Africa-Press – CentrAfricaine. Le 30 juin 1908, au-dessus de la taïga sibérienne, une boule de feu traverse le ciel avant d’exploser dans un fracas assourdissant. En quelques secondes, l’explosion de Toungouska couche près de 80 millions d’arbres sur plus de 2000 kilomètres carrés, sans laisser le moindre cratère ni aucune structure d’impact évidente. Longtemps considéré comme un cas isolé, Toungouska pourrait en réalité être l’exemple le mieux documenté d’un type d’impact cosmique largement sous-estimé.
Des explosions aériennes sans cratères
L’évènement de Toungouska pourrait, en effet, être dû à une explosion atmosphérique majeure. Dans ce scénario, un corps céleste, souvent un fragment de comète, se désintègre dans l’atmosphère avant d’atteindre le sol.
L’essentiel de l’énergie est libéré dans l’air, mais la boule de feu et l’onde de choc atteignent la surface. Les conditions atteintes suffisent à vitrifier les sédiments, fracturer les minéraux et parfois déclencher des incendies étendus. Contrairement à un impact classique, le paysage n’est pas excavé durablement, ce qui complique fortement l’identification de ces événements une fois les dépôts remaniés ou enfouis.

Plusieurs études récentes suggèrent que ce type d’explosion cosmique pourrait avoir eu lieu plusieurs fois dans le passé. Leur capacité à affecter de vastes surfaces, tout en laissant des traces géologiques ténues et rapidement effacées, explique sans doute pourquoi ils sont longtemps passés inaperçus.
Pour en arriver à cette conclusion, les chercheurs se sont appuyés sur une série de marqueurs: présence de sphérules formées par fusion, verres de fusion issus de sédiments terrestres, métaux fondus, enrichissements en éléments rares d’origine extraterrestre et quartz choqué. Les fissures caractéristiques de ce dernier témoignent de pressions extrêmes atteintes en un temps très court. Pris isolément, ces indices restent ambigus mais leur association constitue en revanche une signature robuste.
Un refroidissement et une cité anéantie
L’un des résultats les plus débattus concerne le Dryas récent, un refroidissement brutal survenu il y a environ 12.800 ans. L’hypothèse d’un impact cosmique multiple à l’origine de cet épisode climatique manquait jusqu’ici de preuves dans les archives océaniques.
Une étude publiée cet été dans la revue PLOS One apporte un nouvel élément. Dans des sédiments prélevés au fond de la baie de Baffin, au large du Groenland, les chercheurs identifient une couche riche en sphérules, verres de fusion, platine et quartz choqué, datée précisément de la limite du Dryas récent. Retrouvés à près de 2000 mètres de profondeur, ces dépôts indiquent que des matériaux ont été injectés haut dans l’atmosphère avant d’être dispersés à grande échelle, jusque dans les océans.
Autant d’indices qui sont compatibles avec la fragmentation d’une comète et une série d’explosions atmosphériques réparties sur l’hémisphère Nord. Les chercheurs ont également réexaminé des événements plus récents comme à Toungouska.
Leur analyse met en évidence du quartz choqué, parfois colmaté par du verre de fusion, ainsi que des sphérules et des résidus métalliques, là aussi l’hypothèse d’une explosion atmosphérique est renforcée. Des signatures comparables apparaissent à Tall el-Hammam, une cité du Levant détruite il y a environ 3600 ans. Les quartz choqués y présentent des fractures variées, parallèles, courbes ou en réseau, traduisant des ondes de choc complexes et multidirectionnelles, cohérentes avec une explosion aérienne majeure.
Ces travaux suggèrent que les explosions aériennes pourraient être plus fréquentes que les impacts formant de grands cratères. Leur capacité à affecter de vastes surfaces, tout en laissant des traces géologiques ténues et rapidement effacées, explique sans doute pourquoi ils ont longtemps été sous-estimés.
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