Cameroun : Hayssam el Jammal, une couronne en acier trempé

62
Cameroun : Hayssam el Jammal, une couronne en acier trempé
Cameroun : Hayssam el Jammal, une couronne en acier trempé

Africa-Press – Cameroun. Le sourire émerge d’un visage bouffé par une barbe poivre et sel et coiffé par un casque en cette matinée du 13 juin. La chasuble vert fluo masque l’objet du rassemblement : la médaille de l’ordre national de la Valeur que Hayssam el Jammal vient de se voir épingler par Gabriel Dodo Ndoke, le ministre camerounais des Mines et de l’Industrie. Une distinction « à titre exceptionnel » que le président Paul Biya attribue en reconnaissance de la contribution de l’entrepreneur à l’industrialisation du Cameroun. « Une invitation à travailler davantage et à faire chaque jour toujours mieux, notamment grâce au cadre incitatif des investissements mis en place par les autorités camerounaises et la politique d’import-substitution implémentée par le gouvernement », reconnaît l’intéressé.

En une décennie, ce discret quinquagénaire, arrivé au Cameroun à l’âge de 7 ans, descendant d’une famille d’entrepreneurs franco-libanais, dont le grand-père s’installe au Sénégal au début du siècle dernier, a réussi à faire de Prometal le leader de l’industrie de la sidérurgie-métallurgie de son pays d’adoption. Au point de contrôler aujourd’hui plus de la moitié du marché camerounais de l’acier, aux côtés de deux autres acteurs.

Changement technologique en fonderie

« Notre objectif principal était de produire localement des matériaux de construction conformes aux standards internationaux. Nous avons par conséquent, sur la base d’un cahier de charges avec le gouvernement, réalisé de gros investissements. Et ensuite opté pour une diversification de nos produits en adéquation avec les besoins du marché », explique le « roi de l’acier », plutôt avare en paroles. Il se réjouit d’avoir pris part à la construction d’infrastructures marquantes des dernières années, comme le stade de Japoma et le deuxième pont sur le Wouri à Douala, la capitale économique camerounaise, ou des barrages en cours d’édification.

Le complexe qu’il a bâti, et continue d’étendre dans la zone industrielle de Bassa à Douala, le prouve. Au sein de ce pôle, se regroupent des métiers dont certains n’existaient pas au démarrage de l’entreprise, à l’instar de la fusion de l’acier, le laminage à chaud, le fil machine, les laminés marchands et le profilage. Le changement technologique opéré en matière de fonderie a permis de passer du four à induction de l’usine Prometal1 – où débuta l’aventure industrielle en 2010 – au four à arc électrique de Prometal3, décuplant la productivité (les billettes qui en sortent permettent de produire du fer à béton et des aciers de gros calibre poutrelles ; cornières, fils machine) jusqu’à Prometal4, entrée en activité en début d’année. « Nous avons inversé la tendance sur ces produits dont 80 % étaient importés. À ce jour, nous couvrons, à plus de 120 % de capacité, la demande nationale et régionale du fer à béton et des fils machines, et plus de 90% des produits en acier sont produits par Prometal », explicite un cadre de l’entreprise.

Prometal2, quant à elle, s’est spécialisée dans l’outillage agricole (machettes, brouettes, pelles…) et d’autres matériaux de construction (tubes, pointes, tôles, fils recuits et barbelés). Cet écosystème, fruit d’un investissement de plus de 150 milliards de F CFA, mobilise plus de 1 200 personnes, dispose d’une capacité de production de 300 000 tonnes de produits en acier et met 68 articles sur les marchés local et sous régional.

Prochain objectif, permettre au Cameroun d’économiser environ 8 milliards de F CFA, une somme déboursée chaque année pour importer 400 000 bouteilles de gaz butane et des charpentes métalliques, grâce à Prometal5 qui débutera en fin d’année pour une capacité de production de 600 000 bouteilles et 6 000 tonnes de structures métalliques, tout en procurant 250 emplois. « Ce projet reflète assez bien la logique du groupe qui consiste à saturer le marché dès qu’il se positionne sur un créneau donné », souligne un analyste.

La Zlecaf et son milliard de consommateurs

À la tête du groupe Prometal également présent dans l’agroalimentaire (Novia), la grande distribution (Orca) et l’immobilier, le patron franco-libanais, qui débuta dans l’import des matériaux avant de basculer dans l’industrie, fourmille d’autres projets dans la filière de l’acier. Des chantiers à moyen terme qu’il se garde bien de dévoiler, mais dont l’investissement tournerait autour de 100 milliards de F CFA.

« Nous sommes sur les projections minières pour une intégration complète dans la filière. Dès que nous aurons les minerais disponibles, nous investirons pour les transformer en matières premières et produits finis, via des complexes industriels susceptibles de satisfaire des besoins sur le continent », insiste Hayssam el Jammal, en comptant sur le démarrage le plus tôt possible des projets miniers, dont celui de fer de Mbalam-Nabeba, et sur la dizaine de banques locales qui l’épaule depuis le démarrage de cette épopée industrielle.

Prochain horizon, le continent, en profitant de l’opportunité qu’offre la zone de libre-échange continentale (Zlecaf) et son 1,3 milliard de consommateurs. D’ici là, Hayssam el Jammal espère qu’il aura fait le tour des métiers de l’acier.

Pour plus d’informations et d’analyses sur la Cameroun, suivez Africa-Press

LAISSER UN COMMENTAIRE

Please enter your comment!
Please enter your name here