Finance Et Biodiversité: Pistes Pour L’Afrique

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Finance Et Biodiversité: Pistes Pour L'Afrique
Finance Et Biodiversité: Pistes Pour L'Afrique

Africa-Press – CentrAfricaine. La mobilisation de capitaux privés pour protéger la biodiversité et restaurer les écosystèmes progresse dans les débats internationaux. Le défi est d’identifier des instruments capables d’attirer les investisseurs tout en prouvant leur efficacité écologique.

Selon un rapport publié en septembre 2025 par le Forum économique mondial, la nature peut devenir un champ d’investissement compétitif si les bons mécanismes financiers sont mis en place. Le document insiste sur la nécessité de combiner rendement financier et résultats tangibles pour la biodiversité et souligne l’importance de développer des solutions adaptées aux pays en développement, dont ceux d’Afrique.

Le rapport intitulé « Finance Solutions for Nature – Pathways to Returns and Outcomes » indique que la finance pour la nature reste fragmentée et complexe, mais qu’elle attire de plus en plus de capitaux. Le Forum économique mondial recense 37 solutions financières et en identifie 10 comme prioritaires, car elles sont jugées capables de livrer à la fois des rendements et des résultats mesurables pour les écosystèmes. Certaines de ces solutions reposent sur des instruments déjà connus comme les obligations thématiques dont les fonds sont affectés à des projets précis de conservation ou les prêts liés à la durabilité qui ajustent leurs conditions financières à l’atteinte d’objectifs écologiques.

Les auteurs évoquent également de nouvelles approches, présentées comme innovantes et davantage orientées vers le marché, qui se multiplient dans le champ de la finance pour la nature. C’est le cas par exemple des obligations liées à la durabilité, qui ajustent le coût du capital en fonction de cibles écologiques, ou des swaps dette-nature, qui transforment une partie de la dette souveraine en engagements de conservation. Toutefois, apprend-on, ces instruments demeurent fragmentés, avec des méthodologies variables et une performance encore difficile à évaluer, ce qui freine leur adoption à grande échelle.

Par ailleurs, le WEF met en avant l’importance d’intégrer des indicateurs crédibles de résultats écologiques dans les modèles financiers. Il souligne que le suivi du rendement doit aller de pair avec des mesures concrètes de performance environnementale, comme le carbone stocké, les hectares restaurés ou les emplois créés, afin de donner confiance aux investisseurs et de démontrer que ces solutions peuvent générer des bénéfices économiques et écologiques à la fois.

L’Afrique teste déjà ses propres solutions financières

En Afrique, l’idée d’orienter les capitaux privés vers la nature n’arrive pas en terrain vierge. Le Fonds pour l’environnement mondial a annoncé en juillet 2025 un programme d’obligations pour la faune pouvant mobiliser jusqu’à 1,5 milliard de dollars sur le continent avec une logique de remboursement indexée sur des résultats de conservation. Comme rapporté précédemment par l’Agence Ecofin, le principe veut que les investisseurs privés apportent des fonds, avec des remboursements conditionnés aux résultats obtenus en matière de conservation, tels que la réduction du braconnage ou la stabilisation des populations animales. Plusieurs États commencent également à aligner leurs politiques financières. Le Bénin a lancé en septembre 2025 un cadre national de financement vert pour canaliser des capitaux vers dix secteurs prioritaires dont la conservation et l’adaptation avec une gouvernance dédiée pour sélectionner et mesurer l’impact des projets. Le Rwanda a, quant à lui, indiqué en juin dernier vouloir réunir 500 millions de dollars pour financer la mise en œuvre de solutions concrètes en faveur de la conservation de la biodiversité. Selon la ministre de l’Environnement, Valentine Uwamariya, les fonds devraient être mobilisés aussi bien auprès de sources publiques que privées, d’origine nationale comme internationale.

Les institutions financières africaines s’adaptent elles aussi aux nouvelles attentes des marchés. Africa Finance Corporation a conclu en juillet 2025 un prêt de 255 millions $ indexé sur des indicateurs de durabilité, qui relie directement le coût du capital à des résultats mesurables en matière environnementale et de biodiversité. La Banque africaine de développement (BAD) a de son côté fait de la biodiversité un pilier transversal de sa stratégie 2024–2033. « Basée sur les priorités des pays africains, [elle] souligne le besoin critique de mobiliser les financements climatiques, y compris dans le secteur privé, d’investir dans le capital naturel et de renforcer les partenariats pour faire face aux impacts croissants du changement climatique et de la perte de biodiversité », a déclaré la banque multilatérale de développement.

Cet ensemble traduit un mouvement de fond où stratégies publiques, instruments obligataires et financements liés à la performance cherchent à orienter davantage de capitaux privés vers la protection de la nature tout en apportant des preuves concrètes de résultats. La question est désormais celle de l’ampleur et du rythme. Si peu de chiffres précis existent sur les besoins en financement pour la nature en Afrique, la Coalition for Disaster Resilient Infrastructure (CDRI) estime à 12,7 milliards $ par an « rien que pour les infrastructures » les pertes économiques liées aux catastrophes naturelles sur le continent. Ce chiffre rappelle que la vitesse de déploiement et la solidité des mécanismes de financement seront déterminantes pour éviter que le coût de l’inaction ne continue de croître.

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