Cameroun : Camwater veut sortir la tête de l’eau

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Cameroun : Camwater veut sortir la tête de l’eau
Cameroun : Camwater veut sortir la tête de l’eau

Africa-Press – Cameroun. La campagne de recouvrement des créances a débuté le 1er novembre. En jeu : plus de 32 milliards de francs CFA (près de 49 millions d’euros) à récupérer chez des clients de tout acabit, dont l’administration centrale. Une manne sur laquelle compte le nouveau DG de la Cameroon Water Utilities (Camwater), Blaise Moussa, 48 ans, pour redonner un peu d’oxygène à l’entreprise.

Dès le lendemain de sa désignation, à la fin du mois de septembre, cet inspecteur des impôts recevait un milliard de F CFA du ministre des Finances, Louis Paul Motaze, dont la moitié était destinée à désamorcer la grève qui se profilait en réglant une partie des avantages réclamés par les syndicats. « En plus de trois semaines, 4 milliards de F CFA avaient déjà été mis à sa disposition, pour notamment calmer des fournisseurs », glisse un cadre du ministère des Finances. De bonnes dispositions de Yaoundé à l’endroit du nouveau management, tant les rapports de Gervais Bolenga, l’ex-patron et protégé du secrétaire général de la présidence, Ferdinand Ngoh Ngoh, avec ses ministres de tutelle – Motaze et le ministre de l’Eau et de l’Énergie, Gaston Eloundou Essomba – s’étaient détériorés.

Masse salariale importante

Ce coup de pouce gouvernemental ne suffira toutefois pas à résorber le déséquilibre financier du producteur d’eau. Ses recettes mensuelles oscillent entre 2 milliards et 2,5 milliards de F CFA, tandis que ses charges représentent le double de ce montant. L’une des préoccupations porte sur les quelque 1 500 employés, dont la masse salariale absorbe plus de 40 % du chiffre d’affaires, qui tournait autour de 40 milliards de F CFA en 2020, pour un bénéfice de 1,3 milliards de F CFA.

Les deux grandes métropoles que sont Yaoundé et Douala ont besoin chacune de 300 000 m3/jour. Mais, la moitié est à peine produite

À cela s’ajoute le fait que les tarifs, dont l’augmentation est soumise à l’autorisation de Yaoundé, restent bloqués depuis une décennie et l’État ne fait pas montre d’assiduité pour combler le manque à gagner (différence entre le coût de revient du mètre cube et le tarif) résultant de ce blocage, qui aurait dû être supporté par le consommateur. De fait, le recouvrement des impayés constitue donc l’une des pistes. L’autre étant de réduire drastiquement la fraude, à défaut d’en venir à bout.

Le principal défi est surtout technique. Le rendement de production, de l’ordre de 95 %, est certes satisfaisant. Mais les 96 stations de traitement et 32 stations de reprise ne fonctionnement pas toujours de manière optimale. « Elles tombent régulièrement en panne ou sont momentanément à l’arrêt à cause des coupures intempestives de l’énergie électrique », glisse une source interne.

La difficulté provient surtout de la distribution, dont le rendement se situe actuellement à 48 %, et qu’il faudrait porter à pratiquement 80 % pour retrouver l’équilibre. Pratiquement la moitié du liquide traité et produit n’atteint pas le consommateur, signe de l’état de vétusté d’un réseau cinquantenaire. Pour satisfaire le besoin journalier des 500 000 clients, il faut doubler la capacité installée de 824 456 m3/jour, en augmentant notamment celle de stockage, pour le moment limitée à 267 834 m3. « Les deux grandes métropoles que sont Yaoundé et Douala ont besoin chacune de 300 000 m3/jour. Mais, la moitié est à peine produite », ajoute notre source.

Problème de gouvernance

Ambitieux, Blaise Moussa se propose de doubler le nombre d’abonnés, grâce entre autres à une intense campagne de branchements au réseau, et surtout la reprise des investissements. Il doit pour ce faire convaincre certains bailleurs, à l’instar de l’AFD (Agence française de développement), de débloquer des fonds momentanément gelés. « Le problème fondamental de cette entreprise publique depuis une décennie est sa gouvernance, avec des dirigeants pas toujours disposés à répondre aux problèmes de secteur », tranche un haut fonctionnaire, ancien membre du conseil d’administration.

Mais le nouveau DG devra surtout traiter la dette commerciale de Camwater, qui s’élevait à plus de 460 milliards de F CFA à la fin de 2020. « Il faut relever que la solvabilité et la liquidité ne sont pas garanties en raison de l’important endettement », s’inquiétait la Commission technique de réhabilitation (CTR) des entreprises et établissements publics au Cameroun. Ironie du calendrier, une délégation de cette structure rattachée au ministère des Finances, pilotée par Martial Valéry Zang, a séjourné le 28 octobre au siège de la Camwater, à l’invitation de Blaise Moussa, pour poser les jalons d’une évaluation de sa viabilité économique, financière et technique.

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