Don de 50 000 Francs CFA aux lycéennes à Ndélé

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Don de 50 000 Francs CFA aux lycéennes à Ndélé
Don de 50 000 Francs CFA aux lycéennes à Ndélé

Africa-Press – CentrAfricaine. À Ndélé, une organisation humanitaire a distribué 50 000 francs CFA à chaque fille du lycée ce samedi 20 décembre 2025. Mais le clan présidentiel a rapidement récupéré l’opération pour en faire un acte de campagne présidentielle, effaçant toute trace du véritable donateur dans sa communication officielle.

Les faits sont simples. Une organisation non gouvernementale, dont l’identité reste pour l’instant confidentielle, a décidé d’apporter son soutien aux jeunes filles scolarisées au lycée de Ndélé, chef-lieu de la préfecture de Bamingui-Bangoran. Chaque élève inscrite de la sixième à la troisième a reçu une carte SIM Orange Money contenant 50 000 francs CFA. Les bénéficiaires devaient ensuite se rendre aux distributeurs ou aux points de service Orange Money pour retirer l’argent en espèces. Une opération claire, bien organisée, menée par des acteurs indépendants dans le but d’encourager la scolarisation des filles dans une région où l’accès à l’éducation reste un défi quotidien.

Mais voilà que le régime de Touadéra s’empare de cette initiative pour en faire un argument de campagne. Les réseaux sociaux proches du pouvoir inondent les fils d’actualité avec des photos et des vidéos montrant le président comme le grand bienfaiteur des lycéennes de Ndélé. Aucune mention de l’ONG qui a financé l’opération. Aucune précision sur l’origine réelle de ces fonds. Juste le visage du président qui apparaît partout, comme si c’était lui qui avait sorti l’argent de sa poche. La machine de propagande tourne à plein régime, transformant une action humanitaire en coup de communication politique à quelques jours d’un scrutin où Touadéra cherche à se maintenir au pouvoir illégalement.

Ce genre de manipulation ne date pas d’hier. Le président centrafricain a fait de la récupération des projets financés par d’autres une véritable stratégie. Il attend qu’une organisation internationale ou une ONG termine un projet, puis il débarque au dernier moment pour couper le ruban, faire des discours et s’attribuer tous les mérites. Les exemples abondent. Le 6 octobre dernier, Touadéra s’est rendu à Paoua, dans la préfecture de Lim-Pendé, pour inaugurer un bâtiment scolaire qu’il n’a jamais financé. Ce sont des organisations internationales qui ont mis l’argent, qui ont supervisé les travaux, qui ont livré l’infrastructure. Mais le président a retardé la cérémonie jusqu’à la rentrée scolaire pour maximiser l’impact médiatique de sa présence. Il a prononcé un long discours dans lequel il s’est présenté comme le grand architecte de la reconstruction éducative du pays, remerciant au passage les partenaires tout en veillant à ce que les populations locales retiennent surtout son nom.

Quelques semaines plus tard, même scénario à Batangafo. Le chef de l’État y a posé la première pierre d’un centre pédagogique entièrement financé par la Banque mondiale et le Partenariat mondial pour l’éducation. Sur place, il a donné des leçons sur l’importance de former des enseignants compétents, sur la nécessité d’un encadrement sérieux, sur l’avenir du pays qui dépend de la qualité de l’enseignement. Des paroles creuses dans la bouche d’un homme qui, en quinze ans aux commandes, n’a strictement rien fait pour améliorer le secteur éducatif. Cinq ans comme Premier ministre sous Bozizé, dix ans comme président, et pas une seule école construite avec les moyens du budget national. Pas une seule université ouverte à l’intérieur du pays. Tous les projets éducatifs réalisés sous son règne proviennent de financements extérieurs.

Le cas de Bossangoa montre jusqu’où va l’audace du régime. La MINUSCA a décidé de réhabiliter la route entre Bossembélé et Bossangoa, un axe devenu quasi impraticable après des années d’abandon. Cette route est essentielle pour le déploiement des casques bleus et leurs opérations de maintien de la paix dans la région. Mais Touadéra a demandé à la MINUSCA de reporter l’inauguration pour qu’il puisse la faire lui-même, devant les caméras, devant les populations locales, en se présentant comme celui qui a rendu possible cette réhabilitation. La MINUSCA finance, la MINUSCA exécute les travaux, mais c’est Touadéra qui coupe le ruban et récolte les applaudissements. Une mascarade qui se répète partout où un partenaire international investit dans le pays.

