L’Union africaine au sein du G20 : Une grande victoire certes, mais quels seraient les avantages pour le Continent ?

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L’Union africaine au sein du G20 : Une grande victoire certes, mais quels seraient les avantages pour le Continent ?
L’Union africaine au sein du G20 : Une grande victoire certes, mais quels seraient les avantages pour le Continent ?

Anouar CHENNOUFI

Africa-Press – Congo Brazzaville. L’Union africaine est officiellement devenue « membre permanent » au sommet du G20 à l’invitation du Premier ministre indien Narendra Modi, dont le pays a accueilli, les 9 et 10 septembre 2023, le 18e Sommet des chefs d’État et de gouvernement du G20 à New Delhi.

Et, dans un moment solennel, Narendra Modi a invité dans son discours d’ouverture le président de l’UA à prendre place : « Avec l’accord de tous, je demande au président de l’Union africaine de prendre sa place en tant que membre permanent du G20 ».

Le président de l’Union africaine s’est ensuite installé aux côtés des dirigeants des pays du G20, sachant que l’Union africaine, qui comprend 55 États membres, aura désormais le même statut que l’Union européenne, seul bloc régional membre à part entière du G20. Le statut actuel de l’UE est celui d’une « organisation internationale invitée. »

C’est ainsi que le projet de déclaration annonçait : « Nous accueillons l’Union africaine en tant que membre permanent du G20 et pensons que l’inclusion de l’Union africaine dans le groupe contribuera de manière significative à relever les défis mondiaux de notre époque. »

L’intégration présente de nombreux avantages, dont l’élargissement des marchés régionaux qui donne aux producteurs et aux consommateurs africains davantage de possibilités, bien au-delà des marchés parfois restreints de leurs propres pays.

Parmi les autres questions qui ont été tranchées lors du sommet figuraient :
• l’augmentation des prêts accordés aux pays en développement par les institutions multilatérales,
• la réforme de la structure de la dette internationale,
• la réglementation des crypto-monnaies
• et l’impact de la géopolitique sur la sécurité alimentaire et énergétique.

Appui inconditionné à l’adhésion de l’UA au G20

Le G20 comprend actuellement 19 pays et l’Union européenne, et plus tôt cette année, le groupe avait invité 9 pays non membres, dont le Bangladesh, Singapour, l’Espagne et le Nigeria, ainsi que des organisations internationales telles que les Nations Unies, l’Organisation mondiale de la santé, la Banque mondiale et le Fonds monétaire international, à prendre part au sommet de New Delhi.

Dans le même contexte, en juin dernier, le Premier ministre indien Narendra Modi a proposé aux dirigeants des pays du G20 d’accorder à l’Union africaine une adhésion à part entière et permanente lors du sommet de New Delhi. Des pays, dont l’Allemagne, le Brésil et le Canada, ont également annoncé leur soutien à l’adhésion de l’Union africaine au G20.

Il importe de rappeler aussi que, lors du sommet « USA-Afrique » tenu à Washington à la fin de l’année dernière, le président américain Joe Biden avait appelé à un plus grand rôle de l’Afrique sur la scène internationale, exprimant son soutien à l’Union africaine pour obtenir un siège permanent au Conseil de sécurité de l’ONU et un siège permanent au sein du G20.

Par ailleurs, le G20 représente 85 % du produit brut mondial et 75 % du commerce mondial, et sa population constitue les deux tiers de la population mondiale.

Quant à l’Union africaine, qui compte 55 États membres (dont six membres suspendus actuellement), son produit intérieur brut total s’élève à trois mille milliards de dollars, et jusqu’à présent, le continent était représenté au G20 par un seul pays : l’Afrique du Sud.

Donc, pour le G20, l’adhésion de l’Union africaine dans ses rangs, est en fait une démarche considérée comme une victoire diplomatique pour l’Inde, qui a accueilli le sommet cette année et qui émerge comme le leader des pays du Sud.

C’est pourquoi, dans le cadre d’une étape très attendue par de nombreux pays africains concernant leur adhésion au Groupe des Vingt (G20), le Premier ministre indien Narendra Modi avait mis l’accent à sa manière, sous le slogan « Une terre, une Famille, un seul avenir » :

« L’Union africaine a officiellement rejoint le groupe, à la lumière de l’importance croissante du continent africain pour remodeler les alliances internationales dans un contexte international changeant et des défis mondiaux communs tels que :
• les questions de sécurité alimentaire,
• le changement climatique,
• le terrorisme,
• la migration,
• la sécurité énergétique,
• et autres. »

Quels objectifs ?

