Africa-Press – Togo. Après vingt (20) années de pouvoir marqué par l’impunité, la corruption croissante et un endettement public vertigineux, Faure Gnassingbé a créé de toute pièce une nouvelle constitution au sein de laquelle il s’est d’une part taillé un bon costume de « Président de conseil des ministres » à vie et, d’autre part, a inventé un poste de Président de la République vidé de tout pouvoir. Mais que réserve le nouveau monarque aux Togolais?
Au moment où Faure Gnassingbé se faisait déposer sur le fauteuil présidentiel en 2005 par une petite frange de l’armée togolaise juste après le décès de son père, de nombreux observateurs avaient alerté sur la propension de cet héritier à faire comme son géniteur, c’est-à-dire régner ad vidertam. 20 ans plus tard, tous ceux qui, à l’époque sous une « fausse bannière » de politiciens modérés, appelaient à accorder le bénéfice du doute à Faure Gnassingbé, cherchent désormais à disparaître par le trou d’une fourmi.
Le fils du Général Gnassingbé Eyadéma vient de prouver aux yeux du monde entier qu’il est déterminé à demeurer au pouvoir contre vents et marées en passant par tous les moyens y compris les voies illégales.
Depuis le mois de décembre 2023 qui marquait la fin du mandat des députés élus en 2018, le régime sexagénaire du Togo a élaboré une stratégie pour violer la souveraineté des Togolais en leur imposant une nouvelle constitution, instituant un régime parlementaire en matière de gouvernance.
Et selon Faure Gnassingbé et sa minorité, le Togo est rentrée dans un système au sein duquel l’élection du Président de la République au suffrage universel est supprimée. Désormais Faure Gnassingbé devient président du conseil des ministres en conservant tous ses pouvoirs d’antan et un vieil homme du nom de Jean-Lucien Savi de Tové est nommé Président de la République, titre honorifique.
La manière dont Faure Gnassingbé a réussi à s’accorder un règne à vie ne présage rien de bon pour le peuple togolais. Il est sûr et certain que le « pire » de la gouvernance Faure Gnassingbé reste à venir. Et ceci pour des raisons évidentes.
De 2005 à 2025, même si c’est un secret de polichinelle que toutes les élections sont toujours truquées par le régime en place, Faure Gnassingbé était menacé par une éventuelle sanction à travers le vote populaire dans des élections présidentielles. Il lui fallait également, au minimum, réfléchir à des projets trompeurs à mettre en avant afin de baratiner la communauté internationale sur sa « vision illusoire » de développement du Togo, les Togolais eux-mêmes n’ayant plus aucune confiance en lui.
Malgré cette « éventuelle épée de Damoclès » qui pendait sur la tête de Faure Gnassingbé, ce dernier ne s’est jamais préoccupé d’impulser un développement véritable et sérieux au Togo. Bien au contraire, aidé par une petite minorité issue de la vieille garde de son père et d’anciens « potes » d’adolescence, le chef de l’Etat togolais a passé les deux décennies à multiplier des projets économiques qui, en réalité, sont destinés à alourdir la dette publique et gonfler les comptes en banque de cette minorité.
En 20 ans, le régime RPT/UNIR incarné par Faure Gnassingbé n’a pas réussi à moderniser les Centres Hospitaliers Universitaires du Togo qui au demeurant sont plutôt en pleine décadence. Aucune université de rang n’a été construite. Il n’y a ni d’infrastructures routières ni de complexe sportif moderne, sortis de terre.
Bien au contraire, les grands marchés des grandes villes du pays sont partis en cendre jetant les dynamiques femmes commerçantes togolaises dans la misère. Les quartiers non inondables dans le temps, deviennent désormais des lagunes en saison pluvieuse. Les entreprises privées progressivement cessent leurs activités et mettent au chômage les Togolais sous la lourde pression fiscale de l’Office Togolais des Recettes (OTR) dont les dirigeants vivent dans l’opulence.
Il convient de noter que ce sombre tableau du bilan de Faure Gnassingbé s’est dessiné à une période où on pouvait noter une relative sagacité de la société civile togolaise et un exercice, quoique difficile, des droits politiques notamment les libertés de se réunir, de s’exprimer et de manifester.
Désormais, dans la 5ème République de Faure Gnassingbé, celui-ci s’est soustrait au vote populaire en supprimant l’élection présidentielle au suffrage universel. Le nouveau monarque n’est plus contraint de présenter au peuple togolais un programme électoral ou du moins un projet social devant motiver ou justifier son maintien au pouvoir.
En guise de preuve, le 03 mai, il est apparu pour prêter serment et a aussitôt disparu pour laisser ses laquais finir la comédie qu’il a pris le temps de mettre en scène.
Pire, le régime RPT/UNIR est devenu totalement réfractaire aux voix contradictoires et a réussi à inféoder la justice et les autres institutions de la République à ses projets liberticides. Il s’ensuit que les opposants politiques sont jetés en prison ou envoyer en exil tout comme les journalistes indépendants, les OSC et les partis politiques empêchés de mener librement leurs activités sur tout le territoire.
Dans ces conditions, il faut bien déduire que Faure Gnassingbé est désormais plus libre de gouverner comme bon lui semble. L’expérience des 20 précédentes années laisse présager une poursuite de la corruption à tous les niveaux, une promotion de l’impunité pour les délinquants à col blanc, un endettement public irréfléchi et une instrumentalisation de la justice contre le peuple souverain.
L’horizon de la 5ème république de Faure Gnassingbé est foncièrement sombre pour le peuple togolais.
Kossi Lamba
Source: lalternative.info
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