Africa-Press – Cameroun. Le tabac fait depuis longtemps partie de la vie quotidienne au Cameroun. Il est profondément ancré dans les pratiques culturelles, soutient les économies rurales et influence les choix personnels.
Rien qu’en 2022, plus de 6 385 tonnes de tabac ont été cultivées sur plus de 4 200 hectares de terres, fournissant des moyens de subsistance à de nombreuses personnes, en particulier dans les communautés agricoles. Parallèlement, la prise de conscience des risques sanitaires liés au tabagisme est croissante. Selon le Tobacco Atlas, les maladies liées au tabac causent plus de 4 500 décès par an au Cameroun, tandis que la fumée secondaire met en danger des millions d’autres personnes, notamment les enfants et les non-fumeurs. Le coût économique est également important, avec une perte estimée à 85,2 milliards de francs CFA chaque année.
Pour répondre à ces préoccupations, le gouvernement camerounais a mis en place une série de mesures réglementaires. Celles-ci comprennent des avertissements sanitaires sur les paquets de cigarettes, des restrictions sur le tabagisme dans les lieux publics et des campagnes d’éducation publique. Ces efforts témoignent d’un engagement fort en faveur de la santé publique tout en reconnaissant le rôle que le tabac continue de jouer dans le tissu social et économique du pays. Cependant, pour réaliser des progrès plus significatifs, le Cameroun doit franchir une nouvelle étape.
Cette étape ne consiste pas à interdire totalement le tabac, mais plutôt à offrir des alternatives moins nocives et scientifiquement validées aux fumeurs adultes qui ne peuvent pas ou ne veulent pas arrêter. Partout dans le monde, des pays révisent leur approche en adoptant l’innovation et en donnant aux gens de meilleures options, avec des résultats prometteurs. La réduction des risques liés au tabac, ou RRLT (Réduction des Risques liés au Tabac), représente une opportunité pour le Cameroun de repenser ses efforts de lutte contre le tabac.
La RRLT repose sur une idée simple mais puissante: réduire les effets nocifs du tabac en donnant aux fumeurs adultes accès à des produits sans combustion. Ces produits, qui incluent le tabac chauffé, les sachets de nicotine orale et d’autres alternatives sans fumée, sont conçus pour réduire l’exposition aux substances toxiques responsables des principaux dommages pour la santé. La Suède offre un exemple puissant de ce qui est possible. Ce pays affiche aujourd’hui l’un des taux de tabagisme les plus bas au monde et est presque officiellement sans fumée, avec moins de 5,6 % d’adultes utilisant du tabac combustible. Cette réussite ne provient ni d’interdictions ni de stigmatisation, mais de la mise à disposition d’alternatives moins nocives et de l’autonomisation des consommateurs pour faire des choix éclairés. Le Cameroun peut s’inspirer de ce modèle en l’adaptant à son contexte et à ses réalités locales. Pour soutenir ce changement, les décideurs doivent s’assurer que les politiques fiscales et réglementaires sont alignées avec les objectifs de santé publique.
Un obstacle majeur aujourd’hui est que les alternatives plus sûres sont souvent taxées au même taux que les cigarettes combustibles. Cela envoie un mauvais signal et décourage les fumeurs de changer. Le Cameroun doit adopter une structure de taxe d’accise qui traite les produits à risque réduit de manière différente et plus favorable que les cigarettes. Des taxes plus basses sur ces produits encourageraient l’innovation, augmenteraient l’accessibilité et rendraient le changement économiquement attractif pour les fumeurs. Parallèlement, la réglementation doit être proportionnée et fondée sur des preuves. Appliquer les mêmes règles à tous les produits contenant de la nicotine, quel que soit leur niveau de risque, peut semer la confusion chez le public et réduire l’efficacité des stratégies de réduction des risques.
Les règles doivent être conçues pour protéger les jeunes tout en soutenant les fumeurs adultes souhaitant passer à des alternatives moins nocives. La voie à suivre pour le Cameroun ne réside pas dans la pénalisation des fumeurs, mais dans l’adoption de l’innovation via des produits à risque réduit. Il est essentiel d’éduquer le public sur la disponibilité et les avantages de ces alternatives, tout en favorisant la collaboration avec les parties prenantes clés qui militent pour une transition des cigarettes combustibles vers des options plus sûres. En promouvant les produits à risque réduit, en soutenant les efforts de cessation et en engageant le gouvernement, la société civile et le secteur privé, le Cameroun peut réduire considérablement les méfaits liés au tabac, tout en préservant les moyens de subsistance et en assurant la stabilité de l’industrie. Ceci est un appel à l’action.
Les décideurs doivent privilégier la science plutôt que la stigmatisation. Le Cameroun a l’opportunité de montrer l’exemple avec une approche moderne et équilibrée de la lutte contre le tabac, qui protège la santé, responsabilise les consommateurs et favorise la résilience économique. L’accent doit être mis sur la fourniture de meilleures options et d’informations adéquates à ceux qui en ont le plus besoin. Le Cameroun peut protéger ses citoyens et son économie en choisissant le progrès plutôt que l’interdiction. Le moment d’agir est maintenant.
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