Cauchemar Sénégalais: L’Urgence D’Un Sursaut

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Cauchemar Sénégalais: L’Urgence D’Un Sursaut
Cauchemar Sénégalais: L’Urgence D’Un Sursaut

Adama NDIAYE

Africa-Press – Senegal. Le Sénégal vacille à un tournant décisif de son histoire, au bord d’un précipice. Un regard lucide sur l’actualité internationale, les dynamiques sous-régionales et les soubresauts des débats internes suffit pour mesurer l’ampleur de ce moment charnière. Pourtant, alors que l’incertitude économique fragilise le pays et que la menace djihadiste, solidement ancrée dans le Sahel, guette les nations côtières, le Sénégal souffre d’une élite politique, intellectuelle et médiatique d’une médiocrité sans précédent. Incapable de se hisser à la hauteur des enjeux, cette élite semble avoir abdiqué l’intérêt général au profit de calculs personnels, d’allégeances partisanes et de petites boutiques politiciennes. Où sont les grandes voix qui, jadis, portaient des principes immuables? Aujourd’hui, les querelles mesquines, les postures intéressées et l’absence d’autocritique dominent un paysage où la vérité est reléguée au second plan.

D’un côté, les partisans d’Ousmane Sonko incarnent un paradoxe troublant. Leur ferveur évoque ce passage biblique: des hommes “qui ont des yeux pour voir et ne voient point, des oreilles pour entendre et n’entendent point”. Pour beaucoup, il ne s’agit pas d’un manque de perception, mais d’un refus délibéré de reconnaître ce que les mots et les actes de leur leader révèlent. Nul besoin de dépoussiérer d’antiques verbatim pour illustrer ce constat. À deux reprises, récemment lors de son séjour en Chine et jeudi dernier, le Premier ministre a exprimé une fascination inquiétante pour le modèle chinois. Si les réalisations du peuple chinois forcent l’admiration, la Chine demeure un régime à parti unique, où le suffrage universel est inexistant. En déclarant que le PASTEF pourrait rester au pouvoir pendant 50 ans en s’inspirant du bilan du Parti communiste chinois, Sonko semble ignorer – ou feindre d’ignorer – que ce modèle repose sur l’absence de pluralisme. Cette rhétorique, alliée à son aversion déclarée pour les juges (qu’il accuse, à l’image d’Éric Zemmour, d’incarner une “République des juges”), son mépris des médias critiques, sa défiance envers les corps intermédiaires et son dédain pour la société civile, esquisse le portrait d’un leader dont l’attachement à la démocratie apparaît fragile. Plus troublant encore est l’aveuglement de certains de ses soutiens – je ne parle pas ici de la cohorte de néo-SA 2.0 qui patrouillent sur les réseaux sociaux pour traquer toute parole jugée blasphématoire contre le “Suprême Leader”. Je pense à ceux que je sais être des démocrates sincères, épris de liberté, mais qui, pour des raisons insondables, refusent de voir dans ses discours une menace pour les valeurs qu’ils chérissent. Et lorsque des voix s’élèvent pour alerter, ou simplement questionner ces dérives, elles sont taxées de “haineuses”, comme si critiquer était un crime.

Face à ce tableau, l’absence d’une opposition crédible est d’autant plus navrante. Les vestiges de l’ancien régime, discrédités par les révélations des audits et le saccage des finances publiques, n’offrent aucune perspective viable. Les Sénégalais, sauf à verser dans le masochisme, ne peuvent compter sur ces acteurs pour redresser le pays. Quant aux autres figures de l’opposition, elles déçoivent par leur manque de sérieux. Trop souvent, elles imitent les pires travers du PASTEF d’antan, s’alliant à des activistes ou “chroniqueurs” outranciers, et adoptant une stratégie de déstabilisation permanente, où la bassesse rivalise avec l’ignominie. S’opposer dignement, avec fermeté et des idées, reste possible sans verser dans l’humiliation ou la surenchère. Mais cette voie semble oubliée.

Le Sénégal est donc mal parti. L’horizon manque cruellement de motifs d’optimisme, d’autant que le désert politique s’accompagne d’une indigence intellectuelle alarmante. Comme le soulignait Hannah Arendt dans La Crise de la culture, “lorsque les intellectuels se réfugient dans l’abstraction et négligent le monde tel qu’il est, ils abandonnent leur devoir de penser les crises de leur temps”. Cette observation résonne avec une acuité douloureuse au Sénégal d’aujourd’hui. Où sont les penseurs capables de descendre de leur Olympe intellectuel pour s’emparer du réel et affronter les enjeux brûlants du moment? Trop d’intellectuels sénégalais, aveuglés par leur suffisance ou figés dans des débats théoriques déconnectés, refusent de prendre à bras-le-corps les crises sécuritaires et économiques qui menacent le pays. Leur incapacité à proposer des idées audacieuses et à défendre des principes intangibles est une tragédie dans un contexte où le Sénégal a désespérément besoin de vision et de courage.

Source: Seneweb.com

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