Bruno Tagne Critique les Faux Intellectuels

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Bruno Tagne Critique les Faux Intellectuels
Bruno Tagne Critique les Faux Intellectuels

Africa-Press – Cameroun. Dans une tribune publiée ce lundi 02 juin 2025, le journaliste Jean Bruno Tagne crache ses vérités aux hommes qui débattent désormais au Cameroun, sur les choses politiques, sans explications.

« Les temps changent. Mais mal. Il fut un temps où les oppositions entre intellectuels et leaders d’opinion se réglaient à l’écrit.

Chacun affûtait sa plume pour exposer sa science, ses arguments, et en profitait pour démontrer sa maîtrise de la langue française et de ses savoureuses subtilités. Parfois, la plume était trempée dans le vitriol, mais l’échange restait digne et élégamment mordant.

Qui ne se souvient de l’affrontement épique entre les professeurs Hubert Mono Ndzana et Maurice Kamto? Le premier accusait le second d’ethnofascisme, et en réponse, ce dernier le renvoyait dans ses cordes partisanes en lui rappelant qu’un intellectuel n’est point « un faiseur de cantiques ». Ambiance.

On se remémore aussi les duels éditoriaux entre deux patrons de presse parmi les plus en vue de l’époque ; Séverin Tchounkeu et Pius Njawé. Ou encore cette mémorable joute épistolaire entre Benoît Ndong Soumhet, alors DG de l’ENAM et Célestin Monga après le décès de Pius Njawé. Comment oublier l’affrontement entre Albert Mbida et Haman Mana, ou encore l’échange cinglant entre ce dernier et sa consœur de Cameroon Tribune, Marie Claire Nnana? Et j’en oublie…

Tout cela, au-delà des arguments, donnait droit à un bel exercice de style assez jouissif, une fête du verbe et des mots dans toute leur splendeur.

Élèves, étudiants, nous lisions ces joutes avec délectation, crayon et feuille à la main, notant les bons mots, les formules percutantes (aujourd’hui on dirait punch line). Nous nous promettions alors de nous en servir dans la prochaine rédaction ou dissertation. Chaque débat enrichissait notre culture et affinait notre pensée critique.

La fin de l’expert

Mais ça, c’était avant.

Avant que le Cameroun ne découvre le bavardage cathodique bon marché, popularisé par la libéralisation de l’audiovisuel. Aujourd’hui, nos intellectuels ont cédé à la paresse. Écrire exige discipline et rigueur. Pour écrire il faut savoir écrire. Ils préfèrent désormais le confort du discours improvisé. Toute honte bue, ils se convoquent en duels de parlottes tels de tristes gladiateurs tropicaux.

Ils bavardent sans retenue, éructent des lieux communs, vocifèrent des mensonges et des approximations, abrutissent le peuple. Julien Benda parlait autrefois de « La trahison des clercs » et Pascal Boniface lui emboitera le pas plus tard en décrivant « Les intellectuels faussaires » ou « le triomphe médiatique des experts en mensonges ». Nous y sommes.

On sort rarement grandi de ces séances de radotage stérile où l’outrance la dispute à l’invective, dans un style qui court les rues ; en tout cas pas digne de l’idée qu’on se ferait d’un intello, d’un prof.

Lorsqu’on revendique le titre de professeur d’université, on est un savant ou tout au moins un expert dans son domaine. Et comme tel, un expert ne débat pas ; il explique. La vérité scientifique n’est point une opinion. C’est un fait.

Quand les politiques, les activistes, les journalistes et les citoyens ordinaires ont fini de débattre, le savant, l’intellectuel, le vrai, du haut de sa science, qui n’est point corrompue par sa quête effrénée de prébendes et de position administrative, vient y mettre fin. Il n’expose pas son opinion. Il éclaire les esprits. Parce qu’il maitrise son sujet.

Pleurons simplement pour nos enfants qui sont leurs étudiants ».

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