Africa-Press – Tchad. C’est un mois de septembre 2025 particulièrement studieux pour le Parlement tchadien. En effet, le 2 septembre, le président de l’Assemblée nationale était saisi d’un « projet de modification technique de la Constitution ». 3 jours plus tard, l’Assemblée nationale votait pour la création d’une commission spéciale chargée de l’examen de ce projet de loi.
En 10 jours de réunions successives, le texte de loi était prêt et le 15 septembre, il a été adopté plus facilement qu’une lettre ne passe à la poste: 171 pour ; 01 contre ; 00 abstention.
Qui dit mieux? Le gouvernement aura été plus que convainquant dans l »exposé des motifs qui condamnent la Constitution de décembre 2023. Elle aura régi les institutions de la 5e République tchadienne pendant moins de 2 ans. Encore faut-il que l’étape du Sénat soit franchie tout aussi allégrement que celle de l’Assemblée nationale pour que l’essai de la modification constitutionnelle soit totalement transformé lors de la réunion du Congrès, députés et sénateurs, prévue le 13 octobre 2025.
Si oui, l’affaire aura été bouclée en 1 mois. Vite fait bien fait, ce que le gouvernement tchadien appelle « modification technique de la Constitution pour donner plus de fluidité à la vie des institutions républicaines ». Pour une fluidité, les concepteurs de la nouvelle Constitution ont vu large avec une rallonge du mandat présidentiel qui passe de 5 à 7 ans avec une redéfinition du rôle du chef de l’Etat qui « n’est plus qu’un simple arbitre de la vie institutionnelle ».
Il va concentrer plus de pouvoirs entre ses mains, sans abandonner la direction de son parti, tandis qu’un vice-Premier ministre, nouveau poste à créer, viendra rogner ceux du Premier ministre. La nouvelle Constitution prévoit par ailleurs la création d’une nouvelle institution le Médiateur de la République, et une harmonisation de la durée des mandats des députés, des sénateurs et des élus locaux à 6 ans.
Par ailleurs, la nouvelle loi fondamentale prévoit « une pause estivale » pour l’Exécutif. En français facile, les membres du gouvernement auront droit à un congé payé, pris ensemble, pour une durée qui reste à préciser.
On se gardera d’ergoter sur ce détail qui consiste à dire dans une Constitution que les membres de l’exécutif ont droit à des vacances pour faire remarquer que le président Mahamat Deby Itno veut un régime semi-présidentiel robuste ou semi-parlementaire modéré. Il confirme ainsi sa mainmise légale sur les leviers du pouvoir au Tchad après la succession dynastique aux allures de putsch suite à l’assassinat d’Idriss Deby Itno en avril 2021. Quelque 15 mois après que cette prise de pouvoir par les armes en 2021 a été légitimée par les urnes, il se sent à l’étroit dans le quinquennat et travaille à l’élargir en septennat.
A-t-on besoin d’une boule de cristal pour subodorer que le débat sur la rétroactivité de cette nouvelle Constitution va s’inviter au Tchad. En effet, élu pour 5 ans en 2024, selon l’ancienne Constitution, Mahamat Deby Itno doit-il remettre son mandat présidentiel en jeu en 2029? Ou bien doit-il jouir du bonus de 2 ans que lui confère la nouvelle Constitution. Pire, à la fin de son quinquennat en cours, va-t-il, au bénéfice de la nouvelle Constitution, affirmer qu’il a encore droit à 2 septennats?
On n’en est pas encore là, mais force est de constater que sous nos démocraties pis-aller, les modifications de Constitutions ont toujours engendré ces débats, jamais tranchés en faveur de la non-rétroactivité et pour l’alternance, du moins pacifiquement. Qu’en sera-t-il au Tchad quand on sait que les chiens ne font pas de chats, pour ne pas dire que les Itno Deby ne font pas des Nelson Mandela? Le septennat en téléchargement pourrait être le prémisse d’un pouvoir ad vitam.
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