Nassuf Ben Amad
Africa-Press – Comores. Après 200 jours au poste de directeur général adjoint de l’Institut national de la statistique, des études économiques et démographiques (INSEED), Moussa Assoumani alias Makin, nous fait l’état des lieux de l’établissement. Evoquant au passage le rôle de l’institut et les ambitions ainsi que les attentes vis-à-vis de l’Etat. Interview.
Question: Pouvez-vous nous rappeler brièvement le rôle de l’INSEED?
Moussa Assoumani: L’Institut national de la statistique, des études économiques et démographiques (INSEED) occupe une place centrale dans le Système statistique comorien. Elle a pour mission principale de produire, traiter et diffuser l’information statistique, en mettant un accent particulier sur leur dimension scientifique. Les statuts de l’INSEED lui confèrent la responsabilité de structurer et assurer le suivi de la coordination de toutes les activités statistiques du système statistique national tout en apportant une réponse à toutes les questions relatives aux normes, aux concepts et définitions, aux classifications, aux nomenclatures et aux méthodes relatifs à la collecte, au traitement, à l’analyse et à la diffusion des données statistique du pays. Placé sous la tutelle du Ministère des Finances, du Budget et du Secteur bancaire, cet établissement constitue une structure publique dédiée à soutenir la planification nationale, les actions du Gouvernement et à amener les décideurs publics à prendre des décisions sur la base des informations statistiques fiables.
Question: Quel était l’état de l’INSEED à votre prise de fonction?
M.A: Permettez-moi d’entrée de jeu de vous remercier pour votre intérêt pour notre institution. Sur votre question, je dirai simplement que nous avons trouvé un Institut plus que fragilisé, à tous les niveaux. Comme vous le savez, c’est un institut très jeune qui vient de fêter son 10e dixième anniversaire l’année dernière, qu’auparavant était une simple direction nationale de la statistique au sein du Commissariat Général au Plan. Dès le lendemain de sa création en 2014, l’institut connaissait déjà ses propres crises internes. Le diagnostic émanant des états généraux réalisés en 2022 sous l’égide du SNU que nous avons trouvé après notre prise de fonction, faisait ressortir l’état des lieux suivant: un environnement juridique et institutionnel inachevé, une coordination technique des programmes statistiques quasi-inexistante, une coopération internationale passive, une situation financière opaque, un système informatique très limité et en déphasage avec les évolutions technologiques dans le domaine, et bien d’autres difficultés. Cette situation était la conséquence de 4 facteurs essentiels: l’institutionnalisation inachevée de 2014 marquée par l’absence des instruments juridiques (Conseil national de la statistique, Conseil d’administration) prévue par la Loi statistique de 2014, par le manque de contrôle financier, par l’absence de instruments de gestion et d’organisation. C’est un héritage technique avec beaucoup de maux que nous avons trouvé, aussi bien au plan organisationnel, managérial, commercial que financier. Tout était donc à réorganiser.
Question: Après une période d’observation, comment se présente l’INSEED aujourd’hui?
M.A: Il convient d’abord d’indiquer que depuis sa création, les comptes de l’INSEED ne sont pas visités pour plusieurs raisons citées ci-haut. Ainsi depuis l’année 2023, la Direction générale s’est mise à pied d’œuvre pour la mobilisation de nos autorités sur la nécessité de mettre en place les organes juridiques pour faire évoluer ce domaine transversal qui est la production des statistiques officielles du pays, mais surtout pour amener l’INSEED sur la voie de la « maturité de vie ». Ces actions stratégiques auxquelles la Direction devrait continuer à s’engager permettront de le remettre au travail, de rassurer le personnel, de rassurer les partenaires nationaux et internationaux, de rassurer les utilisateurs et les clients, rassurer l’Etat et d’inspirer confiance.
Il nous fallait rétablir les textes fondamentaux, les règles de gestion et les conditions de crédibilité de notre institution tant voulue par nos acteurs du système statistique national que recommandée par nos partenaires techniques et financières. Vous savez qu’un établissement comme l’INSEED qui a une autonomie de gestion administrative avec près de dix ans d’exercices non resolutionnés par un conseil d’administration, avec des politiques stratégiques non validées par un Conseil national de la statistique n’est pas crédible. La mise en place de ces organes stratégiques par notre Gouvernement marquera le début de l’INSEED dans l’arène nationale et internationale des Etablissements crédibles, avec qui l’on peut contracter et s’appuyer.
Question: Quelles sont les prioritaires du Système Statistique National (SSN) en général et pour l’INSEED en particulier?
M.A: Dès ma prise de fonction, j’ai entamé une tournée de prise de contact pour rencontrer et écouter les cadres de nos principales parties prenantes du système statistique national, y compris les partenaires techniques, les unités de gestion et le personnel, et leur confirmer mon engagement et ma volonté de mener à bien ma mission de directeur technique. Au terme de cette première phase, j’ai pu identifier six initiatives prioritaires à mettre en œuvre au sein de l’Institut de manière bien entendu urgente à savoir: accélération de la mise en place d’un nouvel organe décisionnel de l’Institut, établissement d’un cadre organique cohérent propre à l’Institut, révision du Plan Stratégique Stratégie Nationale de Développement de la Statistique (SNDS), accélération d’un Plan de travail cohérent pour l’Institut, et enfin accélération d’un Plan de formation et renforcement des capacités pour l’Institut. Sachant que, de nombreuses initiatives ont déjà été prises et des actions sont en ce moment en cours pour relever l’Institut. Ce que nous attendons de l’Etat, c’est de faire adopter les textes d’application relatifs à la mise en place des organes politico-stratégique de l’Institut soumis au Gouvernement ; que le secteur soit enfin règlementé.
Question: Pour les utilisateurs qui ont des besoins croissants en termes de données statistiques, que pouvez-vous dire pour les rassurer, les mettre en confiance voire les remobiliser?
M.A: Merci pour cette question qui me paraît très pertinente. Effectivement pour qui a suivi l’actualité nationale sur les états généraux sur les domaines de la statistique en 2022, a pu se rendre compte de l’importance des données statistiques en matière de planification et de suivi du progrès de développement dans le pays. Mais qui pouvait prédire qu’on pouvait porter nos priorités urgentes sur le projet d’établissement des organes stratégiques, des instruments de gestion, d’une SNDS du pays, jusqu’à en envisager un agenda de la première réunion de Conseil National de la Statistique du SSN (Système Statistique National). Tout ceci pour dire aux utilisateurs que leur établissement est désormais fiable et viable. C’est dire aux utilisateurs qu’ils n’ont plus de souci à se faire sur ce qui est de l’avenir de l’Institut.
Source: lagazettedescomores
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