Africa-Press – Comores. Depuis trois ans, l’Inrae (Institut national de recherche pour l’agriculture, l’alimentation et l’environnement), en collaboration avec l’AP-HP (Hôpitaux de Paris) reçoit et analyse des échantillons de selles provenant de participants sur tout le territoire. A ce jour, 30.000 dons ont été recueillis (sur les 100.000 visés d’ici 2029) dont 5.000 ont fait l’objet d’un séquençage, permettant d’identifier les micro-organismes intestinaux et leurs rôles. Cette étude d’envergure, baptisée The French Gut, vise à dresser une caractérisation du microbiote de la population française.
Le microbiote comme miroir de la santé
Les recherches sur le microbiote se multiplient et révèlent des liens étroits non seulement avec la digestion, mais aussi avec l’immunité, les pathologies neurologiques et les cancers. « Concernant le microbiote, nous en sommes au début de l’histoire. Nous souhaitons répondre à une question brûlante: est-ce que le microbiote est un facteur central dans beaucoup de pathologies, ou non? Et si oui, lesquelles? », résume le Pr Robert Benamouzig, chef du service gastro-entérologie à l’hôpital Avicenne AP-HP et coordinateur du projet. Mais pour répondre à cette question, il est nécessaire d’établir des cartographies de références, afin de comparer un microbiote individuel à celui de la population générale.
Chaque prélèvement fécal est accompagné d’un questionnaire sur le mode de vie et les habitudes alimentaires, il permet de relier l’alimentation et l’environnement d’un individu à son microbiote et à sa santé. Ces données sont d’autant plus précieuses dans le contexte actuel marqué par la progression des maladies chroniques (hypertension artérielle, pathologies digestives, asthme, etc.).
Des premiers résultats sur 5.000 échantillons séquencés
Ainsi, les premiers résultats de cette étude sont les suivants: tout d’abord, une perte de diversité microbienne est observée chez les participants souffrant de maladie chronique, et celle-ci s’accentue lorsque les maladies se cumulent. De plus, même sans maladie, le stress et les troubles digestifs sont associés à un microbiote appauvri. A l’inverse, les volontaires ayant des modes de vie plus sains (activité physique, alimentation équilibrée, faible consommation d’alcool et de tabac) présentent un microbiote riche et varié.
Cependant, un dilemme persiste: cet appauvrissement de la diversité est-elle une cause ou une conséquence des maladies? La prise de médicament, par exemple, peut impacter les populations de bactéries de l’intestin. « Nous devons prendre en compte ces facteurs confondants pour bien comprendre le rôle du microbiote sur différentes maladies », explique Patrick Veiga, directeur du projet à l’Inrae, qui compte sur le projet pour élucider la question.
Inclure les enfants et les adolescents dans la cartographie
Parmi les 30.000 répondants, quelques profils types sont peu représentés: les jeunes hommes, les séniors de plus de 70 ans, les personnes vivant en milieu défavorisé, et surtout les enfants, puisque jusqu’ici la collecte était réservée aux adultes. Or, si de nombreuses études se sont penchées sur le microbiote des 0-3 ans, les connaissances concernant les 3 à 17 ans sont très limitées.
Cette « période critique » est un âge de transitions, tant sur le plan physiologique, qu’hormonal et comportemental, qu’il est essentiel d’étudier, selon le Dr Alexis Mosca, spécialiste de maladies digestives à l’hôpital Robert Debré (AP-HP).
L’appel à volontaires s’élargit donc aux 3 à 17 ans, en bonne santé ou malades, dans toute la France, dans l’objectif de recueillir des échantillons de 10.000 jeunes d’ici 2029. « Avec le French Gut Kids, nous franchissons une nouvelle étape: explorer la dynamique du microbiote chez les enfants et adolescents, pour agir tôt et mieux sur la santé de demain », déclare le Pr Robert Benamouzig.
Ce nouveau volet de recherche devrait aider à comprendre la construction progressive du microbiote, la transmission de bactéries de parent à enfant et les liens avec des pathologies fréquentes chez l’enfant (allergie, asthme, maladies intestinales ou psychiatriques). En parallèle, le projet vise à sensibiliser les enfants quant à l’impact du microbiote sur la santé et l’importance de l’alimentation, comme le montre le programme présenté sur le site frenchgut.fr. Certains parents volontaires inciteront peut-être leurs enfants à participer à la collecte, ou à l’inverse, la curiosité des plus jeunes pourrait motiver leurs parents à s’engager dans la démarche, pensent les chercheurs du projet.
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