Aïcha FALL
Africa-Press – São Tomé e Príncipe. Dans son rapport 2025, le Policy Center for the New South s’attarde sur deux projets monétaires qui cristallisent les espoirs d’intégration économique en Afrique de l’Ouest: l’Eco, censée remplacer le franc CFA au sein de la CEDEAO, et les monnaies numériques de banques centrales, expérimentées dans plusieurs pays de la région.
Portés par une volonté politique d’autonomie et d’inclusion, ces dispositifs visent à fluidifier les échanges intra-africains, réduire la dépendance au cash et renforcer l’accessibilité financière pour les populations non bancarisées. Ils traduisent une ambition continentale d’innovation monétaire, dans un contexte où les paiements digitaux progressent rapidement et où les États cherchent à moderniser leur souveraineté économique.
Mais les enjeux sont loin d’être uniquement techniques. Derrière les interfaces numériques ou les annonces politiques, les experts interrogés dans le rapport soulignent des tensions systémiques. D’un côté, l’Eco, toujours à l’état de projet, reste suspendu à une convergence macroéconomique que les États peinent à atteindre. Les critères budgétaires, inflationnistes ou de réserves restent hors de portée pour plusieurs pays, rendant son adoption plus symbolique que réaliste à court terme.
De l’autre, les monnaies numériques, tout en promettant des gains d’efficience, pourraient fragiliser encore davantage des systèmes bancaires déjà peu solides. Le risque d’une désintermédiation bancaire, d’une fuite des dépôts vers les portefeuilles digitaux des banques centrales, ou d’une exposition accrue aux cyber-risques, n’est pas anodin dans des économies aux filets de sécurité encore limités.
L’Afrique de l’Ouest avance donc sur une ligne de crête. Les innovations monétaires sont stratégiques, mais elles nécessitent une architecture réglementaire robuste, une infrastructure numérique inclusive et surtout une vision politique partagée. Sans cela, les outils risquent d’être plus performatifs que transformateurs, et les ambitions monétaires, plus exposées aux turbulences qu’aux convergences.
Source: Seneweb.com
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