Africa-Press – Togo. Je me permets de vous écrire suite à votre récente intervention sur la chaîne New World TV dans un entretien exclusif du 24 Juin 2025 dernier. Je tiens à saluer votre éloquence et votre fidélité au Président du Conseil. J’ai écouté avec une attention particulière vos propos, notamment votre affirmation selon laquelle la responsabilité de l’État, des forces de l’ordre et de l’appareil judiciaire est de faire respecter la loi.
Je souscris pleinement à cette affirmation et je suis convaincu que toute la jeunesse togolaise partage ce souhait de voir nos institutions assumer pleinement leurs responsabilités et faire respecter la loi. Comme vous le savez, nul n’est au-dessus de la loi, et cette dernière est encadrée en premier lieu par notre Constitution.
Cependant, il est alarmant de constater que ces mêmes institutions, censées maintenir et faire respecter la loi, sont parfois elles-mêmes impliquées dans des violations. Par exemple, des arrestations sont effectuées en dehors du cadre légal, de nuit ou sans informer le Procureur de la République, comme dans le cas d’Aamron, pour lequel, à ma connaissance, il n’y a eu ni plainte ni mandat d’arrêt. De plus, plusieurs corps de jeunes Togolais ont été retrouvés dans les lagunes de Lomé, et au moins sept morts liés aux affrontements ont été recensés (cf. dépêche AFP). Un jeune de 14 ans a même perdu la vie, bien qu’il n’ait pas participé aux manifestations. D’autres ont été violemment agressés à leur domicile par des individus armés en tenue militaire, sans présentation, mandat, ni explication.
Depuis ces événements, aucun membre des forces de l’ordre et de sécurité n’a pris la parole pour expliquer aux citoyens l’origine de ces dérives, qui ne respectent en rien la loi. Cela démontre un manque à leur devoir d’assurer la sécurité des personnes et des biens sur l’ensemble du territoire togolais.
Selon l’article 58 de la Constitution du 14 octobre 1992, le Président de la République est le garant du respect de la Constitution. L’article 59 stipule que « le Président de la République est élu au suffrage universel, libre, direct, égal et secret pour un mandat de cinq ans renouvelable une seule fois. Cette disposition ne peut être modifiée que par voie référendaire. » Cet article prévaut donc sur l’article 144, qui stipule que « le projet ou la proposition de révision est considéré comme adopté, s’il est voté à la majorité des quatre cinquièmes (4/5) des députés composant l’Assemblée nationale. » Bien que des débats juridiques soient toujours possibles, l’article 59 reste clair. Un référendum constitutionnel suppose l’implication totale et transparente de la population, ce qui n’a pas été le cas.
Nos ambitions ne sont pas de faire de la politique, mais la politique est au cœur du développement d’un pays et de son peuple. Nous constatons simplement que beaucoup de nos dirigeants semblent détachés des réalités du peuple, ne manifestant pas toujours d’amour ou d’empathie réelle pour celui-ci. Peut-être est-ce là une dérive de l’individualisme
moderne, qui touche toute société. Avant la colonisation, nos communautés n’avaient pas ces valeurs d’individualisme.
Je voudrais, par cette lettre, vous faire comprendre que la jeunesse togolaise n’est pas dupe. Nous sommes l’avenir du Togo, et vous devriez être fier d’avoir une génération de jeunes qui s’interrogent sur la gestion et l’avenir du pays. C’est une cause noble et salutaire de voir que nous, jeunes, ouvrons enfin les yeux sur ce que devrait être un pays bien gouverné et un état de droit. Je vous exhorte à faire confiance à nos capacités une bonne fois pour toute.
Enfin, je vous prie de bien vouloir considérer votre parole selon laquelle la responsabilité de l’État, des forces de l’ordre et de sécurité, et de l’appareil judiciaire est de faire respecter la loi, et de veiller à ce que cela soit effectif dans notre pays.
Vive la République,
Que Dieu bénisse le Togo.
Bien à vous,
Matthieu ABALO, Auteur-réalisateur, Artiste Interprète, Membre de la FEPACI,
Membre de la SACD, Membre du BUTODRA.
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