Une étude du Centre égyptien de pensée et d’études stratégiques a révélé les implications et les avantages mutuels de l’adhésion de l’Union africaine au G20, qui comptera « 19 pays + l’Union européenne + l’Union africaine », et sera appelé désormais « G21 », et les transformations majeures qui aboutiront au nouvel ordre mondial, et la nécessité de représenter la voix africaine dans les institutions de gouvernance internationale, y compris le G20, et les ambitions africaines en matière de réforme du Conseil de sécurité de l’ONU.

L’adhésion formelle de l’Union africaine au G20 représente à cette étape un moment charnière dans le paysage de la gouvernance internationale, remodelant les politiques mondiales et renforçant la participation de l’Afrique aux processus décisionnels sur les questions mondiales, puisque la décision d’adhésion a été adoptée en février 2023 lors du sommet de l’Union africaine, présidé par Macky Sall, président du Sénégal et de l’Union africaine à l’époque. Ce sommet a été précédé par de nombreuses tentatives d’adhésion africaines, considérant l’Union africaine comme un représentant des intérêts collectifs africains. Récemment, plusieurs puissances mondiales ont également appelé l’Union africaine à rejoindre le groupe.

L’étude a souligné que l’adhésion de l’Union africaine au G20 constitue un tournant dans la voie du continent africain vers la refonte des politiques mondiales, à la lumière du poids économique et démographique de l’Afrique, et de l’importance de sa participation à :
• création d’un système financier mondial plus juste et plus complet,
• trouver des solutions multilatérales aux défis mondiaux urgents,
• renforcer la position de l’Afrique à propos des politiques mondiales,
• trouver des solutions globales pour un développement mondial durable,
• et promouvoir les principes de bonne gouvernance mondiale.

De facto, cela représente un double bénéfice pour les deux parties, à la lumière des effets imbriqués des problèmes économiques mondiaux, en particulier sur les pays les plus pauvres d’Afrique, avec l’élargissement du paradoxe africain à la lumière des pays africains possédant de nombreuses ressources minérales et humaines, et il est s’attend à ce que leur population jeune de 1,3 milliard d’habitants double d’ici 2050, pour constituer un quart de la population mondiale, et comprend la plus grande zone de libre-échange au monde, tandis que le G20 est la principale plate-forme multilatérale de coopération économique et financière mondiale. .

L’intégration aura donc un impact sur la montée en puissance de l’Afrique dans les approches des grandes puissances où de nombreuses puissances internationales ont soutenu l’adhésion de l’Union africaine au G20 pour des raisons géopolitiques et diplomatiques :
• Les États-Unis souhaitent faire face à l’influence croissante de la Chine en Afrique,
• et l’Inde souhaite inclure l’Union africaine dans le groupe au cours de sa présidence pour prouver son rôle de défenseur des pays du Sud,
• tandis que la Chine s’efforce également de démontrer son rôle de soutien des pays du Sud, en particulier de l’Afrique, et a réalisé de nombreux investissements dans les infrastructures, notamment minières, dans le cadre de l’« Initiative de la Ceinture et de la Route »,
• tandis que la Russie a intensifié ses efforts pour obtenir le soutien des pays africains pour son rôle croissant, face à l’opposition des pays occidentaux à la Russie depuis la guerre d’Ukraine.

Qu’apportera l’Union africaine à l’Afrique et au monde après son adhésion au G20 ?

L’Afrique du Sud était jusqu’ici le seul pays africain représenté au G20. Celui-ci l’a accueillie officiellement dans ses rangs, dans le cadre d’une décision interprétée comme un signal fort pour le continent.

Après avoir rejoint le G20, l’Afrique aura acquis un canal important de communication et de coordination des politiques macro-financières avec les économies les plus importantes du monde. Cela aidera les pays africains à relever les défis actuels liés à l’augmentation des risques d’endettement, au changement climatique et à la sécurité alimentaire. À long terme, l’Afrique dispose d’énormes avantages en termes de ressources, de population et de marché, et une fois mieux intégrée dans l’économie mondiale, elle libérera un plus grand potentiel de développement.

