Africa-Press – CentrAfricaine. C’est le piège qui se referme sur Touadéra. Alors que Poutine exige depuis le mois d’août le départ de Wagner au profit d’AfrikaCorp, les mercenaires russes viennent de présenter leur facture définitive au président centrafricain. Une somme tellement énorme qu’elle transforme le chef d’État Baba Kongoboro en otage permanent de ses propres protecteurs.
L’information que Corbeau News -Centrafrique s’est procurée exclusivement montre l’ampleur du piège dans lequel Faustin-Archange Touadéra alias Baba Kongoboro s’est enfermé. Depuis des mois, le président russe Vladimir Poutine demande au chef d’État centrafricain d’accepter le départ de Wagner et son remplacement par AfrikaCorp, une structure du mercenariat privée directement rattachée au ministère russe de la Défense. Cette transition a déjà eu lieu dans plusieurs pays africains où Wagner était implanté. Mais pas en Centrafrique.
Touadéra refuse. Il temporise, négocie, tente de gagner du temps face à la pression du Kremlin. La raison de cette résistance vient d’apparaître au grand jour: les chefs du groupe Wagner présents en Centrafrique ont déposé leur facture définitive. Pour partir, ils exigent 783 milliards de francs CFA.
Ce montant colossal correspond, selon les mercenaires russes, au coût de l’ensemble du matériel militaire qu’ils ont déployé dans le pays pour protéger le régime Touadéra: véhicules blindés, chars, avions de chasse, armements divers. Mais la facture comprend également les indemnisations réclamées pour les mercenaires tués lors des combats en Centrafrique. Wagner exige que le gouvernement centrafricain paie pour ses propres morts, des hommes tombés en accomplissant des missions souvent criminelles sur le territoire national.
La logique est implacable: tout ce que Wagner a amené doit être payé. Rien ne part gratuitement. Les mercenaires russes ont transformé leur protection du régime en créance qu’ils comptent bien recouvrer avant de céder la place à AfrikaCorp.
Face à ce chantage monumental, Touadéra se trouve paralysé. Accepter de payer cette somme est impossible pour un pays dont le budget national annuel tourne autour de 300 milliards de francs CFA. Refuser de payer signifie que Wagner reste et continue d’exploiter les ressources du pays jusqu’à récupération complète de sa créance. Dans les deux cas, la Centrafrique perd.
L’alternative proposée par Moscou n’arrange rien. AfrikaCorp, la structure qui doit remplacer Wagner, coûterait 10 milliards de francs CFA par mois, à verser directement en espèces au Kremlin. Un montant mensuel qui, sur une année, représente 120 milliards de francs CFA. Là encore, une facture insoutenable pour les finances centrafricaines.
Touadéra est donc pris entre deux gouffres financiers: la dette colossale de Wagner d’un côté, le coût permanent d’AfrikaCorp de l’autre. Entre les deux, aucune marge de manœuvre. Le président centrafricain est devenu l’otage de ceux qu’il a fait venir pour le protéger.
Cette situation place le chef de l’État dans une dépendance totale vis-à-vis de Wagner. Les mercenaires russes détiennent aujourd’hui le pouvoir de renverser Touadéra quand ils le souhaitent. Ce n’est même plus une question de rébellion armée comme le pays en a connu par le passé. Wagner peut déposer le président “comme un claquement de doigts”, pour reprendre une expression au sein de l’armée nationale. La capacité de nuisance est immédiate, la marge de résistance inexistante.
Depuis août 2024, ce bras de fer à trois entre Poutine, Wagner et Touadéra se joue dans l’ombre. Moscou veut rationaliser sa présence militaire en Afrique et passer d’un système de mercenaires privés à une structure étatique plus contrôlable. Wagner refuse de partir sans être payé intégralement. Touadéra, lui, préfère garder le diable qu’il connaît plutôt que d’en accueillir un nouveau, tout en sachant qu’il n’a aucun moyen de payer l’un ou l’autre.
Les 783 milliards exigés par Wagner représentent plus de deux budgets annuels de la Centrafrique. Même en vendant la totalité des ressources naturelles du pays pendant plusieurs années, impossible de réunir une telle somme. Wagner le sait parfaitement. L’objectif n’est d’ailleurs pas de recevoir cet argent rapidement, mais de justifier une présence prolongée et une exploitation continue des richesses centrafricaines.
Pendant ce temps, la population centrafricaine paie le prix de cette alliance mortifère. Chaque jour qui passe enfonce un peu plus le pays dans une servitude économique et militaire dont il ne pourra pas s’extraire sans conséquences dramatiques. Les jeunes Centrafricains, en particulier, vont supporter le poids de cette erreur historique commise par leur président.
L’accord passé entre Touadéra et Wagner engage aujourd’hui la responsabilité de l’État centrafricain. Ce n’est plus une simple décision présidentielle qui peut être annulée au prochain changement de pouvoir. C’est une dette nationale, une hypothèque sur l’avenir du pays, contractée par un homme qui prétendait le protéger.
Touadéra est ainsi devenu le premier et le dernier esclave du groupe Wagner en Afrique. Premier, parce qu’aucun autre dirigeant africain ne s’est laissé piéger à ce point. Dernier, parce que Wagner est en train de disparaître partout ailleurs sur le continent, remplacé par des structures plus discrètes et mieux contrôlées par le Kremlin.
La Centrafrique reste l’exception, l’anomalie, le territoire où les mercenaires russes peuvent encore dicter leurs conditions et fixer leurs prix sans la moindre limite. Tout cela avec la signature d’un président qui, en voulant sauver son pouvoir personnel, a hypothéqué l’indépendance de son pays pour des décennies.
Source: Corbeau News Centrafrique
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