Pas d’océan sous Titan, lune de Saturne

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Pas d'océan sous Titan, lune de Saturne
Pas d'océan sous Titan, lune de Saturne

Africa-Press – Cameroun. L’hypothèse d’un océan enfoui sous la surface de Titan s’est imposée progressivement à partir de 2008 grâce aux données révélées par la sonde Cassini. En orbite elliptique autour de Saturne, la plus grande lune de la planète géante se déforme sous l’effet des marées gravitationnelles. Cette capacité à s’étirer et à se contracter avait été interprétée comme la signature d’une couche d’eau liquide sous la glace.

Un décalage qui change tout

Une équipe menée par Flavio Petricca, au Jet Propulsion Laboratory de la NASA, a repris l’ensemble des mesures radios enregistrées lors des survols de Cassini. Leur analyse met en évidence un paramètre temporel qui contredit l’hypothèse d’un vaste océan sous la surface. En effet, la déformation maximale de Titan accuse un retard d’environ 15 heures par rapport au pic d’attraction gravitationnelle de Saturne.

Si Titan contenait un océan profond, ce décalage n’existerait pratiquement pas. « S’il y avait un océan global d’eau liquide sous la croûte, le lobe de marée serait quasi-synchrone avec l’axe Saturne-Titan, sans délai significatif », explique Baptiste Journaux, coauteur de l’étude publiée dans la revue Nature. Autrement dit, la réponse mécanique de la lune aurait suivi presque instantanément la contrainte gravitationnelle imposée par Saturne. La présence d’un retard aussi marqué implique un milieu interne bien plus visqueux que de l’eau liquide.

À l’inverse, un mélange d’eau et de glace, plus épais, peut transformer une partie de l’énergie mécanique en chaleur. Cette dissipation explique à la fois le décalage temporel observé et l’intensité inattendue de l’énergie perdue à l’intérieur de Titan.

Un milieu plus propice à la vie

Le scénario désormais privilégié décrit une vaste couche de glace chaude partiellement fondue, intercalée entre la croûte externe et le noyau rocheux. « Les données indiquent que cette zone se situerait entre environ 170 et 550 kilomètres de profondeur », détaille Baptiste Journaux. La quantité exacte d’eau liquide reste difficile à contraindre. Les auteurs estiment toutefois qu’elle pourrait représenter quelques pourcents du volume total de Titan. « Un pourcent d’eau fondue à l’intérieur de Titan correspond déjà à un volume équivalent à celui de l’océan Atlantique », rappelle Baptiste Journaux.

Même sans océan global, Titan contiendrait donc d’immenses poches d’eau douce. Ces conditions ont des conséquences directes sur la question de l’habitabilité. Des poches d’eau confinées peuvent concentrer nutriments et sources d’énergie plus efficacement qu’un océan. Certaines estimations suggèrent que ces zones pourraient atteindre des températures proches de 20 °C, malgré l’environnement glacial de la surface, où les lacs sont faits de méthane liquide et où le thermomètre descend autour de −180 °C.

Un nouvel objectif Dragonfly

Ces nouveaux résultats arrivent alors que la mission Dragonfly se prépare à explorer Titan à partir de 2034. Pour autant, ils ne bouleversent pas les objectifs initiaux. « De manière concrète, ces résultats ne modifient pas fondamentalement les priorités scientifiques de Dragonfly », souligne Baptiste Journaux. L’exploration de la chimie organique de surface et de l’atmosphère reste centrale.

En revanche, ce nouveau scénario offre une opportunité supplémentaire. Le sismomètre embarqué DragMet pourrait détecter indirectement cette couche de glace chaude partiellement fondue. « C’est probablement le meilleur instrument possible pour identifier ce type de structure à des profondeurs totalement inaccessibles au forage », explique le chercheur. Une confirmation de la structure interne de Titan pourrait ainsi orienter de nouvelles missions, cette fois-ci, encore plus orientées sur la recherche d’éventuelles traces de vie.

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