Marième Soumaré
Africa-Press – Senegal. Plusieurs ex-membres du Parti démocratique sénégalais (PDS) ont annoncé mercredi la création d’un « cadre de concertation », mais celui-ci a été snobé par leur formation d’origine. Ils appellent leurs compagnons à s’unir au second tour de l’élection.
« Nous appelons à la réalisation de l’unité de la famille libérale, dont le père fondateur est Abdoulaye Wade. » Dans l’assemblée, quelques applaudissements polis accompagnent la déclaration du ministre Modou Diagne Fada. S’il est bien une chose sur laquelle les anciens du Parti démocratique sénégalais (PDS) seront toujours d’accord, c’est leur attachement indéfectible au président-fondateur.
Ils étaient réunis ce mercredi 13 mars, se donnant du « grand frère » et du « camarade », pour annoncer la création d’un « cadre de concertation des libéraux et démocrates ». »Pour que tout le monde puisse se retrouver dans un cadre unique », a précisé le ministre des Mines, Oumar Sarr, qui avait rejoint Macky Sall en 2020. Assise à ses côtés, la ministre Thérèse Faye Diouf, fidèle du chef de l’État, était venue représenter le parti présidentiel.
Dans une courte déclaration lue à la presse, Modou Diagne Fada a lancé un « appel à tous les partis, mouvements et personnalités d’obédience libérale du Sénégal » à rejoindre le mouvement, qui comprend déjà des anciens du PDS passés à la majorité et Rewmi, le parti d’Idrissa Seck, candidat à la présidentielle du 24 mars.
« Sauvegarder les acquis démocratiques »
Une union destinée à « sauvegarder les acquis [démocratiques] », a ajouté Modou Diagne Fada, dénonçant « les menaces induites par le populisme et le fondamentalisme » – une allusion à peine voilée au Pastef et à son candidat, Bassirou Diomaye Faye, libéré jeudi soir dans la liesse aux côtés de son mentor Ousmane Sonko, que d’anciens responsables du PDS, comme Cheikh Dieng ou l’ex-député Toussaint Manga, ont récemment rallié.
La « grande famille libérale », qui s’est progressivement reconstituée autour de Macky Sall au détriment du PDS, pourrait-elle achever de se recomposer à la veille du scrutin ? Ces retrouvailles avaient été théorisées par Abdoulaye Wade lui même, au lendemain de sa défaite en 2012 – à la différence près qu’il s’imaginait alors au centre du jeu. Lors du dialogue national convoqué par Macky Sall fin février, plusieurs anciens ministres libéraux s’étaient bousculés au portillon pour participer aux discussions, tenues en l’absence de la quasi-totalité de l’opposition.
Bien qu’il ait joué un rôle majeur dans la crise politique provoquée par le report de la présidentielle, le PDS était le grand absent du raout libéral organisé le 13 mars. « Il a été contacté à travers ses responsables. Nous ne désespérons pas qu’il nous rejoigne », a assuré Modou Diagne Fada. Quant à ceux qui avaient répondu présents, ils ont refusé de se prononcer sur les déclarations de leurs anciens camarades, qui tentent encore de faire annuler le scrutin du 24 mars et d’obtenir le retour de Karim Wade dans la course.
Et tous les moyens sont bons. Le 13 mars, le PDS a ainsi annoncé vouloir saisir la justice au sujet de faits de corruption reprochés à Amadou Ba, le candidat de la majorité sortante, et à deux juges du Conseil constitutionnel.
Il s’appuie notamment sur des audios non authentifiés, qui circulent sur les réseaux sociaux depuis plusieurs jours. Ils sont attribués à Amadou Ba, au président du Conseil constitutionnel, Mamadou Badio Camara, et à l’un de ses juges, Cheikh Ndiaye. Ce dernier a déjà déposé une plainte pour diffamation et outrage à magistrat en janvier, lorsque de telles accusations ont pour la première fois été portées contre lui.
Protestant contre la « scandaleuse décision du Conseil constitutionnel » qui a exclu Karim Wade de la liste des candidats à la présidentielle, le PDS a par ailleurs appelé à sa dissolution. « Nous n’accepterons pas que le Sénégal se dirige vers des échéances électorales marquées par des suspicions et des doutes, sous la gouvernance d’un organe dont l’intégrité des membres est sérieusement mise en question », a-t-il fait savoir.
Audience à la Cour suprême vendredi
Surtout, le PDS et certains de ses alliés ont déposé une requête devant la Cour suprême visant à annuler le décret présidentiel fixant l’élection au 24 mars pour excès de pouvoir et violation du code électoral. En dépit de ce que prédisaient certains juristes, la Cour s’est déclaré compétente pour statuer sur l’affaire.
En attendant de savoir ce qui sera décidé ce vendredi, les ex-libéraux n’écartent pas la possibilité de s’allier au second tour. « Nos premiers objectifs ne sont pas électoraux, a néanmoins défendu Modou Diagne Fada, d’autant plus que nous avons déjà choisi nos candidats. »
Ces candidats, ce sont Idrissa Seck et Amadou Ba. Le rejet mou du report de l’élection présidentielle du premier a contrasté avec la vive mobilisation des autres candidats de l’opposition. Idrissa Seck a débuté sa campagne électorale par trois jours de visite aux dignitaires religieux dans son fief de Thiès.
Amadou Ba, quant à lui, a été confirmé in extremis par Macky Sall à dix jours du vote. Le candidat a été forcé de mettre en pause sa campagne, boycottée par une partie de son propre camp, pour solliciter le soutien du président. « Nous n’avons qu’un seul candidat et c’est Amadou Ba », a insisté ce mercredi Oumar Sarr, qui s’apprêtait à le rejoindre dans son fief de Dagana.
En dépit de ces assurances, la campagne électorale se déroule dans une ambiance inhabituelle, voire inédite, marquée autant par le ramadan que par l’imprévisibilité des coups de théâtre politiques. Beaucoup de responsables se disent ainsi suspendus à la décision de la Cour suprême, qui a accepté de statuer en urgence sur les requêtes déposées par le PDS. L’audience est prévue vendredi matin.
Source: JeuneAfrique.com
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