Cette pratique relève du détournement pur et simple de projets humanitaires et de développement à des fins électorales. Les organisations internationales versent des millions de dollars pour améliorer les conditions de vie des Centrafricains, pour construire des écoles, pour réhabiliter des routes, pour former des enseignants. Cet argent ne transite même pas toujours par les caisses de l’État. Les partenaires financent directement les projets parce qu’ils savent que s’ils versent l’argent au gouvernement, il disparaîtra dans les circuits opaques de la corruption avant d’atteindre les bénéficiaires. Pourtant, Touadéra trouve toujours le moyen de s’approprier ces réalisations, de les présenter comme le fruit de sa gouvernance, de son leadership, de ses soi-disant négociations avec les bailleurs.

Les enseignants centrafricains connaissent bien la valeur des promesses présidentielles. Depuis des années, ils attendent des salaires qui n’arrivent jamais. La Banque mondiale finance la contractualisation de milliers d’enseignants, verse les fonds à l’État centrafricain, mais l’argent ne parvient jamais aux intéressés. Ils peuvent patienter six mois, huit mois, parfois plus, avant de recevoir un franc. Quand ils font grève pour réclamer leur dû, on leur répond que les fonds ont bien été versés au gouvernement et que c’est l’administration qui bloque. Personne ne sait où passe cet argent. Pendant ce temps, les écoles fonctionnent grâce aux maîtres-parents, des jeunes sans formation pédagogique qui enseignent bénévolement parce qu’il n’y a personne d’autre. Ces maîtres-parents sont payés par les familles elles-mêmes, des familles déjà écrasées par la pauvreté qui doivent assumer les responsabilités que l’État a abandonnées.

Le gouvernement verse 10 000 francs par mois aux enseignants comme indemnité de craie. Dix mille francs pour acheter de la craie pendant un mois entier. Cette somme dérisoire montre le mépris total du régime pour le corps enseignant. Pendant ce temps, Touadéra paie 10 milliards par mois à Wagner pour protéger son pouvoir. Des mercenaires russes reçoivent des milliards pendant que les enseignants reçoivent des miettes et que les élèves étudient assis par terre faute de tables-bancs. Dans certaines écoles, ce sont les anciens élèves qui cotisent entre eux pour acheter du mobilier scolaire parce que l’État a complètement déserté ses obligations.

À Paoua, Touadéra a annoncé la contractualisation de 6 000 enseignants financée par la Banque mondiale. Il a parlé de l’intégration de 1 569 enseignants titulaires. Il a évoqué le doublement de l’indemnité de craie, passée de 5 000 à 10 000 francs. Il a cité des chiffres impressionnants sur le papier: 291 salles de classe construites, 54 blocs de latrines, 2 970 tables-bancs distribués, 27 établissements équipés. Tous ces chiffres proviennent de projets financés par des partenaires extérieurs. Le Projet d’Urgence de Soutien à l’Éducation de Base, le Projet d’Appui au Secteur de l’Éducation, le Projet d’Accélération des Résultats de l’Éducation, tous financés par la Banque mondiale et le Partenariat mondial pour l’éducation. Le gouvernement centrafricain n’a pas mis un franc dans ces projets.

Le président a parlé d’un nouveau projet d’une enveloppe de 120 millions de dollars américains pour l’éducation. Cent vingt millions de dollars, mais pas un franc ne vient du budget national. Il a annoncé 5 milliards d’investissements combinés pour l’Ouham-Pendé. Cinq milliards investis dans l’éducation de cette préfecture, mais toujours aucune contribution du gouvernement centrafricain. Ces sommes colossales sur le papier ne se traduisent par aucune amélioration concrète sur le terrain parce que les fonds promis restent bloqués quelque part entre les ministères. Les partenaires versent l’argent, mais les écoles ne voient rien arriver.

Touadéra multiplie les remerciements aux bailleurs dans ses discours: UNICEF, Banque mondiale, PAM, Union européenne, MINUSCA, Fédération de Russie, États-Unis, Chine, Maroc. Cette longue liste montre que le gouvernement ne fait rien par lui-même. L’éducation nationale dépend entièrement de la générosité des financeurs étrangers. Sans eux, le système s’effondrerait totalement. Mais même avec eux, le système vacille parce que l’argent qu’ils versent ne parvient jamais aux destinataires. Il se perd dans les circuits opaques de l’administration, détourné par des responsables sans scrupules pendant que les enseignants font grève et que les élèves restent chez eux.

Source: Corbeau News

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