Au Conseil de sécurité, une jeune femme centrafricaine souligne la soif de paix de son peuple

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Au Conseil de sécurité, une jeune femme centrafricaine souligne la soif de paix de son peuple
Au Conseil de sécurité, une jeune femme centrafricaine souligne la soif de paix de son peuple

Africa-PressCentrAfricaineLe 24 février, le Conseil de sécurité a écouté Martine Kessy Ekomo-Soignet. Après avoir écouté les diplomates de l’ONU, de l’Union européenne et de l’Union africaine, les membres du Conseil ont écouté cette jeune femme centrafricaine qui s’est fait la porte-parole du peuple centrafricain devant l’organe onusien.

« En effet des milliers de mes compatriotes auraient aimé saisir une telle opportunité pour s’adresser directement à vous pour vous faire part de leurs peurs, de leurs inquiétudes, de leurs espoirs et de leur vision pour l’avenir de ce beau pays », a-t-elle déclaré aux membres du Conseil. Avant de s’exprimer devant le Conseil, elle a consulté plusieurs jeunes, femmes et acteurs de la société civile vivant en Centrafrique ou dans la diaspora afin que son propos reflète leurs voix.

Martine Kessy Ekomo-Soignet est la fondatrice et directrice d’URU, une ONG soutenant la jeunesse centrafricaine pour la consolidation de la paix en RCA. Elle a reconnu que la situation dans son pays est complexe, tendu et difficile. « Nous vivons dans la peur, la peur de perdre nos vies et celles de nos proches à cause de la violence armée. La peur d’être physiquement abusé. La peur de ne pas avoir les moyens économiques pour la survie surtout en cette période de pandémie qui a exacerbé les vulnérabilités », a-t-elle précisé.

Mais la jeune femme a tenu à faire passer un message aux membres du Conseil de sécurité de la part du peuple centrafricain : « Nos espoirs sont plus forts que nos peurs ».

« Nous croyons fortement qu’il est possible de sortir de cette situation d’instabilité dans laquelle nous vivons depuis des années. Oui nous sommes confiants de notre vulnérabilité face aux crises et aux violences. Oui nous avons besoin d’être appuyés par nos partenaires et nous sommes reconnaissants de leur engagement et de leur sacrifice », a-t-elle dit.

Martine Kessy Ekomo-Soignet a souligné que le peuple centrafricain a appris à faire preuve de résilience, « à toujours choisir le chemin de la paix et de l’unité face aux tentatives de déstabilisation et de division ». « Oui la population notamment les jeunes et les femmes, est prête à se relever et à tourner la page des crises répétitives », a-t-elle dit.

Au forum de Bangui organisé en 2015, le peuple centrafricain a parlé d’une seule voix : « la voix de la paix », a rappelé Martine Kessy Ekomo-Soignet. « Ce cri de cœur résonne encore aujourd’hui six ans après ».

Les violences qui touchent la RCA depuis les élections du 23 décembre 2020 a malheureusement rappelé à des millions de Centrafricaines et de Centrafricains le traumatisme de la crise de 2013.

« Ce traumatisme est caché sous notre détermination à vivre ensemble malgré tout, notre détermination à créer et à transformer positivement notre pays et à se relever ensemble comme un seul peuple uni et fort », a nuancé la jeune femme.

Martine Kessy Ekomo-Soignet a rappelé au Conseil de sécurité les conséquences des violences perpétrées par les groupes armés coalisés sous le nom de CPC. « Ces violences ont contribué à détériorer la situation humanitaire et sécuritaire. Ces violences ont compromis le droit à l’éducation de milliers de centrafricains ». Elle a expliqué que le couvre-feu et l’état d’urgence instaurés par le gouvernement ont aussi impacté la vie de la population sur le plan socio-économique dans un pays qui se caractérise par une économie fort informelle, très dynamique et active de jour comme de nuit. L’activiste a dénoncé la recrudescence des violences basées sur le genre et des agressions sexuelles au sein des communautés.

La jeunesse représente plus de 70% de la population centrafricaine

Pour Martine Kessy Ekomo-Soignet, la situation actuelle en RCA pose la question de l’avenir du processus de paix et notamment de l’accord pour la paix et la réconciliation conclu en février 2019.

« La société civile et de manière spécifique les jeunes et les femmes ont œuvré ces deux dernières années pour que cet accord soit le cadre de référence pour la paix durable, ainsi que des actions de plaidoyer auprès des décideurs et des groupes armés pour faire avancer la cause de la paix et faire taire certains », a-t-elle rappelé.

« Aujourd’hui nous appelons à un redoublement d’efforts de la part de toutes les parties prenantes, des garants et facilitateur de l’accord pour la revitalisation du processus de paix. Car le peuple a soif de paix et nous devons cette paix à la génération présente et aux générations futures », a-t-elle ajouté. « Notre peuple a des rêves pour ce notre pays. Ce rêve est beaucoup plus vivant encore aujourd’hui dans le contexte donc que nous vivons aujourd’hui et ce malgré notre fatigue et notre peur ».

La jeunesse représente plus de 70% de la population centrafricaine. Martine Kessy Ekomo-Soignet a mentionné aux membres du Conseil de sécurité une analyse participative conduite en 2020 sur l’ensemble du territoire de la RCA et axée sur les besoins et les aspirations des jeunes a montré que pour ces derniers, la paix se traduit tout d’abord par la liberté de circulation des biens et des personnes. « Cette étude a également montré que malgré le contexte difficile 86% des jeunes ne veulent pas immigrer. Ils veulent rester au pays et réussir », a-t-elle dit.

« Nous rêvons de voir notre pays se développer dignement atteindre les objectifs de développement durable à l’horizon 2030 et réaliser les aspirations de l’agenda 2063 de l’Afrique que nous voulons ».

Martine Kessy Ekomo-Soignet a partagé son rêve de voir briller la diversité du peuple centrafricain, tout en veillant à ce que l’impunité soit combattue et que les droits et libertés fondamentaux puisse devenir une réalité pour tous.

« Nous rêvons que la liberté d’expression et de pensée soit au cœur des efforts portés par les jeunes, les femmes, les hommes décideurs et pays amis qui œuvrent pour la paix en République centrafricaine ».

Le peuple centrafricain a soif de paix mais aussi de justice. « Il réclame justice pour les milliers de vies innocentes ôtées. Il réclame justice pour les filles et les femmes violées physiquement abusées. Ils réclament justice pour les propriétés et autres biens détruits ».

La directrice d’URU a insisté sur le fait qu’il ne peut y avoir de paix durable en RCA sans la participation effective des femmes et des jeunes qui représente plus de 75% de la population centrafricaine. « Comment penser une paix durable sans eux ? Leur contribution ne devrait pas se limiter à des consultations ad-hoc mais elle devrait s’inscrire dans une approche participative, inclusive et active à tous les niveaux de décision », a-t-elle dit. « Ces jeunes et ces femmes artisans de paix doivent être appuyés techniquement et financièrement pour amplifier l’impact de leur action de consolidation de la paix ».

Martine Kessy Ekomo-Soignet a rappelé au Conseil de sécurité que la population centrafricaine est consciente du « poids décisif » que l’organe onusien responsable de la paix et de la sécurité internationales représente pour l’avenir de la RCA.

« Nous restons actifs sur le terrain et gardons un ferme espoir qu’un jour notre pays sortira de ces crises à répétition grâce aux efforts conjugués du peuple centrafricain avec l’appui de la communauté internationale », a-t-elle conclu.

 

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