Africa-Press – CentrAfricaine. La société d’Elon Musk a lancé ses activités commerciales en Afrique fin janvier 2023 avec le Nigeria. Depuis, il s’est étendu à plus de 20 autres pays dont le Bénin, le Niger, le Rwanda, le Zimbabwe, le Kenya, le Ghana et la RDC.
A son arrivée en 2023, Starlink promettait de démocratiser l’accès à Internet sur le continent africain, y compris dans les zones les plus reculées, peu couvertes ou totalement dépourvues de services. Bien avant son implantation, un obstacle majeur était déjà identifié: la capacité financière limitée des ménages africains à accéder à Internet, quel que soit le fournisseur. Trente mois et une vingtaine de pays couverts plus tard, la question de la tenue de cette promesse face à la réalité du pouvoir d’achat reste d’actualité.
Pour évaluer cette promesse, il faut d’abord mesurer ce que doit débourser un abonné potentiel. Starlink propose un accès à Internet via une constellation de satellites en orbite basse. En Afrique, les clients doivent acheter un kit de connexion, vendu en moyenne entre 200 et 400 dollars selon les modèles. A cela s’ajoute un abonnement mensuel facturé entre 30 et 50 dollars, selon les offres et les marchés. Des forfaits spécifiques sont parfois proposés, adaptés à certains contextes locaux.
Des offres Starlink face à une concurrence déjà bien établie
Sur le marché, Starlink se heurte à la concurrence directe des opérateurs télécoms et des fournisseurs d’accès à Internet. Contrairement à ses rivaux satellitaires comme Eutelsat ou OneWeb, qui opèrent via des intermédiaires (opérateurs, intégrateurs, FAI), Starlink vend ses services directement aux utilisateurs finaux, ce qui le place frontalement face aux acteurs traditionnels du secteur.
En République démocratique du Congo (RDC), par exemple, le marché est dominé par des opérateurs bien implantés comme Orange, Airtel, Africell ou Vodacom, ainsi que des fournisseurs comme CanalBox, filiale de Vivendi. Ces acteurs proposent des offres variées, fixes ou mobiles, avec des forfaits mensuels allant de 10 à 100 dollars, selon le volume de données et la vitesse de connexion.
Au Tchad, Airtel et Moov Africa proposent des forfaits Internet mobile allant d’environ 9 $ à environ 90 $ pour des volumes de données compris entre 1 Go et 45 Go, voire illimités. Moov Africa propose aussi un service de fibre optique à partir de 45 $ environ par mois, avec un routeur 4G vendu autour de 160 $.
Une accessibilité limitée par des écarts de revenus
En 2023, le forfait mensuel de Starlink à 50 dollars représentait à lui seul près de 37 % du revenu national brut (RNB) mensuel par habitant en Afrique subsaharienne, selon les estimations de la Banque mondiale. Même à 30 dollars, soit le tarif le plus bas proposé, cela représente encore 22,2 % de ce revenu.
Dans plusieurs pays, le service dépasse même le revenu mensuel moyen. Au Niger, où le RNB mensuel par habitant était de 51,6 dollars en 2023, l’abonnement Starlink coûtait 54,9 dollars. Au Liberia, l’offre la moins chère à 40 dollars équivaut à 67,6 % du RNB mensuel par habitant. Au Zimbabwe, la même offre à 30 dollars correspond à 17,5 % d’un RNB mensuel estimé à 171,67 dollars.
A titre de comparaison, l’Union internationale des télécommunications (UIT) indique que les services d’Internet fixe représentent en moyenne 14,8 % du RNB mensuel par habitant sur le continent. Or, l’organisation considère qu’un service est abordable lorsque son coût ne dépasse pas 2% de ce revenu.
Des avis mitigés
Au vu de ces différents éléments, on peut se demander si Starlink règle réellement les problèmes d’accès à Internet sur le continent. En Afrique, les avis restent mitigés: certains utilisateurs jugent le service trop cher, d’autres le considèrent comme une solution bienvenue, tandis qu’une troisième catégorie estime que, malgré son coût élevé, le rapport qualité-prix reste meilleur que celui des opérateurs traditionnels.
Grâce à sa constellation de satellites, Starlink répond théoriquement à la question de la couverture réseau. En pratique, cette couverture ne devient effective qu’à partir du moment où l’utilisateur dispose d’un kit Starlink. Cependant, la couverture seule ne suffit pas. Par exemple, selon les données de la GSMA, en Afrique subsaharienne, 710 millions de personnes, soit 60% de la population, n’utilisaient pas Internet mobile en 2023, malgré le fait qu’elles se trouvent dans des zones couvertes par un réseau. Le taux de pénétration d’Internet mobile était alors de 27 %, tandis que 13 % de la population restaient sans couverture.
A titre individuel, il y a de fortes chances que ceux qui utilisent déjà Internet soient les premiers à pouvoir améliorer leur expérience en migrant vers Starlink, bénéficiant ainsi d’une meilleure qualité de service. En revanche, pour ceux qui n’ont pas encore accès à Internet, la simple présence de Starlink dans leur zone ne suffit pas à garantir une adoption rapide, notamment en raison des contraintes financières et techniques.
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