Africa-Press – Cameroun. Le Syndicat National des Journalistes du Cameroun (SNJC) a exprimé jeudi sa « plus vive indignation » suite à l’interruption brutale d’une émission télévisée par les forces de l’ordre, dans une déclaration signée par son président Yanick Bezang.
Les faits se sont déroulés le jeudi 7 août 2025 sur la chaîne de télévision privée STV. Selon la déclaration du SNJC, un groupe composé de plusieurs gradés de la police accompagnés d’une autorité administrative en civil a fait irruption dans les locaux de diffusion au moment de la programmation de l’émission « Entretien avec… », qui devait recevoir l’ancien cadre du Manidem, M. Dieudonné Yebga.
D’après une source interne citée par le syndicat, ces agents sont entrés jusqu’au centre de diffusion et ont exigé l’interruption immédiate du programme, sans présenter d’ordre de mission ni aucun document officiel. L’émission a été interrompue et remplacée par un programme alternatif, créant une situation inédite dans l’histoire récente des médias camerounais.
Le Bureau Exécutif Littoral du SNJC dénonce dans sa déclaration une violation flagrante des droits fondamentaux garantis par plusieurs textes juridiques. Cette intervention contrevient notamment à la Constitution de la République du Cameroun, à la loi n° 90/052 du 19 décembre 1990 relative à la liberté de communication sociale, ainsi qu’au Pacte international relatif aux droits civiles et politiques, particulièrement l’article 19 sur la liberté d’expression. Le syndicat rappelle également que le Code de l’audiovisuel camerounais garantit l’indépendance des médias et que le décret n° 2000/158 du 3 avril 2000 protège explicitement les lieux de production journalistique contre toute intrusion non conforme au cadre légal.
Pour le syndicat des journalistes, cette intervention s’inscrit dans un contexte préoccupant d’intimidation des médias. Le SNJC souligne que ce type d’intervention administrative et policière dans un média privé est inacceptable, intimidant et contribue à instaurer un climat de peur et d’autocensure parmi les journalistes. L’organisation rappelle fermement que les médias, loin d’être des instruments de la puissance publique, sont des piliers de la démocratie, de la transparence et du débat citoyen.
Face à cette situation gravissime, l’organisation syndicale formule trois demandes précises aux autorités. Premièrement, elle exige des explications publiques immédiates sur les motifs et la base légale de cette interruption. Deuxièmement, le syndicat demande l’engagement formel des autorités compétentes à ne plus intervenir dans la programmation ni dans les locaux des médias privés, en respect du cadre légal en vigueur. Troisièmement, il réclame la garantie, sans ambiguïté, du plein exercice de la liberté de presse, particulièrement en période électorale.
Le SNJC ne cache pas sa détermination à aller plus loin si de telles pratiques devaient se reproduire. Dans sa déclaration, le Bureau Exécutif Littoral précise qu’il se réserve le droit d’alerter les instances nationales et internationales compétentes si de telles atteintes à la liberté des médias venaient à se répéter. Cette menace témoigne de la gravité que le syndicat accorde à cet incident et de sa volonté de défendre coûte que coûte l’indépendance des médias.
Cette affaire intervient dans un contexte électoral déjà tendu, à quelques semaines de l’élection présidentielle du 12 octobre 2025. La question de la liberté de presse et d’expression devient particulièrement cruciale dans cette période où les débats politiques s’intensifient et où chaque prise de parole peut revêtir une dimension politique importante. L’incident soulève des interrogations légitimes sur les conditions d’exercice du journalisme au Cameroun et sur la capacité réelle des médias privés à traiter librement l’actualité politique sans interférence des autorités.
La déclaration du SNJC, datée du 8 août 2025 et réalisée à Douala, a été cosignée par plusieurs organisations internationales de défense des journalistes, notamment la Fédération Internationale des Journalistes, l’Union des Syndicats des Professionnels de la Presse d’Afrique Centrale, et l’Association Camerounaise des Journalistes Africains. Cette dimension internationale témoigne de l’attention portée par la communauté journalistique mondiale à cette affaire et pourrait lui donner une résonance dépassant les frontières nationales.
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