Entre-autres, après « l’expansion » du mécanisme de coopération des BRICS, l’inclusion de l’Union africaine dans le G20 s’avère être un autre événement marquant dans le développement et la croissance du « Sud global ». Dans le même temps, dans une situation mondiale chaotique et imbriquée, les voix montantes des pays du « Sud » renforcent le pouvoir du multilatéralisme, ce qui aura un effet restrictif d’hégémonie et de politique de puissance.

En outre, à mesure que les économies africaines continuent de s’intégrer au monde, la participation de l’Afrique aux affaires mondiales a considérablement augmenté. L’opinion publique estime que la Chine a joué un rôle majeur dans la promotion de l’adhésion de l’Union africaine au G20.

Certes, la Chine soutient fermement l’adhésion de l’Union africaine au G20, car la Chine et l’Afrique jouissent depuis longtemps d’une forte confiance politique mutuelle et sont, d’une part, de bons partenaires sur la voie du développement commun.

D’autre part, l’Afrique est un pôle important de puissance internationale et une force importante, pour protéger l’équité et la justice internationales. C’est pourquoi, l’adhésion de l’Union africaine au G20 est une victoire pour le « véritable multilatéralisme ».

Le président de la Commission de l’UA, Moussa Faki Mahamat, a estimé quant à lui que « cette adhésion pour laquelle nous nous sommes mobilisés offrira un cadre propice pour amplifier le plaidoyer en faveur du continent et pour son efficace contribution à relever les défis mondiaux ».

De son côté, le président nigérian, Bola Ahmed Tinubu, président actuel de la CEDEAO, a fait publier ce message sur le réseau social « X » (ex-Twitter) : « Nous sommes impatients de faire progresser nos aspirations sur la scène mondiale par le biais de la plateforme du G20 dont l’Union africaine est devenue membre permanent ».

Pour sa part, le président sud-africain, Cyril Ramaphosa, s’est dit « ravi » du siège offert à l’UA, rappelant à l’occasion que, totalisant trois mille milliards de dollars de PIB, le continent n’était jusque-là représenté au G20 que par un seul État, son pays l’Afrique du Sud.

Toutefois, les pays du groupe du G20 risquent de peiner davantage à trouver un consensus sur les questions géopolitiques, notamment l’attitude à avoir face à la Russie, ou face au climat. Des sujets pourtant lourds de conséquences pour les pays en développement, en première ligne face aux événements météorologiques extrêmes liés au changement climatique, comme face à l’insécurité alimentaire que nourrit la guerre en Ukraine en pesant sur les prix des céréales.

« Les économies en développement sont les premières touchées par le changement climatique, alors qu’elles sont les moins responsables de cette crise », a rappelé le président sud-africain Ramaphosa.

Si nous voyons ensemble les « Bénéfices mutuels » des deux parties « G20 – Continent africain »

L’adhésion de l’Union africaine au G20 est considérée comme un double bénéfice pour les deux parties, à la lumière des effets imbriqués des problèmes économiques mondiaux, en particulier sur les pays les plus pauvres d’Afrique, avec l’élargissement du paradoxe africain face aux pays africains possédant de nombreuses ressources minières et humaines, on s’attend à ce que leur population de jeunes adultes qui compte 1,3 milliard de personnes double d’ici 2050, pour constituer un quart de la population mondiale, et comprend la plus grande zone de libre-échange au monde.

Bien que le G20 soit la principale plateforme multilatérale de coopération économique et financière mondiale, les gains mutuels peuvent s’expliquer comme suit :

• Le G20 bénéficie des ressources du continent africain

Les capacités et ressources du continent africain sont un point crucial pour le groupe. Les pays africains possèdent des ressources clés pour stimuler l’économie mondiale, notamment des ressources énergétiques et des matières premières vitales utilisées pour fabriquer divers biens technologiques (Smartphones, batteries de voitures électriques et satellites). En plus des ressources abondantes en énergie solaire et éolienne, notamment en Afrique du Sud et au Maroc, qui sont leaders dans le domaine de l’énergie durable.

L’Afrique possède également les matériaux de base nécessaires à la technologie énergétique durable et à la transformation verte, tels que le cobalt, le manganèse et le platine. Ces facteurs font de l’Afrique un acteur décisif dans la réalisation des objectifs du G20, alors que le continent détient 60 % des actifs mondiaux en matière d’énergies renouvelables et plus de 30 % des minéraux de base pour les technologies renouvelables et à faibles émissions de carbone, la République démocratique du Congo représente à elle seule près de la moitié du cobalt mondial.

