Abdoulatuf mohamed Amine
Africa-Press – Comores. Dans le paysage politique comorien, rares sont ceux qui, en si peu de temps, ont su s’imposer comme des figures incontournables. Abdoul Fatah Said Mohamed en fait indéniablement partie. Son parcours, jalonné de défis et de réussites, témoigne d’un engagement indéfectible pour le développement et la modernisation des institutions publiques, qu’il s’agisse de l’Agence du Hedj ou de la mairie de Moroni.
Un parcours marqué par l’engagement et le service public
On peut le critiquer, dire ce que l’on veut, mais Abdoul Fatah est un homme courageux, engagé, profondément humain et dévoué au service des autres. Son parcours ne se limite pas à la politique, il est avant tout celui d’un homme de terrain, proche des citoyens, soucieux d’améliorer la vie quotidienne et d’instaurer une gestion plus transparente et efficace des affaires publiques. Son accession à la mairie de Moroni, il y a seulement deux ans, était la suite logique d’un leadership affirmé et d’une expérience reconnue. Mais cette ascension fulgurante et sa volonté de gouverner librement ont fini par déranger ceux qui n’acceptent pas l’indépendance et la compétence.
Une gestion exemplaire à la tête de l’Agence du Hedj
Avant de prendre les rênes de la capitale, Abdoul Fatah a dirigé avec brio l’Agence du Hedj, un service placé sous la tutelle directe de la présidence et dont la gestion exige rigueur, organisation et sens des responsabilités. Sous son administration, le pèlerinage a connu une amélioration significative en matière de logistique, d’accompagnement et de satisfaction des pèlerins. Sa gestion efficace a été saluée pour sa transparence et sa capacité à répondre aux attentes des fidèles, malgré les contraintes inhérentes à l’organisation d’un tel événement. Son travail a marqué un tournant dans la gestion du Hedj aux Comores, établissant des standards jamais atteints auparavant. Mais ces réussites ont également suscité des tensions, car un homme de résultats dérange dans un système où la médiocrité est parfois érigée en norme. Refusant de se plier aux logiques de clientélisme, il a toujours privilégié le mérite et la compétence, ce qui lui a valu le respect du peuple mais aussi l’hostilité des cercles du pouvoir.
Un maire réformateur en seulement deux ans
Élu à la mairie de Moroni, Abdoul Fatah a rapidement insufflé une dynamique nouvelle, faisant de la transparence et de la modernisation des services municipaux ses priorités. Parmi ses réalisations notables, on peut citer: Une meilleure gestion des infrastructures urbaines, avec une réorganisation des services municipaux pour une plus grande efficacité. La régulation du commerce et des marchés, afin de favoriser l’économie locale et soutenir les petits commerçants. L’assainissement des finances municipales, avec une volonté affirmée de transparence et de lutte contre la corruption. Son action municipale a été marqué par la proximité avec la population, un engagement sur le terrain, et une capacité à répondre aux attentes des citoyens. Mais cette autonomie de gestion et son refus de céder aux pressions politiques ont rapidement fait de lui une cible pour un régime qui ne tolère ni indépendance ni contestation.
Une éviction orchestrée: la trahison du pouvoir
Abdoul Fatah n’a jamais été un opposant du régime, bien au contraire. Il a soutenu Azali Assoumani avec loyauté, croyant que le développement des Comores nécessitait une cohésion nationale forte. Mais son tort a été de vouloir exister politiquement par lui-même, sans se soumettre aux diktats d’un cercle présidentiel plus soucieux de ses propres intérêts que de l’avenir du pays. Dans un système où l’uniformité est imposée et où toute voix indépendante est perçue comme une menace, Abdoul Fatah a fini par déranger. Plutôt que de reconnaître son efficacité et sa contribution, le régime a préféré l’éliminer, sacrifiant un serviteur compétent pour assurer la mainmise d’un clan sur la capitale. L’objectif est clair: verrouiller les institutions en imposant une gouvernance clanique où seule la loyauté compte, au détriment du mérite et de l’efficacité. Cette éviction n’est pas seulement une attaque contre un homme, elle est une attaque contre une vision moderne et réformatrice du pouvoir.
Un danger pour le régime: un homme à abattre ?
L’éviction d’Abdoul Fatah ne marque pas la fin de son engagement, bien au contraire. Elle ouvre un nouveau chapitre dans la lutte pour la souveraineté populaire et l’alternance politique aux Comores. Si Fatah décide de prendre son indépendance, il pourrait devenir une figure clé de l’opposition, accentuant ainsi les tensions politiques à Moroni et au-delà.
Un précédent inquiétant
L’histoire récente des Comores est jalonnée d’exemples d’hommes politiques évincés, qui ont ensuite vu leur liberté menacée. Certains ont été emprisonnés, d’autres poussés à l’exil ou réduits au silence. L’exemple de l’ancien président Ahmed Abdallah Sambi, autrefois proche d’Azali et aujourd’hui emprisonné, reste un précédent inquiétant. Dans un régime où toute alternative est perçue comme un danger, Abdoul Fatah est désormais un homme à abattre. Son influence croissante à Moroni, son réseau et sa popularité en font une menace directe pour le régime en place.En choisissant d’écarter un homme compétent et apprécié, le régime envoie un message clair: toute voix discordante sera éliminée. Mais ce choix pourrait bien être une grave erreur politique. Si le pouvoir possède encore un minimum de discernement, il devrait comprendre que bâtir une nation forte ne peut se faire en éliminant systématiquement toute opposition interne.
Aujourd’hui, le régime est face à un dilemme:
Soit il reconnaît l’importance d’Abdoul Fatah et accepte son rôle dans le paysage politique, en comprenant que le débat démocratique est essentiel à la stabilité du pays. Soit il poursuit sa politique de répression, au risque de renforcer la frustration populaire et d’exacerber les divisions internes. Un combat qui ne fait que commencer. Abdoul Fatah ne disparaîtra pas.
Son bilan à la tête du Hedj et de la mairie de Moroni démontre qu’il est un gestionnaire compétent et un homme de terrain. Le régime d’Azali Assoumani a peut-être réussi à l’écarter, mais il n’a pas effacé son influence. Le véritable défi n’est pas d’avoir imposé un candidat sans légitimité, mais de gérer les conséquences de l’éviction d’un homme qui incarne l’espoir d’une gestion plus juste et plus transparente. Ce combat ne fait que commencer, et la lutte pour la souveraineté populaire et la démocratie aux Comores est loin d’être terminée.
Source: lagazettedescomores
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