En quête «d’espace», les terroristes «testent» l’administration Bazoum

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Après quatre mois d’attaques contre les civils avec des centaines de morts, les terroristes viennent de cibler deux fois de suite en l’espace de 4 jours des militaires. Le bilan des deux attaques fait état de 32 morts. Pour relever le pari sécuritaire, le Niger doit investir davantage dans le renseignement, d’après un analyste.

Au Niger, 32 militaires ont été tués dans deux attaques terroristes ces quatre derniers jours. La première intervenue le samedi 1er mai, qui a eu pour cible une position des forces armées dans le nord-ouest du pays plus précisément, dans la localité de Tillia située dans la région de Tahoua, a fait 16 morts parmi les militaires selon un bilan dressé par le gouvernorat de la région. Six autres ont été blessés et un septième est toujours porté disparu. Certaines sources locales évoquent un enlèvement, une thèse qui n’a pas été confirmée par des sources officielles.

Selon le modus operandi décrit à la télévision publique par Ibrahim Miko, le secrétaire général du gouvernorat de Tahoua, les terroristes arrivés sur une centaine de motos ont tendu une embuscade à une patrouille de la garde nationale. Ils ont réussi à emporter un véhicule de l’armée et à en endommager deux autres, indique la même source.

Depuis le début de cette année 2021, les terroristes s’en sont plutôt pris aux civils dans les régions de Tahoua et de Tillabéri, toutes deux frontalières avec le Mali, mais font partie d’un ensemble plus vaste, celui de la zone dite des trois frontières, où sévissent depuis plusieurs années des terroristes liés à Al-Qaïda* ou à l’organisation État islamique (EI)*.

Les deux régions, Tahoua et Tillabéri, sont d’ailleurs, et depuis deux ans, sous état d’urgence sécuritaire. La dernière attaque d’envergure remonte au 21 mars dernier, quand plus de 140 civils ont été tués par les terroristes dans des attaques simultanées ayant pris pour cible plusieurs villages de Tahoua.

Conquérir de grands espaces
Contacté par Sputnik, le Dr Sylvain Nguessan, directeur de l’institut de stratégies d’Abidjan, affirme que cette nouvelle attaque qui signe un retour aux militaires comme cibles au Niger pourrait avoir trois mobiles terroristes.

D’abord, les terroristes actifs dans la zone des trois frontières semblaient avoir perdu du terrain, depuis que les forces armées nigériennes ont renforcé leur positionnement dans cette zone au lendemain des premières attaques contre les civils en janvier dernier, surtout autour de certains espaces vitaux comme les points d’eaux, les marchés ainsi que les terrains fertiles dans cette zone désertique. Dès lors, soutient Nguessan, les terroristes chercheraient sans doute à repousser davantage les militaires de ces zones stratégiques.

«Déloger pour eux reviendrait du coup à conquérir plus d’espace, mettre les populations de ces zones sous leur autorité. Donc l’enjeu pour ces terroristes est maintenant territorial. C’est-à-dire repousser les militaires et conquérir des espaces plus grands», a expliqué le Dr Sylvain Nguessan.
Le deuxième mobile avancé par l’analyste ivoirien s’apparente à «un test» de la nouvelle administration nigérienne, celle du Président Mohamed Bazoum, le «sécurocrate» élu à la tête du pays en 2021.

«Il y a un nouveau Président, qui forcément a déjà injecté quelques nouveautés dans le dispositif sécuritaire du pays, avec de nouvelles mutations, donc les terroristes en s’attaquant à cet instant même aux militaires, voudraient sans doute évaluer la portée du nouveau dispositif en place dans le pays», a-t-il poursuivi.
Enfin, Sylvain Nguessan affirme que ces terroristes pourraient être aussi en manque d’équipements militaires. Ce qui expliquerait le fait qu’ils aient emporté un véhicule de la patrouille tombée dans leur embuscade.

Anticiper pour déjouer les attaques
Face à la situation qui prévaut au Niger et dans les pays de la région, Sylvain Nguessan pense que les dirigeants de la région sahélienne doivent être davantage dans une démarche d’anticipation pour déjouer ces attaques.

Il conseille pour y arriver un renforcement des systèmes de renseignement nationaux et, pour pallier leur insuffisance, une collaboration avec les services étrangers.

«Quand on connaît l’état de nos dispositifs sécuritaires et de défense, les pays sous la menace terroriste doivent pouvoir collaborer avec les grandes oreilles, occidentales ou autres, présentes dans la région pour avoir les informations à temps afin de déjouer les attaques terroristes», affirme-t-il.

«Le renseignement et la collaboration sont de mon point de vue des piliers à renforcer dans tous nos États si nous voulons repousser les terroristes et reprendre le contrôle de nos États» conclut-il.

 

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