• Renforcement de la structure de l’économie mondiale et transformation numérique

L’Union africaine joue un rôle plus important dans la structure du commerce mondial par rapport aux années précédentes depuis la création de la Zone de libre-échange continentale africaine (ZLECAf), qui a intégré les économies du continent dans un marché unique depuis janvier 2021. L’Union africaine est classée comme le huitième plus grand bloc économique du monde. À ce titre, son inclusion au G20 est cruciale pour promouvoir des solutions structurelles qui profitent à l’ensemble du continent.

D’autre part, le G20 bénéficie des capacités africaines sur les principaux points (ayant figuré dans l’ordre du jour du sommet de New Delhi), tels que les paiements numériques, puisque le pays du Kenya est le premier à lancer un système de paiements locaux numériques à travers le système avancé (M-Pesa), qui s’est étendu pour inclure des pays tels que l’Afrique du Sud, l’Égypte, le Ghana, la Tanzanie, le Mozambique, la République démocratique du Congo et le Lesotho.

Dans le même ordre d’idées, l’Union africaine a participé pour la première fois au Sommet du G20 à Toronto, au Canada, en juin 2010. Depuis lors, l’Union et son programme de développement économique, connu sous le nom de Nouveau Partenariat pour le développement de l’Afrique (NEPAD), ont été régulièrement invités à assister aux Sommets du G20, sachant que ces sommets accordaient de plus en plus d’attention aux questions africaines.

Lors de la présidence chinoise du G20 en 2016, elle s’est concentrée sur le soutien à la production en Afrique. En 2017, l’Allemagne, qui présidait le G20, a proposé l’initiative « Compact with Africa » et l’a présentée à la plateforme des visions du G20 après la conclusion du sommet de Hambourg. Son idée était de relier la Vision 2063 de l’Union africaine à la Stratégie de développement durable 2030 des Nations Unies, en plus d’accroître la coopération et de renforcer le partenariat entre les groupes de réflexion de l’Union africaine et du G20, et de stimuler les investissements étrangers en Afrique.

• Unir la voix africaine sur un programme clair de réforme de l’architecture financière mondiale

A la lumière de l’accélération des crises interconnectées, notamment le changement climatique, l’insécurité alimentaire et énergétique, les urgences de santé publique et l’aggravation des conflits internes, avec un manque de financement, comme le système financier international ne couvre qu’une petite partie des besoins de développement durable de l’Afrique, estimés à 1,3 billion de dollars par an jusqu’en 2030.

De 2016 à 2019, le continent n’a reçu que 3 % des flux financiers mondiaux pour le climat. Ces flux vers l’Afrique s’élèvent à 30 milliards de dollars par an, bien loin des 2.700 milliards de dollars requis d’ici 2030 pour mettre en œuvre les contributions déterminées au niveau national dans le cadre de l’Accord de Paris sur le climat. Par conséquent, l’adhésion de l’Union africaine au G20 facilitera l’accès à des prêts bonifiés ou à faible taux d’intérêt et contribuera à annuler la dette des pays africains pauvres.

• Contribuer à la formation d’un agenda de développement mondial compatible avec l’agenda continental 2063

Les pays africains cherchent à accumuler et mobiliser des financements extérieurs pour l’adaptation au changement climatique, la transition énergétique équitable et le développement des infrastructures, et bénéficier également du renforcement des relations avec les partenaires traditionnels et de ses liens économiques croissants avec les BRICS pour augmenter les flux de financement du développement. Dans ce cadre, le G20 a accordé une attention croissante aux préoccupations africaines et aux questions mondiales pertinentes pour l’Afrique. Plus récemment, il a cherché à aider les pays à faible revenu et très endettés du monde entier, y compris les pays africains, grâce à une couverture vaccinale contre la COVID-19, à l’Initiative de suspension du service de la dette et au Cadre commun d’assainissement de la dette.

En conséquence de ce qui précède, l’adhésion de l’Union africaine au G20 représente un tournant dans la voie du continent africain vers la refonte des politiques mondiales, à la lumière du poids économique et démographique de l’Afrique et de l’importance de sa participation à la création d’un système financier mondial plus juste et inclusif, et à la recherche de solutions multilatérales aux défis mondiaux urgents, renforcer la position de l’Afrique dans la politique mondiale, trouver des solutions globales pour un développement mondial durable et promouvoir les principes de bonne gouvernance mondiale.

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