Africa-Press – Senegal. Le cerveau est sans doute l’organe le plus important du corps : ce n’est pas pour rien que l’évolution l’a protégé avec un casque osseux, le crâne. Mais malgré cette protection, il n’est pas à l’abri des lésions, lors des accidents de la voie publique par exemple. Ces traumatismes crâniens peuvent avoir des conséquences à long terme sur les capacités cognitives, affectant la mémoire et la concentration entre autres, à cause de défauts d’activation de certaines zones du cerveau.
Pour les réactiver, des chercheurs de l’Université de Stanford aux États-Unis ont utilisé la stimulation cérébrale profonde, où une sonde implantée dans le cerveau le stimule avec un courant électrique. Leur étude, publiée le 4 décembre 2023 dans le journal Nature Medicine, montre que cette approche répare les capacités cognitives des personnes ayant subi un traumatisme crânien modéré ou sévère.
Des séquelles handicapantes au niveau professionnel et personnel
Sur le court terme, ces traumatismes crâniens causés par de forts impacts à la tête peuvent entraîner des commotions ou des contusions cérébrales, alors que les chocs les plus puissants peuvent causer des comas profonds, voire la mort cérébrale. Même les impacts modérés peuvent entraîner des pertes de connaissance pouvant durer plusieurs heures et des amnésies pendant une semaine. Ainsi que des conséquences à long terme, notamment avec des baisses du niveau cognitif et des troubles de l’humeur.
C’est par exemple le cas de Gina Arata, une des participantes de cette étude. Elle a eu un accident de voiture en 2001, alors qu’elle finissait une licence et s’apprêtait à intégrer une école de droit.
L’impact lui a laissé des séquelles significatives, avec des problèmes de mémoire et de concentration, qui ont mis fin à ses ambitions académiques. “J’oubliais tout, je tombais tout le temps, j’avais plein d’accidents de la route, et je m’énervais pour un rien”, révèle-t-elle dans un communiqué. Elle a intégré l’essai clinique de l’Université de Stanford en 2018, avec des résultats immédiats : “Depuis je n’ai plus d’amendes à cause d’excès de vitesse, je ne chute plus, je peux me rappeler de combien d’argent j’ai dans mon compte bancaire, et je peux lire à nouveau et me souvenir de ce que j’ai lu, se réjouit-elle. Et je ne m’énerve plus aussi facilement.”
Stimuler le cerveau pour rallumer les lumières
Ce résultat très encourageant a été obtenu grâce à la stimulation cérébrale profonde, avec un implant qui stimule le thalamus, une structure au centre du cerveau qui connecte différentes zones de cet organe.
Les chercheurs avaient remarqué que chez ces patients victimes de traumatismes crâniens, l’intensité de ces connexions était affaiblie. “Chez ces patients, ces chemins sont intacts, mais les connexions sont atténuées, comme si on avait baissé la puissance du courant électrique”, explique le neurochirurgien Jaimie Henderson, auteur de l’étude. Le but de la stimulation était donc de redonner de la puissance à ces connexions.
Six patients, âgés de 22 à 60 ans, avec des séquelles cognitives à long terme (plus de 2 ans) à cause d’un traumatisme crânien, ont reçu un de ces dispositifs. La localisation et l’intensité de la stimulation étaient spécifiques à chaque patient, grâce à la modélisation virtuelle de chacun de leurs cerveaux.
Les participants recevaient la stimulation électrique 12 heures par jour, pendant 90 jours. À la fin de cette période de stimulation, tous les patients présentaient une augmentation de leurs capacités cognitives d’environ 32 %. Avec notamment une hausse supérieure à 40 % pour les deux participants les plus atteints par leurs traumatismes crâniens.
Une partie des patients ont montré en plus une diminution de leur sensation de fatigue chronique et une hausse de leur capacité de concentration. Comme pour Gina, ces améliorations avaient des répercussions favorables dans leurs vies personnelles et professionnelles. Deux des participants ont récupéré partiellement leur capacité à travailler et ont pu reprendre des activités sociales qu’ils ne pouvaient plus faire depuis leurs traumatismes.
Après ces 90 jours, les chercheurs ont éteint la stimulation chez un des participants, ce qui a causé une baisse significative de ses performances.
Une technique prometteuse, mais perfectible
En revanche, les participants ont présenté plusieurs effets non désirables après l’implantation du dispositif. Un d’entre eux a développé une infection du cuir chevelu au site de l’insertion du dispositif, qui a dû être retiré.
Un autre présentait des douleurs du dos, du cou et de la tête. Les chercheurs ont soupçonné une méningite et ont traité cette infection, faisant disparaître ces symptômes au bout d’une semaine. Et un troisième patient a développé des difficultés d’organisation et planification, ainsi que des troubles légers de la mémoire, qui ont duré deux mois.
Mais les chercheurs sont encouragés par leurs résultats et se montrent confiants : “C’est un moment précurseur, notre but maintenant est d’en faire une thérapie, et on a suffisamment de signaux positifs pour nous pousser à faire tous les efforts nécessaires”, s’enthousiasme Nicholas Schiff, neurologue à l’Université de Cornell et co-auteur de l’étude. En attendant, pensez à protéger votre cerveau.
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