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Quand Éric Megalos-Dima, DG de la SODECA, félicite la radio Ndékè Luka pour être « venu à la source de l’information », parle-t-il vraiment de vérité ou d’un outil pour contrôler l’opinion?
En remerciant le journaliste de la radio Ndékè Luka pour sa démarche, le directeur général de la Sodeca alimente une vieille stratégie: faire croire que la seule version officielle détient la vérité. Dans un pays où la manipulation d’État a pris racine, cette formule devient un piège. « Aller à la source » ne signifie pas confronter la réalité sur le terrain, mais plutôt s’en remettre aux discours préparés, validés et souvent édulcorés par les autorités.
Depuis des années, le gouvernement multiplie les promesses sur la distribution d’eau potable, mais la réalité reste inchangée. Les quartiers se réveillent avant l’aube pour remplir des bidons, les robinets restent secs des heures durant, et les bornes-fontaines sont prises d’assaut. La population vit dans la résignation, pendant que la Sodeca et l’État s’échangent des responsabilités. La vérité est visible partout: elle se lit dans les longues files d’attente, les enfants portant des seaux sur la tête, et les ménages forcés de payer des vendeurs privés pour survivre.
Quand un responsable public évoque la « source », il détourne l’attention de la vraie mission du journalisme. Le travail d’un journaliste n’est pas de répéter docilement les déclarations des dirigeants, mais d’aller sur le terrain, confronter les chiffres, écouter les habitants et montrer la situation telle qu’elle est. La « source » officielle devient alors un instrument pour verrouiller l’information et éviter les questions embarrassantes. Cette pratique n’est pas nouvelle: elle alimente le climat de méfiance et protège un pouvoir qui craint la transparence.
Le directeur général parle d’un projet financé par la Banque africaine de développement, d’un avenir radieux où tout sera réglé par la SODECA. Mais ces discours rassurants sont répétés chaque année, sans résultat. Le problème est connu: la Sodeca n’a pas de réserve suffisante, fonctionne en refoulement direct et reste entièrement dépendante d’un réseau électrique fragile. Au lieu d’acheter des groupes électrogènes puissants pour maintenir les pompes en activité, l’État choisit de maintenir le statu quo. Les moyens financiers existent, mais l’absence de volonté politique bloque toute avancée.
La manipulation s’appuie aussi sur l’image d’une Sodeca victime. On pointe les habitants qui « refusent de payer », on accuse les kiosques qui « volent l’eau », mais jamais on ne montre les responsabilités des dirigeants qui refusent d’investir ou de planifier sérieusement. Pendant ce temps, la population paye, attend et subit. Les discours officiels se multiplient, mais l’eau ne coule toujours pas.
Dans un pays où l’information est souvent confisquée, le vrai courage est d’aller au-delà de la « source » imposée. Il faut confronter la parole officielle à la réalité des quartiers. Cette dualité — vérité officielle contre vérité vécue — révèle la fragilité d’un système fondé sur le discours et non sur les actes. Chaque fois qu’un responsable remercie les médias pour « aller à la source », il renforce une illusion et éloigne la population de la vraie question: pourquoi l’eau, ressource vitale, reste-t-elle inaccessible dans la capitale?
L’État trouve chaque année des milliards pour financer le groupe Wagner, construire des villas luxueuses et acheter des voitures à des dizaines de millions. Mais il refuse d’investir dans un simple groupe électrogène capable de garantir l’eau à toute une ville. Cette contradiction crie plus fort que tous les discours. Derrière chaque goutte d’eau manquante, c’est la priorité d’un pouvoir qui se révèle: protéger ses intérêts, jamais sa population….
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