Chez les Fourmis, la Quantité Prime sur la Qualité

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Chez les Fourmis, la Quantité Prime sur la Qualité
Chez les Fourmis, la Quantité Prime sur la Qualité

Africa-Press – Comores. Vaut-il mieux disposer d’une poignée de guerriers baraqués en armure ou d’un large régiment de soldats malingres en sous-vêtements? A ce dilemme stratégique, certaines espèces de fourmis ont clairement répondu, ont découvert Arthur Matte, du département de zoologie de l’Université de Cambridge (Royaume-Uni) et son équipe internationale. Ils publient leurs résultats dans le numéro du 19 décembre 2025 de la revue Sciences Advances.

Les compromis entre qualité et quantité sont monnaie courante chez les espèces sociales. Et particulièrement les fourmis car l’organisation de leurs sociétés et leurs avenirs dépendent de la direction prise. Sachant que les ressources alimentaires sont limitées, on peut effectivement se demander s’il vaut mieux investir dans une main-d’oeuvre nombreuse constituée d’ouvriers au rabais ou dans la production d’une colonie plus réduite, plus résistante mais aussi plus coûteuse parce que mieux nourrie.

De 6 à 35% du poids de la fourmi

Les auteurs de la présente étude ont voulu vérifier s’il existait un compromis entre la taille d’une colonie et l’investissement dans la cuticule. Celle-ci est essentielle car cette couche protectrice de l’exosquelette, en plus de fournir un support solide aux muscles de l’insecte, le protège des prédateurs, de la déshydratation et des pathogènes. Toutefois, cette armure naturelle est coûteuse car elle nécessite des éléments relativement rares comme de l’azote, et divers minéraux dont le zinc et le manganèse.

A l’aide de radiographies 3D, les chercheurs ont mesuré l’épaisseur des cuticules et les volumes corporels de plus de 500 espèces de fourmis, sur les près de 17.000 recensées.

Résultat: l’épaisseur de l’armure des fourmis varie grandement. Tandis que d’un côté du spectre, la cuticule de Plagiolepis afrc-gh01 occupe 6,6% du poids total du corps, celle de Apterostigma magacephala pèse 35%.

Le collectif prime sur l’individu

Forts de ces résultats, les chercheurs ont ensuite incorporé les modèles évolutifs des différentes colonies. Ce qui leur a permis de constater que plus une colonie comptait de fourmis, moins la cuticule de ces dernières était épaisse. Sans pour autant que les individus soient plus petits. Simplement, ils étaient moins protégés.

Bien qu’une cuticule plus épaisse offre une meilleure protection à un individu, elle ne permet pas l’édification de larges colonies. Réduire le coût en économisant sur les nutriments nécessaires à édifier un tissu biologique très couteux permet alors de concentrer les efforts pour une plus large population.

Dans ce cadre, et tout particulièrement chez des animaux très sociaux comme les fourmis, l’individu s’efface parfois devant le collectif. Les forces de travail sont alors distribuées dans toutes les couches de la colonie, se partageant entre la collecte de ressources et la défense du nid pour former une société plus complexe et savamment structurée. Et d’autant plus qu’elle sera nombreuse.

Moins égale plus

De surcroit, l’étude a apporté un autre enseignement aux scientifiques. Une cuticule peu épaisse s’avérait associée à des taux de diversification élevés, c’est à dire qu’à partir d’un genre de fourmi donné, bien plus d’espèces différentes avaient pu prospérer. Cela ne pouvait signifier qu’une chose: les genres à fines cuticules avaient eu un succès évolutif supérieur en parvenant à s’acclimater à des biotopes variés et à évoluer en quantité d’espèces distinctes. Moins cuirassées, les fourmis apparaissaient plus versatiles pour conquérir et investir de nouveaux environnements.

Transposée à une autre espèce sociale, l’être humain, cette stratégie gagnante aurait tendance à produire des effets similaires. Sur les champs de bataille des sociétés médiévales, les chevaliers en armures ont progressivement laissé la place à des archers et des arbalétriers en plus grand nombre. Et, durant la Première Guerre mondiale, un ingénieur anglais Frederick Lanchester avait formulé une série de lois mathématiques montrant les avantages que pouvaient retirer une armée moins lourdement armée mais plus nombreuse, sur une autre, à priori plus puissante mais plus réduite. Moralité: humain et fourmi, même combat.

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