Africa-Press – Cameroun. L’échiquier politique camerounais connaît un séisme majeur avec la prise de position publique d’Issa Tchiroma, ministre de l’Emploi et de la Formation professionnelle. L’ancien ministre de la Communication, longtemps considéré comme l’un des plus fidèles défenseurs du régime de Paul Biya, a officiellement tourné le dos au président sortant dans une déclaration en fulfulde qui ne laisse place à aucune ambiguïté.
Dans cette intervention remarquée, Issa Tchiroma adopte un ton particulièrement dur envers celui qu’il servait jusqu’alors. Il dénonce ouvertement les « 42 ans » de gouvernance de Paul Biya et appelle ses compatriotes à « tourner la page ». Plus surprenant encore, l’ancien porte-parole du régime va jusqu’à qualifier de « bourreau » celui qu’il défendait publiquement il y a encore peu.
« Toute personne qui vous invite à voter pour une chose déjà reconnue comme étant la cause de votre mal-être, c’est lui votre ennemi », déclare-t-il sans détour. Cette phrase résonne comme un véritable désaveu de sa propre action politique passée et constitue un tournant majeur dans sa carrière.
Ce qui frappe dans cette déclaration, c’est la dimension d’autocritique assumée par Tchiroma. Il reconnaît implicitement son rôle passé de « griot » du régime et va jusqu’à retourner cette critique contre lui-même. « Même si c’est moi Tchiroma qui vous dis demain de voter pour les responsables de vos malheurs, considérez-moi comme votre ennemi », affirme-t-il, assumant pleinement sa responsabilité dans la défense d’un système qu’il dénonce aujourd’hui.
Au-delà de la rupture politique, Tchiroma dresse un tableau particulièrement sombre de la situation socio-économique du pays. Il évoque la détresse de la jeunesse camerounaise, les difficultés d’insertion professionnelle, l’échec des politiques d’emploi et l’absence d’investissements significatifs. Ces critiques, venant d’un ministre en exercice, révèlent l’ampleur de la crise de confiance au sein même de l’appareil d’État.
Cette défection majeure intervient dans un contexte pré-électoral déjà tendu. Issa Tchiroma, figure respectée dans le Nord du pays, dispose d’une influence certaine qui pourrait peser dans la balance électorale. Son appel à l’inscription sur les listes électorales et à faire « un choix audacieux » laisse présager une recomposition politique majeure.
Cette sortie fracassante d’un des piliers du régime risque d’encourager d’autres défections au sein du parti au pouvoir. Elle illustre également les tensions internes qui traversent le système politique camerounais à l’approche d’une échéance électorale cruciale.
L’impact de cette déclaration dépassera probablement le cadre strictement politique pour interroger la loyauté des autres cadres du régime et leur positionnement face à un président dont le mandat s’étend depuis plus de quatre décennies.
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