dans l’état de New York, mesurent que le muon — particule instable, cousine massive de l’électron — tourne légèrement plus vite sur lui-même dans un champ magnétique que ne le prévoit la théorie. Cette rotation, liée à une propriété quantique notée g, donne naissance à un écart baptisé « g–2 ». Face à cette étrangeté, les physiciens affinent leur prédiction théorique à partir de données expérimentales diverses, tout en préparant une nouvelle campagne de mesures cette fois au Fermilab, près de Chicago, à partir de 2013. Dans le même temps, des débats s’intensifient au sein de la communauté sur la validité de certaines approches de calcul, notamment autour des effets dits « hadroniques », très complexes à modéliser.

L’espoir de découvrir de nouvelles forces, ou des particules inconnues

Un nouvel épisode survient en 2021, lorsque le Fermilab livre le bilan des nouvelles campagnes de mesures, confirmant l’anomalie de Brookhaven avec un niveau de confiance de 4,3 sur un milliard. La précision est encore doublée en 2023. Dans la communauté, on se frotte les mains, et d’aucuns se mettent à espérer, pourquoi pas, l’existence de nouvelles particules, ou d’interactions encore inconnues. En effet, si les mesures ne correspondent pas à la théorie, alors cela signifie que des particules inconnues sont à la manœuvre pour chahuter notre muon… Car les calculs théoriques envisagent normalement toutes les perturbations que pourrait ressentir le muon à partir des 17 particules officiellement répertoriées dans le modèle standard. Donc s’il y a des perturbations supplémentaires, elles proviennent de particules inconnues. Mais patatras ! Alors que les mesures confirmaient l’anomalie, c’est la théorie qui vacille…

La théorie change de stratégie…

Jusqu’ici, les calculs des théoriciens reposaient sur des données issues d’expériences antérieures, en particulier sur des collisions d’électrons et de positrons. Or une autre approche consiste à simuler numériquement les interactions entre quarks (les constituants des protons et neutrons) et gluons (les particules qui assurent la cohésion de ces quarks). Ces effets, appelés « contributions hadroniques », sont essentiels pour prédire correctement le comportement du muon dans un champ magnétique.

Cette méthode, bien plus directe, ne dépend d’aucune donnée extérieure, mais elle nécessite des capacités de calcul colossales. Dès 2020, la collaboration BMW (pour Budapest, Marseille, Wuppertal, les trois laboratoires impliqués dans le calcul) parvient par ce biais à se rapprocher de la valeur mesurée au Fermilab. Cinq ans plus tard, la collaboration Muon g-2 Theory initiative reprend l’approche BMW, qu’elle couple avec d’autres méthodes, et publie un nouveau résultat ultraprécis sur arXiv, le 27 mai 2025. Elle reproduit exactement la valeur mesurée au Fermilab: g = 2,0023318414. L’anomalie s’évanouit…

et rejoint l’expérience…

« C’est une magnifique réussite théorique, mais je suis un peu triste », confie à la revue Science la physicienne Aida El-Khadra, qui pilote le programme Muon g–2 Theory Initiative à l’université de l’Illinois. Car si la théorie rejoint l’expérience, elle ferme donc la porte à toutes les spéculations qui ont animé le domaine depuis deux décennies: particules exotiques, forces supplémentaires… L’expérience du Fermilab est désormais terminée. Seule subsiste une tentative concurrente de mesurer le moment magnétique du muon au Japon, avec une méthode différente, mais moins précise. À défaut de découverte, le résultat confirme au moins la robustesse du modèle standard, cette « table de la loi » de la physique des particules, que l’on espérait tant prendre en défaut.

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